Sébastien Benoit coanime avec Bianca Gervais la compétition culinaire Le combat des villes les lundis soir à ICI Radio-Canada Télé. Animateur radio de métier, il a aussi animé des jeux-questionnaires, des téléréalités, des émissions de sport ou encore de voyage...

Marc Cassivi: Je voulais te parler de ton parcours. Tu as touché à bien des domaines: la culture, les sports, le voyage, la cuisine. Certains diraient que tu es polyvalent et d'autres, que tu es éparpillé...

Sébastien Benoit: [Rires] Tu as raison de dire ça. Moi, à la base, je suis un animateur. C'est ce que je fais dans la vie, à la radio et à la télé. Je pense qu'un animateur peut se promener d'un sujet à un autre. Il n'a pas la prétention de tout savoir, mais son rôle est de mettre les autres en lumière. Si tu t'entoures bien, de gens qui connaissent ça, tu peux animer du sport comme de la cuisine. Je suis un pigiste. Et je suis un animateur avec plein de centres d'intérêt. Je revendique ça pour tout le monde. Je trouve ça plate d'être catalogué.

Marc Cassivi: Ça t'a nui d'être touche-à-tout? On te l'a reproché?

Sébastien Benoit: Pas pour mon animation du Combat des villes. Mais je me suis fait matraquer pendant mon année à TVA Sports. Pas autant que Patrice Brisebois, mais quand même...

Marc Cassivi: Tu étais perçu comme un corps étranger?

Sébastien Benoit: Oui. Surtout par l'amateur de sport pur et dur, qui ne comprenait pas comment le gars qui a fait Flash et qui a animé Pyramide puisse parler du «power play» du Canadien. Même si c'était pour relancer des analystes.

Marc Cassivi: On t'a remercié après un an. Tu as en quelque sorte subi le même sort que George Stroumboulopoulos, qui animait Hockey Night in Canada. On l'avait recruté pour rajeunir l'auditoire, décloisonner une chasse gardée...

Sébastien Benoit: En coulisses, on a dit qu'on n'aimait pas trop son style vestimentaire!

Marc Cassivi: Que ses habits étaient trop serrés.

Sébastien Benoit: On parle d'un gars qui travaillait avec Don Cherry! C'est à rien n'y comprendre. J'aimais ça justement parce c'était plus dynamique avec lui, moins barré, plus décontracté. Ça décoinçait un peu le milieu.

Marc Cassivi: Le monde du sport est-il trop coincé ou frileux pour accepter ce mélange des genres?

Sébastien Benoit: Je tiens à le dire parce que c'est très important: j'ai adoré mon expérience à TVA Sports de A à Z. Je me suis vraiment senti accepté. Mais c'est vrai que je recevais beaucoup de commentaires du genre: «Qu'est-ce que tu fais là? Qu'est-ce que tu connais là-dedans?»

Marc Cassivi: Ça s'est terminé à cause des faibles cotes d'écoute?

Sébastien Benoit: C'était une case un peu difficile, 17 h à 18 h. J'étais là en semaine. Je ne cherche pas d'excuses, mais les matchs du Canadien en semaine étaient à RDS. Le réflexe normal était de regarder l'émission d'avant-match à RDS aussi. Je vais être honnête: je pensais être là pour plusieurs années. C'est l'impression qu'on m'avait donnée. Je pensais avoir le temps de placer les choses après une première année d'adaptation. Quand le contrat n'a pas été renouvelé, je suis parti la tête entre les jambes. Mais je fais attention à ce que je dis parce qu'ils ont été très corrects avec moi à TVA Sports et ils m'ont demandé d'animer la Coupe Rogers cet été.

Marc Cassivi: Les médias électroniques sont souvent cruels. On veut des résultats immédiats. Ils sont rares, ceux qui laissent la chance au coureur...

Sébastien Benoit: C'est clair.

Marc Cassivi: Tu navigues mieux là-dedans avec toutes tes années d'expérience?

Sébastien Benoit: Tu sais quoi? À la radio aussi, tu sais que t'es sur un siège éjectable, mais ça fait quand même depuis 1999 que j'ai une job à temps plein à la radio dans le marché de Montréal, dans une émission de pointe. J'ai un employeur extraordinaire chez Cogeco. Je suis à Rythme-FM depuis 12 ans. J'essaie de ne pas trop y penser, mais je navigue bien là-dedans. Il y a peut-être une part de naïveté ou d'insouciance. Tu sais, Marc, quand on a fait notre droit ensemble, je me suis vite rendu compte que je n'étais pas le plus intéressé de la gang. Je tripais plus à préparer mes émissions à CISM, la radio de l'Université de Montréal, qu'à lire ma jurisprudence.

Marc Cassivi: C'était pareil pour moi avec le journal étudiant. À l'époque, tout le monde à la faculté savait que tu allais finir par faire de la télé et de la radio. C'était écrit dans le ciel.

Sébastien Benoit: C'est drôle que tu dises ça, parce que je n'étais pas sûr du tout. Quand on m'a proposé de faire Flash en 1995, je n'avais pas de plan de carrière. J'avais tellement peu confiance que j'ai continué à payer ma cotisation au Barreau jusqu'en 2013! Peut-être que ceux qui me considèrent comme éparpillé - c'est le mot que tu as employé - diraient que je n'ai pas l'air de savoir où je vais. C'est peut-être vrai, mais je sais que je peux animer. Et je pense - je croise les doigts - qu'il y aura toujours une radio pour me donner de la job. Je suis moins sûr en télé...

Marc Cassivi: Parce qu'on n'est pas longtemps la saveur du mois en télé? As-tu senti que tu l'étais à un certain moment?

Sébastien Benoit: Je sentais au début des années 2000, quand j'ai été rapatrié à Radio-Canada, que j'avais les faveurs du diffuseur. On m'a envoyé à Sydney pour les Jeux olympiques, j'animais une émission d'été... Peut-être que j'étais trop jeune. Avec le recul, c'était peut-être trop tôt.

Marc Cassivi: Certains disent aussi de toi que tu es trop gentil, trop beige, le gendre idéal des matantes. Es-tu conscient de ça, et est-ce que ça te dérange?

Sébastien Benoit: Non, ça ne me dérange pas. On a tous des sautes d'humeur et des moments moins drôles, mais je suis assez constant dans ma bonne humeur. Les gens me disent souvent que je suis pareil dans la vie qu'à la TV. Pour moi, c'est le plus beau des compliments. Mais c'est vrai qu'au début de ma carrière... Je ne veux pas dire que j'ai dit des choses que je ne croyais pas pour me faire aimer, mais je me suis retenu de dire des choses que je pensais pour ne pas me faire d'ennemis.

Marc Cassivi: Contrairement à moi...

Sébastien Benoit: [Rires] On a chacun notre casting! Il faut regarder le véhicule dans lequel on est. Je suis depuis 12 ans à Rythme-FM. On parle surtout à la femme qui a entre 25 et 54 ans. On est positifs. Moi, ça me convient. J'ai animé beaucoup de quiz. J'ai animé La fureur. À Flash, Herby [Moreau], Marie-Louise [Arsenault] et moi, on faisait surtout la promotion des artistes. J'en ai des opinions. Peut-être que parfois, je pourrais me mouiller davantage. Mais je préfère mettre les autres en lumière.

Marc Cassivi: Je vais te dire ce que je trouve paradoxal. Tu préfères ce rôle d'animateur neutre, mais, d'un autre côté, tu fais aussi partie du star-système québécois parce que tu le veux bien, non?

Sébastien Benoit: Ouais. J'ai un drôle de rapport à ça. Je suis allé à En mode Salvail cet hiver et je me souviens de m'être dit que je ne comprenais pas pourquoi les gens s'intéresseraient à ce que j'avais à raconter. Ce n'est pas de la fausse modestie. J'aime mieux être l'intervieweur que l'interviewé. Mais d'un autre côté, je joue quand même la «game» sur les réseaux sociaux en mettant des photos de mon nouveau chien, de mon enfant ou de ma blonde.

Marc Cassivi: Sens-tu qu'il faut que tu aies ce genre de rapport avec le public pour garantir ta durée dans le métier?

Sébastien Benoit: Je sais que c'est comme ça maintenant. Qu'il faut en donner un peu plus aux gens. Mais je n'entretiens pas les réseaux sociaux pour faire de la pêche aux «likes». Je n'ai pas besoin de me faire flatter. Mais je sais...

Marc Cassivi: ... que c'est important pour certains diffuseurs?

Sébastien Benoit: Qui s'intéressent maintenant aux réseaux sociaux, oui. Et qui choisissent parfois des animateurs en fonction de leur nombre d'abonnés. Je m'en sers comme outil. Et j'ai beaucoup de plaisir à le faire. Ça marche comme ça maintenant. Être un influenceur, ça passe par là. Mais je me demande encore souvent si ça va intéresser les gens.