Pour Émilie, Henrick et Mikaël, trois jeunes déficients intellectuels de l’école Irénée-Lussier, le bal des finissants marque la fin de leur scolarité. La réalisatrice Raphaëlle Mercier les a suivis, avec leurs enseignants, dans le cadre d’un documentaire très touchant, Je suis finissant, diffusé demain à 19 h sur AMI-télé.

À l’école Irénée-Lussier, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, les enseignants André St-Jean, Isabelle Plourde, Augustin Tiffou et l’éducatrice Martine Philibert préparent des jeunes de 12 à 21 ans ayant une déficience intellectuelle à entrer dans le monde des adultes.

Pour plusieurs, après la dernière note de leur bal des finissants s’ouvriront les portes de leur autonomie. Autonomie dans l’activité professionnelle, l’habitat et le transport. Par contre, pour d’autres, plus démunis intellectuellement, ce sera le retour à une vie plus dépendante de leur famille.

AMI-télé, une chaîne qui donne une place aux Canadiens en situation de handicap, a demandé à Raphaëlle Mercier de documenter cette réalité de jeunes déficients en quête d’une insertion épanouie dans la vie de tous les jours.

Images émouvantes

La réalisatrice a su trouver la délicatesse appropriée pour rendre son reportage vivant et instructif. Et révéler la relation forte qui existe entre ces jeunes et leurs enseignants. Préparez vos mouchoirs ! Car ses images sont particulièrement émouvantes, sans tomber dans le pathos.

Ces jeunes déficients ont étudié ensemble pendant des mois, voire des années. La perspective de ne plus se voir après leur bal des finissants leur procure de la tristesse, mais aussi une peur de l’inconnu puisqu’une autre étape de leur vie s’en vient.

Le documentaire présente Henrick, Mikaël et Émilie, trois jeunes dont le handicap n’est pas un obstacle à l’apprentissage, ni aux relations avec les autres, ni aux initiatives personnelles. Trois jeunes qui communiquent bien et qui ont chacun leur personnalité propre.

PHOTO FOURNIE PAR AMI-TÉLÉ

L’élève Émilie Bigras-Lanctôt

Les trois vedettes

Le caractère affirmé, Émilie Bigras-Lanctôt est volubile et débrouillarde. Elle travaille quatre fois par semaine à préparer des légumes dans un fast-food. Trisomique, Mikaël Cossette est un vrai boute-en-train, mais inquiet à l’idée qu’il verra moins sa copine (également trisomique) après avoir quitté l’école. Quant à Henrick Therlonge, timide et poli, on sent dans son enthousiasme discret tout le potentiel qu’il a au fond de lui.

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L’élève Henrick Therlonge

Quand on voit ces trois jeunes discuter, travailler et intervenir dans le documentaire, on se rend compte que s’ils sont différents de la norme, ils n’en sont pas moins brillants et heureux de vivre.

« On fait tout pour les amener le plus loin qu’il est possible de les amener, dit à La Presse André St-Jean, qui a travaillé 31 ans à l’école Irénée-Lussier avant de prendre sa retraite cette année. Il faut leur donner des forces, les rendre capables d’accomplir des tâches et de s’adapter à des situations. Notre objectif est toujours l’autonomie en vue d’une meilleure intégration. Mais tous les élèves ne peuvent avoir les acquis nécessaires. »

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L’enseignante Isabelle Plourde et l’élève Mikaël Cossette

Le documentaire se concentre en effet sur trois jeunes déficients, mais pour d’autres élèves dont la déficience est plus profonde, l’objectif est d’abord de leur apprendre à communiquer. « Il faut qu’ils puissent dire ce qu’ils ressentent, dit André St-Jean. Car ils peuvent bien se comporter en classe et devenir tellement anxieux à l’extérieur qu’ils ne sont plus capables de fonctionner. »

Le travail des enseignants

Je suis finissant est aussi une ode au travail des enseignants dont la tâche est colossale, si importante pour l’avenir de ces enfants, mais aussi pour l’avenir d’une société plus ouverte à la différence.

Après plus de six mois auprès de ces jeunes, j’ai réalisé l’importance des professeurs, des éducateurs et du milieu de vie. J’ai compris qu’au-delà de la déficience intellectuelle, chaque jeune a ses particularités que ses accompagnateurs connaissent si bien. À l’école Irénée-Lussier, la déficience intellectuelle fait partie du quotidien. Elle devient accessoire.

La réalisatrice Raphaëlle Mercier

Dans le documentaire, on sent pleinement la passion des enseignants pour leur métier et leur attachement pour ces dizaines de jeunes dont ils s’occupent avec générosité et bienveillance.

« C’est un bonheur de travailler avec eux », dit André St-Jean. Même si à l’objectif de donner des outils aux jeunes pour affronter la vie s’ajoutent parfois des situations difficiles à gérer comme une tendance à fuguer, de l’alcoolisme ou de l’anxiété chronique. « On fait de l’enseignement individualisé », dit-il.

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La réalisatrice du documentaire Je suis finissant, Raphaëlle Mercier

Dans un proche avenir, l’éducation de ces jeunes déficients intellectuels pourrait prendre une tout autre tournure. André St-Jean souligne que la tendance est de les intégrer dans des écoles ordinaires. « C’est une bonne idée s’ils y reçoivent les services qui correspondent à leurs besoins, dit-il. Tout élève a droit à un enseignement de qualité. En étudiant dans une école avec seulement des jeunes comme eux, ils deviennent plus forts et sont valorisés. »

Valoriser, c’est aussi une des qualités de ce documentaire qui nous familiarise avec des jeunes sympathiques dont on oublie finalement le handicap.

« La déficience intellectuelle, on la croise tous les jours, mais parce qu’on ne la comprend pas, on la juge ou on la met de côté, dit Raphaëlle Mercier. J’espère qu’en écoutant ce documentaire, les gens s’attacheront à Émilie, Henrick et Mikaël et qu’ils les verront comme je les ai vus : drôles, intelligents, vrais. »

Je suis finissant, documentaire de Raphaëlle Mercier, à AMI-télé, demain, 19 h (en rappel, le jeudi 29 août à 20 h).