La nuit, il travaille comme procureur-conseil. Le jour, il écrit des séries pour la télévision. Rencontre avec Jacques Diamant, auteur de la série Les honorables, qui connaît beaucoup de succès sur le Club illico de Vidéotron ces jours-ci, et qui pourrait bien avoir une suite.

Il y a deux bureaux dans la maison de Jacques Diamant: le premier est au rez-de-chaussée, avec vue sur le jardin. C'est son bureau de procureur-conseil. On y trouve un ordinateur, un exemplaire du Code criminel et un téléphone portable sur lequel les policiers l'appellent la nuit pour des avis juridiques. Le second bureau se trouve à l'étage. Il est percé d'une grande fenêtre qui donne sur la rue, et c'est là qu'il a scénarisé plusieurs épisodes de Toute la vérité et Ruptures, deux séries télé mettant en vedette des avocats. C'est aussi là qu'il a écrit sa première série «juste à lui». Au mur se trouve un immense babillard recouvert de cartons de couleur, une couleur pour chaque personnage principal de la deuxième saison des Honorables, qui en est pour l'instant à l'étape du développement.

Les débuts

«J'écris depuis plus longtemps que je fais du droit, lance Jacques Diamant avec enthousiasme. Jeune, j'écrivais des pièces de théâtre de marionnettes avec mes cousins. J'ai signé une dizaine de pièces de théâtre. J'ai publié un roman. Mais j'ai toujours été attiré par la photographie, les couleurs, l'ambiance, le cinéma. J'avais adapté mon roman en scénario, mais il est toujours dans mes tiroirs.» 

«C'est lourd, le cinéma, c'est long. C'est quand j'ai vu la série Omertà que j'ai réalisé qu'on pouvait faire des séries qui ressemblent au cinéma.»

Avocat de la Couronne, Jacques Diamant a plaidé dans quelques procès devant jury, un travail qui se conciliait mal avec sa passion de l'écriture. «Je réussissais à tout compartimenter, dit-il, malgré le fait que ce sont souvent des dossiers qu'on traîne sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois. J'écrivais les soirs de 19 h à 22 h, je ne sais pas comment je faisais. Disons que j'ai raté beaucoup de choses pour pouvoir me consacrer à l'écriture.»

Le poste de procureur-conseil qu'il occupe depuis neuf ans, un travail qu'il peut accomplir à la maison, il l'a beaucoup convoité. «Mon nom a été sur une liste d'attente durant trois ans, raconte-t-il. Je savais que c'était le travail qui me permettrait d'écrire tout en pratiquant le droit.»

Les Honorables

Offerte depuis le 10 janvier dernier sur le Club illico de Vidéotron, la série Les honorables raconte l'histoire d'une famille de juristes. Les parents sont juges, une de leurs trois enfants est avocate. Leur monde s'écroule lorsque la cadette - une athlète de pointe - est assassinée, un crime sordide qui ébranlera leurs certitudes et leur conception de la justice.

Cette série, Jacques Diamant y pensait depuis longtemps. «J'ai enregistré le titre à la SARTEC il y a 20 ans, souligne-t-il. À l'époque, j'avais en tête une histoire de juges qui entendent des causes en série, une sorte d'hybride entre Les honorables et Toute la vérité. Je savais que l'histoire changerait au fil du temps, mais pas le titre. Puis, un jour, l'inspiration est arrivée par l'actualité. Le drame d'une jeune fille assassinée a bouleversé mon idée de la série. C'est là que j'ai commencé à penser que la victime pourrait être la fille d'un juge et que l'enquête permettrait de dévoiler toutes sortes de choses cachées.»

Jacques Diamant raconte qu'il a soumis la première version de sa série à Jean-Marc Vallée, qui se serait montré intéressé à la tourner. «Mais pour plusieurs raisons, ça n'a pas marché, poursuit le scénariste. À l'époque, ça faisait 10 ans que Jean-Marc écrivait le scénario de C.R.A.Z.Y. Je me disais: si lui, ça lui prend 10 ans, moi, ça va bien m'en prendre 50 avant que mon projet se concrétise...» 

«Disons que j'en ai écrit des projets qui n'ont pas fonctionné... Je n'ai rien volé à personne. Les choses ont véritablement commencé à marcher à partir de Toute la vérité.»

Jamais en manque d'idées

Jacques Diamant a adoré ses expériences d'écriture avec les couples Bernard Dansereau-Annie Piérard (Toute la vérité) et Daniel Thibault-Isabelle Pelletier (Ruptures), des gens qu'il adore visiblement et pour qui il a le plus grand des respects. Mais n'est-ce pas difficile d'écrire des épisodes pour les autres quand on rêve d'écrire sa propre série? Ne craint-on pas de se vampiriser soi-même? «Le producteur Richard Martin m'a déjà dit: ‟Si t'es en panne d'idées, ne t'en fais pas, tu vas en trouver d'autres." Il ne faut pas être avare de ses idées...»

L'auteur affirme que ses principales inspirations sont Ally McBeal et Malcolm, deux séries qu'il a adorées pour leur point de vue original. Pour Les honorables, il a puisé dans son expérience de procureur, mais comme il ne travaille plus au palais de justice depuis neuf ans, il a également posé des questions à ses confrères. Il a même utilisé des détails des cas qu'on lui soumet la nuit, au téléphone. «Un exemple: pendant que je cherchais un moyen de faire sortir le personnage de Macha Grenon de sa maison en pleine nuit, j'ai appris qu'au service-conseil, on pouvait réveiller un juge la nuit pour obtenir une signature pour de l'écoute électronique. Je m'en suis donc servi pour mon histoire. Je ne parlerais jamais d'un cas en particulier, mais il n'y a rien de confidentiel à parler de la manière dont la justice est administrée.»