En cet âge d'or des téléséries, La Presse décortique chaque semaine une série qui vaut le coup d'oeil.

L'histoire

Dev (Aziz Ansari) est un fils d'immigrants indiens qui sont venus s'installer aux États-Unis dans les années 80, alors qu'il était encore enfant. Comédien qui joue surtout dans des publicités, le jeune trentenaire passe des auditions, sort, va (beaucoup) au resto et discute de toutes sortes de choses avec ses amis. Bref, il vit le quotidien plutôt ordinaire d'un vrai New-Yorkais. Dans cette comédie de situation qui s'amuse à débusquer le racisme, mais aussi le sexisme, et à déconstruire les clichés comme celui de l'Indien chauffeur de taxi à l'accent à couper au couteau, on suit donc Dev - qui parle, bien sûr, sans accent, contrairement à ses parents -, son ami Arnold, un géant aussi grand que Dev est petit, sa copine d'enfance Denise, noire et lesbienne, et son ami Brian, d'origine asiatique, immigrant de deuxième génération comme Dev.

Les thèmes

Chaque épisode des deux saisons de Master of None tourne autour d'un thème. Il y a les sujets plus sociaux, comme l'héritage des parents, les «ratios» d'Indiens dans les séries télé ou la pratique de la religion, d'autres plus intimes, comme le désir d'enfants, les aînés ou la vie à deux. Un drôle de souper au resto organisé par Dev et Brian avec leurs parents pour en apprendre un peu plus sur leur passé, une adorable grand-mère qui s'évade de son centre d'accueil pendant une soirée, un rendez-vous galant qui tourne au cauchemar: les situations sont classiques, mais toujours avec ce regard de biais qui traque les préjugés et les différences culturelles, ainsi que les ressemblances. Originalité et ironie, mais aussi affection, amour et amitié indéfectible, Master of None fait flèche de tout bois, est très drôle, mais fait aussi réfléchir.

Le créateur

Master of None est une oeuvre du réalisateur et scénariste Alan Yang et du comédien et humoriste Aziz Ansari, qui se sont fait connaître avec la sitcom Parks and Recreation. Aziz Ansari, acteur d'origine indienne né en Caroline du Sud, s'est créé un rôle sur mesure avec Dev. Avec son humour, son débit ultrarapide et son sens du punch, il incarne un Dev parfois naïf, parfois égoïste, sincère et romantique - ce qui explique probablement son succès auprès de la gent féminine -, amateur de bouffe et star en devenir. Fait à noter : ce sont les propres parents d'Aziz Ansari, Shoukath et Fatima Ansari, qui incarnent ceux de Dev. Un choix qui donne à l'ensemble un soupçon de vérité additionnel, particulièrement lorsqu'il s'agit de réflexion identitaire ou de fossé générationnel.

La deuxième saison

La première saison de Master of None, très rythmée, passait d'un thème à l'autre avec rapidité, introduisant des personnages secondaires qui disparaissaient aussitôt. Les seuls fils conducteurs étaient le boulot de Dev et son histoire d'amour naissante avec la charmante Rachel. La saison se terminait tout de même sur une quasi-séparation, alors que le père de Dev lui faisait lire rien de moins que du Sylvia Plath. Dans le premier épisode de la deuxième saison, offert sur Netflix depuis mai, Dev est à Modène, en Italie, et apprend auprès d'une nonna à faire des pâtes. De retour à New York, il se trouve un boulot d'animateur et continue de chercher l'amour. Même si la réalisation est plus léchée et qu'on sent une volonté de profondeur, les choses commencent à se gâter vers la moitié de la saison, lorsque le deuxième degré qu'on appréciait laisse trop de place à la comédie sentimentale fleur bleue lors des séjours à New York de Francesca (Alessandra Mastronardi). Il y a encore des épisodes vraiment solides, particulièrement celui de l'Action de grâce, qui se déroule chaque année dans la très attachante famille de Denise (Lena Waithe). Par contre, les épisodes qui s'attardent aux jeux de séduction entre Francesca et Dev sont franchement moins intéressants.

La suite?

Même si la fin est ouverte, il est loin d'être certain qu'il y aura une troisième saison. Aziz Ansari ne ferme pas la porte complètement, mais il a répété plusieurs fois qu'il préférait laisser du temps passer. Comme Master of None s'inspire beaucoup de sa vie, le comédien a affirmé au Vanity Fair que des choses devraient changer dans son existence pour qu'il puisse explorer de nouvelles avenues. Malgré quelques déceptions pendant la deuxième saison, il y a surtout du bon dans le filon de Master of None. Espérons que la source n'est pas tarie!

Photo Netflix

Dev et Francesca finiront-ils par s'avouer leur amour?