Dans une école de Saint-Jean, une poignée de filles sont non seulement des fans finies de la série Hubert et Fanny, mais elles sont folles de Thomas Beaudoin, l'acteur qui incarne Hubert. Tellement folles amoureuses de lui que leur prof d'éducation physique affiche aux murs du gymnase où elles s'entraînent des photos du beau Thomas pour les encourager à ne pas abandonner. «Allez les filles, un autre push-up pour Thomas!», leur lance-t-il régulièrement.

Légende urbaine? Apparemment que non. Et ce n'est pas surprenant. Car depuis Roy Dupuis, révélé au grand public avec son rôle d'Ovila Pronovost en 1990 dans la série Les filles de Caleb, cela faisait un bail que la télé québécoise ne s'était pas payé une aussi belle gueule que celle de Thomas Beaudoin.

Non pas que les acteurs masculins québécois manquent de charme ou d'esthétisme, mais Beaudoin, 36 ans, qui a longtemps été mannequin aux États-Unis et qui a fait craquer les Américaines dans une pub d'Old Spice, est doté d'un charisme télégénique peu commun. Ses traits fins, ses yeux verts et les angles parfaits de son visage sont magnifiés par une caméra qui l'adore.

Il y a des acteurs et des actrices comme ça. Moins remarquables dans la vie de tous les jours, ils crèvent l'écran dès qu'une caméra s'allume et qu'un projecteur dépose sa lumière sur eux.

Établi à New York pendant 15 ans, où il a appris l'anglais et suivi des cours de jeu au Lee Strasberg Theatre & Film Institute, Beaudoin a commencé à obtenir des petits rôles au Québec dans Lance et compte en 2008, dans Destinées en 2010, puis dans Trauma, Blue Moon et Victor Lessard. Hubert, le mystérieux tatoueur dont s'éprend Fanny (Mylène St-Sauveur), est son premier premier rôle. Il en est reconnaissant, mais, paradoxalement, au moment où il a entrepris le tournage, au début du printemps 2017, il s'est installé à Los Angeles au lieu de quitter New York pour Montréal.

«Je reviens ici quand un rôle vient me chercher et m'aide à m'épanouir, mais, parallèlement à cela, j'avais envie de voir s'il y avait du travail pour moi à Los Angeles, où j'ai un agent et où je passe des auditions régulièrement», racontait-il la semaine dernière lors d'une tournée de promotion éclair à Montréal où il est arrivé avec un look totalement différent de celui d'Hubert: barbe longue de hipster, cheveux laqués par en arrière, petites lunettes rondes d'intellectuel et pas l'ombre d'un tatouage, ce à quoi il compte éventuellement remédier en se faisant tatouer un poème de son cru.

Je lui demande si ce nouveau look est en préparation pour un nouveau rôle. «Non, non, répond-il. Le look, c'est celui de Thomas.»

Né à Thetford Mines en 1981, ce fils de deux travailleurs du milieu de la santé a passé son enfance à Gagnonville et son adolescence à Drummondville, où il a découvert le cinéma comme projectionniste au cinéma Capitol.

«Dans ce temps-là, les films arrivaient en grosses bobines de 35 mm. Je pense bien que le goût du jeu m'est venu en projetant des films comme Star Wars, mais il y avait aussi Notting Hill avec Hugh Grant et Julia Roberts. En le voyant, je m'étais dit qu'un jour j'allais jouer avec Julia Roberts. Ce n'est pas encore arrivé, mais je n'ai pas perdu espoir», blague-t-il.

Pourtant, au moment de ses études universitaires, il a choisi la psychologie à Concordia. Il y est resté un an avant d'être recruté par l'agence de mannequins Folio. Il n'a jamais obtenu de diplôme universitaire, mais, en revanche, il a gagné un passeport pour voyager dans le monde entier: New York, Paris, Milan et Tokyo où, pendant un séjour de trois mois, il a appris l'anglais grâce à la série Friends.

Le sentiment d'être dans son élément

Beaudoin a fini par s'installer à New York et par y suivre des cours de jeu qui l'ont amené à faire du théâtre off Broadway pendant quelques années. Mais le cinéma a continué de le faire rêver. Dès 2010, il a commencé à obtenir des petits rôles dans des films de série B ou des téléfilms, y compris tout récemment, pour la chaîne de cartes de souhaits Hallmark.

Avec le rôle d'Hubert, il a le sentiment d'être dans son élément et à la hauteur des attentes. De toute évidence, il n'est pas au courant des critiques du milieu voulant qu'il soit plus beau qu'il est bon acteur.

«Je suis content du résultat. Je me suis beaucoup investi dans le rôle. Je me sentais relaxe en tournant et puis j'aime le fait que Hubert et Fanny soient dans une situation universelle qui traite d'engagement.»

Je lui demande s'il est conscient que son physique l'avantage dans la course folle aux rôles. Je connais la réponse. Lui aussi. «Bien sûr que oui, répond-il. Dès que j'entre dans une salle d'audition, j'ai deux prises d'avance, dans la mesure où j'ai pas l'air d'un plombier. Mais l'important, c'est que je sois reconnu pour mon jeu, pas pour mon look. Mon look, j'essaie de pas trop m'en soucier. Dans le fond, c'est une coquille. Si tu ne l'habites pas, ça ne donne pas grand-chose. Mais ce que je trouve le plus trippant en ce moment, c'est que les standards de beauté changent. On s'ouvre à la diversité des corps et des ethnies. Ça fait du bien.»

Venant d'un beau trentenaire blanc, c'est un peu ironique, mais Thomas Beaudoin n'en semble pas conscient. Les presque deux décennies qu'il a passées aux États Unis ont fait de lui un hybride, plus proche de la culture américaine que québécoise, bien qu'il se réclame très fort de ses racines. Il ignore encore si Hubert et Fanny aura une deuxième saison. Il le souhaite, évidemment. Mais que les filles à Saint-Jean ne se bercent pas trop d'illusions: ce n'est pas demain la veille que leur idole va revenir vivre près de chez elles.

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Hubert et Fanny était de retour sur les ondes d'ICI Radio-Canada Télé mardi soir à 21 h, après la pause olympique.

Photo Yan Turcotte, fournie par ICI Radio-Canada Télé

Thomas Beaudoin dans Hubert et Fanny