(Paris) Les aventures de la superhéroïne Ladybug et de son acolyte Chat Noir passionnent les enfants et adolescents du monde entier depuis cinq ans : la série animée franco-coréo-japonaise Miraculous doit son succès à son multiculturalisme et à l’attention qu’elle porte aux « émotions », estime son créateur Thomas Astruc.

Diffusée dans plus de 120 pays, notamment sur Netflix et TF1, cette série en 3D qui se déroule habituellement à Paris, va transporter ses héros à New York le temps d’un téléfilm de 55 minutes — contre une vingtaine pour les épisodes classiques — proposé en avant-première samedi matin sur Disney Channel.

Avec ses décors (Tour Eiffel, Trocadéro, Louvre...) dignes d’une carte postale, Miraculous est l’émission pour enfants la plus regardée dans les cinq principaux marchés européens (France, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Allemagne) derrière Alvin et les Chipmunks et Bob l’éponge, selon une étude Médiamétrie publiée fin 2019. Et elle a remporté un prix lors des Teen Choice Awards (cérémonie à destination des ados) aux États-Unis en 2018.

On y suit la double-vie de Marinette Dupain-Cheng, collégienne franco-chinoise qui, aidée d’une créature magique, revêt son costume rouge à pois noirs pour devenir Ladybug (coccinelle en anglais) et protéger Paris des akumas, des papillons maléfiques qui transforment les humains en méchants en s’appuyant sur leurs émotions négatives.

Ladybug est épaulée dans sa tâche par Chat Noir, épris de la superhéroïne dont il ne connait pas l’identité, et qui n’est autre qu’Adrien, le garçon dont Marinette est amoureuse sans connaître ses activités de félin masqué...

« C’est le premier projet que je réalise et que j’ai aussi créé, pour un coup d’essai je suis assez content », concède à l’AFP Thomas Astruc, 45 ans, dont « pas mal d’années à faire des storyboards pour l’industrie de l’animation ».

« J’ai pu y glisser tout ce que j’aimais quand j’étais petit, faire un gloubi-boulga de toutes mes influences américaines, japonaises, françaises, et apparemment les gens y sont réceptifs », explique le réalisateur, « biberonné aux comics », admirateur du mangaka Osamu Tezuka (papa d’Astro Boy), et dont l’héroïne-coccinelle étudie au collège Françoise Dupont, clin d’œil à Fantômette.

La série emprunte aussi beaucoup à Sailor-Moon, célèbre manga du studio japonais Toei Animation, son coproducteur.

« Grands-mères déguisées »

Formé à l’école des Gobelins, Thomas Astruc travaillait sur une autre série (W. I. T. C. H) quand Ladybug a fait sa première apparition. « Une jeune fille qui venait d’intégrer l’équipe avait sur son t-shirt une coccinelle. Comme c’est la coutume dans les studios d’animation, on a commencé à s’échanger des posts-it avec des dessins, je me suis mis à la caricaturer », a-t-il expliqué lors d’une classe de maître.

Une quinzaine d’années plus tard, la marque Miraculous se décline en jouets, en téléfilm (un autre situé à Shanghaï est également prévu pour Disney Channel), en spectacle musical, bientôt dans un long métrage...

Elle bénéficie aussi d’un fort impact sur les réseaux sociaux, ses diverses chaînes YouTube officielles cumulant plus de 14 millions d’abonnés, et inspire les amateurs de Cosplay, pratique qui consiste à se grimer en personnage de fiction.

En 2016, « la première année de la diffusion de Miraculous en Espagne, j’ai fait des dédicaces pendant six heures lors d’une convention à Madrid. C’était démentiel », raconte Thomas Astruc.

« Petits, ados, adultes, grands-mères... J’ai vu des familles entières venir déguisées », s’étonne-t-il encore. « Ça marche à tous les âges ! ».

« Dans le divertissement, on a tendance à segmenter les choses, “pour les filles”, “pour les garçons”... Nous on essaie d’écrire pour tout le monde, en trouvant le petit angle émotionnel qui va résonner en chacun », explique le créateur.

Avec l’escapade new-yorkaise de Ladybug, qui a nécessité un « travail titanesque d’un an », dont « six mois » rien que pour la reconstitution de la Grosse Pomme, Thomas Astruc entend « payer son tribut à tous les personnages américains qui l’ont marqué ».

Tout en rappelant que les « premiers superhéros étaient Français » : les aventures de Nyctalope, Judex... nourrissaient des films et des romans au début du XXe siècle avant que les Américains ne s’emparent de cette « tradition pour en faire des bandes dessinées. Quasiment un siècle plus tard, ces deux univers se retrouvent à nouveau », se réjouit-il.