Caroline Dhavernas tient le rôle principal de la série canadienne Mary Kills People, dont la version québécoise, Dre Mary: mort sur ordonnance, est diffusée tous les jeudis sur Séries+, dès ce soir. Rencontre avec une comédienne féministe qui applaudit les retombées du mouvement #metoo dans la société.

La deuxième saison de Mary Kills People est présentée sur Global et le sera un peu plus tard aux États-Unis. Vous y incarnez un médecin dont le deuxième emploi - illégal - est d'aider les gens à mourir dignement. Malgré tout, cette série est loin d'être pesante. Votre personnage y est même drôle.

Effectivement. J'aime beaucoup le ton unique de la série, qui passe du drame à l'humour noir; il y a aussi du suspense et des moments assez sexy. C'est vraiment une série divertissante, alors qu'on aurait pu faire une fiction très déprimante sur l'aide à mourir. L'auteure, Tara Armstrong, trouvait que nous ne parlions pas assez de la mort [à la télé]. Et ce n'est pas parce que nous parlons de la mort que nous arrêtons de vivre. Bien au contraire! Cette série me fait l'effet d'une journée où tu vas à des funérailles et où, ensuite, tu as juste envie de te sentir vivre, d'aller prendre un verre avec des amis et d'être ancré dans la vie. C'est un pied de nez à la mort.

Vous jouez une femme forte, qui a bien des facettes. Aimez-vous jouer ce personnage?

Oui. C'est un rôle en or pour une comédienne, parce qu'elle est très nuancée. Mary est urgentologue et elle a sa business à côté où elle aide les gens à mourir dignement; elle est récemment divorcée et mère de famille. Ça me permet de jouer sur plusieurs tableaux. Et elle est un peu dépassée par les événements, car, pour se procurer la drogue dont elle a besoin pour aider les gens - puisque ce qu'elle fait est illégal -, elle doit frayer avec des gens qui ne sont pas très catholiques.

Pensez-vous qu'il s'agit d'un de vos plus grands rôles en carrière?

Bien sûr. Après Wonderfalls [série diffusée en 2004 sur FOX], j'ai eu envie de faire très attention à ce que je faisais en télé américaine. Je voyais bien que lorsque tu signes pour des années de ta vie et que tu ne sais pas combien d'épisodes tu devras faire... eh bien, si la série décolle et que tu fais 20 épisodes par année, tu n'as plus de vie. Et j'étais exténuée à la fin de Wonderfalls, alors j'ai eu envie de faire des rôles où nous étions plusieurs comédiens à partager le temps de tournage. Lorsque Mary Kills People est arrivée, je trouvais que c'était l'idéal, puisque c'est seulement six épisodes, donc deux mois de tournage. Et six épisodes, c'est parfait pour raconter une histoire de manière condensée, sans étirer la sauce.

Diriez-vous que Mary est féministe?

Oui, je crois. Il faut dire que c'est une série écrite, produite, réalisée et montée par des femmes. Je me souviens d'ailleurs, lors du tournage de la saison 1, que nous tournions une scène entre ma soeur et moi où nous parlions de mon travail. Après la scène, les deux productrices nous ont dit que ça faisait vraiment du bien de voir deux femmes se parler d'autre chose que des hommes. Et ça, ça fait partie de ce que nous entendons beaucoup dans les médias: pouvons-nous voir des femmes à la télé et au cinéma parler d'un autre sujet que les hommes?

Êtes-vous féministe?

Absolument, et depuis toujours. Quand j'avais 17 ans environ, je regardais des comédiennes à la télévision québécoise qui se faisaient poser la question et s'en défendaient; j'avais trouvé ça tellement dommage. Il y a tellement de travail à faire dans le monde pour les femmes! Il y a des pays où c'est loin d'être gagné. Comment peut-on être si insensible à notre propre cause? Chaque fois qu'il y a une libération, ça arrive que nous allions dans un extrême, comme ces femmes très frustrées et fâchées qui se sont exprimées à une époque et que nous avons associées au féminisme. J'ai l'impression que nous avons juste retenu ça du féminisme, pendant un bout de temps. Heureusement, là, on est en train de se souvenir de ce que c'est vraiment, être féministe. C'est tellement beau, ce qui se passe, et je pense que les nouvelles générations comprennent mieux ce que ça veut dire.

Comment réagissez-vous à un mouvement comme #metoo?

Il était temps. Il était temps que les mentalités changent. Je suis contente qu'on puisse tous mieux comprendre ce que c'est, de l'abus. Concrètement, je veux dire. Quand des femmes et des hommes vivront de l'abus, nous pourrons être plus alertes. On va se dire: je ne suis pas fou, je ne suis pas folle, je sais que ce que je vois, c'est de l'abus. Et maintenant, puisque nous en parlons beaucoup, plus personne ne peut nier que ça existe et que ça a lieu. Je pense que c'est ça qui est le plus important dans ce qui arrive.

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La première saison de Dre Mary: mort sur ordonnance est diffusée tous les jeudis à 22 h sur Séries+; la deuxième saison de Mary Kills People est diffusée sur Global.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRECHETTE-LA PRESSE MONTREAL, QUEBEC---SUJET : NOUVEAU VISAGE-PUBLICATION RESERVEE A L'EDITION SPECIALE DES NOUVEAU VISAGE 2018. Portrait de l'actrice Caroline Dhavernas.---ARTS # P-ART-2017-12-14-843