Le fondateur de Fox News, Roger Ailes, est mort, moins d'un an après que des accusations de harcèlement sexuel l'ont contraint à quitter la chaîne qui a révolutionné l'information et le paysage audiovisuel américain.

C'est la chaîne elle-même qui a annoncé jeudi le décès de son ancien patron emblématique, les présentateurs de l'émission matinale Fox and Friends ne cachant pas leur émotion en évoquant leur ancien dirigeant, parti en juillet 2016. Il était âgé de 77 ans.

Hémophile, l'homme de télévision est décédé des suites d'une chute sur la tête qui avait entraîné la formation d'un hématome, a indiqué l'institut médico-légal du comté de Palm Beach, en Floride, où il résidait.

Vétéran des médias, homme d'influence, le républicain avait créé la chaîne Fox News en 1996 à la demande du patron du réseau Fox et du groupe de médias News Corp, Rupert Murdoch.

Bien qu'arrivée dans le paysage télévisuel bien après CNN, lancée en 1980, la chaîne d'information en continu, prisée des conservateurs, avait rapidement pris la tête des audiences.

Pour faire sa place, Fox News a adopté une ligne éditoriale très conservatrice, volontiers polémique, incarnée par quelques personnalités marquantes, en premier lieu Bill O'Reilly, plus éditorialiste que journaliste.

Lui-même confronté à des accusations de harcèlement sexuel émanant de plusieurs femmes ayant travaillé au sein de la chaîne, Bill O'Reilly a dû quitter fin avril Fox News, qui a ainsi renoncé à sa locomotive, roi de l'audience, toutes chaînes d'information confondues.

Portée par son succès, Fox News est aussi devenue une source de revenus considérables pour le groupe 21st Century Fox, né de la scission en 2013 des activités télévisions et médias, ces dernières étant logées sous l'enseigne News Corp. 

Expert des médias, de la politique 

«Aujourd'hui, l'Amérique a perdu l'un de ses grands guerriers patriotes», a tweeté Sean Hannity, l'un des journalistes les plus influents de Fox News. «Il a radicalement et définitivement changé, à lui seul, le paysage politique et médiatique, pour le meilleur».

«Ce serait bien que les médias laissent Roger et sa famille tranquille en cette période de deuil», a-t-il exhorté, «mais connaissant des gens qui le haïssaient, lui et ses opinions, (...) j'en doute».

De fait, si les éloges se sont multipliés, les commentaires acerbes ont aussi fleuri. «Le fondateur de Fox News a fait (des États-Unis) le pays débile, rempli de haine, qu'il est aujourd'hui (...) Il est le Christophe Colomb de la haine.», a notamment écrit Matt Taibbi, sur le site du magazine Rolling Stone.

D'autres ont également rappelé les nombreuses accusations de harcèlement dont il faisait l'objet.

Outre les médias, qu'il fréquentait depuis le début des années 1960, Ailes était aussi un vieux routier de la politique, mais en coulisses.

Il a ainsi conseillé Richard Nixon lors de sa campagne victorieuse de 1968 mais aussi Ronald Reagan, qu'il a contribué à faire réélire en 1984, ainsi que George Bush père, dont il a orchestré la communication agressive avec, à la clef, un succès électoral en 1988.

«Je ne suis pas certain que j'aurais été président sans son grand talent», a tweeté George Bush père, saluant un «ami».

Plus récemment, Roger Ailes a conseillé Donald Trump durant une bonne partie de sa campagne. Il l'a notamment aidé à se préparer pour les débats télévisés, un exercice nouveau pour l'homme d'affaires. Les deux hommes avaient néanmoins pris leurs distances quelques semaines avant le scrutin de novembre 2016.

Depuis les départs de Roger Ailes et de Bill O'Reilly, mais aussi celui de la journaliste vedette Megyn Kelly, passée chez NBC, la chaîne traverse une période de turbulences même si ses audiences demeurent élevées.

C'est Megyn Kelly qui a fait basculer le sort de Roger Ailes chez Fox News, fin juillet 2016. Elle aurait affirmé avoir reçu des avances du PDG dix ans plus tôt, lors d'un entretien avec les responsables de l'enquête interne diligentée par la chaîne pour faire la lumière sur les accusations le visant.

Ces allégations venaient à l'appui de celles lancées début juillet 2016 par une ancienne présentatrice vedette, Gretchen Carlson, affirmant avoir été licenciée après son refus de céder aux avances sexuelles de son patron.