Radio-Canada perdra une excellente patronne l’automne prochain avec le départ annoncé de Dominique Chaloult, directrice générale de la télé publique francophone depuis janvier 2015.

Elle partira quelque part entre octobre et décembre, le temps qu’une firme externe déniche la personne qui lui succédera. Non, Dominique Chaloult, dont le contrat se termine en décembre, n’a pas été virée ou impliquée dans un conflit interne qui l’a poussée vers la sortie de la grande tour. Après cinq ans, elle désire ralentir la cadence professionnelle et consacrer plus de temps à ses enfants et petits-enfants.

PHOTO SIMON GIROUX, ARCHIVES LA PRESSE

La directrice générale de la télévision de Radio-Canada, Dominique Chaloult, quittera son poste l’automne prochain.

« Il y a eu des naissances et des maladies dans ma famille, et la famille, c’est très important pour moi. D’habitude, j’ai toujours eu des cycles de travail de trois à cinq ans. » — Dominique Chaloult, directrice générale de la télévision de Radio-Canada, qui quittera son poste l’automne prochain

L’annonce de sa future démission, qui a rapidement fait le tour de l’industrie hier, ne concerne pas que le petit milieu de la télévision. Elle vous touche aussi de façon directe, car c’est Dominique Chaloult qui décide, au bout du compte, des émissions qui atterrissent en ondes.

District 31, c’est elle. Les Bye Bye de Simon-Olivier Fecteau, c’est son choix. Et sous sa gouverne dans la dernière année, Radio-Canada a battu TVA dans la plage comprise entre 19 h et 23 h. Il s’agit d’une première en 25 ans. Elle part donc avec plusieurs étoiles dans son bulletin final.

Dominique Chaloult, qui est la conjointe du député libéral Pierre Arcand, souhaite maintenant devenir consultante externe pour des producteurs indépendants ou des diffuseurs. « Ma force, c’est le contenu », dit-elle.

Selon des sources à l’interne, Dominique Chaloult adorait l’aspect programmation de son travail. Du genre : le choix des animateurs, la place des émissions dans la grille, etc. C’est la gestion et les (nombreuses) réunions qui l’enchantaient moins, me dit-on.

Depuis plusieurs mois, Radio-Canada souffre de « réunionite aiguë ». Le moindre petit détail devient maintenant un sujet de réunion, ce qui peut agacer les cadres habitués à l’effervescence associée au monde de la télévision.

Essayons d’imaginer maintenant combien de ces longues réunions ont été nécessaires pour accoucher de la nouvelle politique de diversité de Radio-Canada, qui a également été communiquée hier, sans toutefois qu’il n’y ait de lien avec le départ de Dominique Chaloult.

D’ici 2025, Radio-Canada s’engage à ce qu’une personne issue de la diversité occupe un des cinq postes clés de toutes ses émissions (réalisateur, auteur, interprète principal, producteur et auteur-producteur).

Donc, le diffuseur public fixe un quota de diversité d’au minimum 20 %, quota qui s’applique autant aux productions fabriquées à l’interne qu’à celles fournies par des boîtes indépendantes (Zone3, Attraction, etc.).

La définition de diversité ratisse large : minorités visibles, personnes handicapées, autochtones et membres de la communauté LGBTQ2+. La parité hommes-femmes n’entre pas dans le débat, car l’objectif radio-canadien a été atteint et même largement dépassé.

Maintenant, de façon pratico-pratique, comment cette nouvelle mesure s’appliquera-t-elle ? Un gestionnaire affecté au registre de la diversité va passer des commandes et gérer le trafic ? Bon, on a déjà une femme handicapée au Téléjournal, est-ce qu’on peut déplacer notre rédacteur en chef gai à La facture ? Deux personnes noires sur District 31, ça ne fonctionnera pas. Il faudrait en transférer une vers Ruptures, merci. Avouez que c’est absurde.

Comprenez-moi bien. Personne n’est contre l’inclusion et l’ouverture, ça va de soi. Mais cette façon de classer des gens selon leur ethnicité ou leur orientation sexuelle m’apparaît rétrograde. À ce sujet, Pierre Elliott Trudeau n’a-t-il pas déclaré en 1967 que l’État n’avait rien à faire dans la chambre à coucher de ses citoyens ? Et qu’en est-il de la chambre à coucher de ses propres employés ?

Hélas !, tout ne se résume pas à des colonnes de chiffres à équilibrer dans un tableau Excel. C’est extrêmement réducteur, je trouve.

Les fidèles de 5e Rang, Une autre histoire et L’heure bleue ont remarqué, la saison dernière, que plusieurs personnages issus de la diversité ont été greffés tout naturellement aux histoires. Et aucun décret n’a forcé les producteurs à le faire.

Le discours ambiant bien-pensant voudrait que l’on applaudisse cette initiative de Radio-Canada. Je reste sur mes gardes. Il y a de ces dossiers complexes (comme la diversité à l’écran) qui ne se règlent pas uniquement avec une calculatrice.