C'était dans l'autre siècle. En claquant la porte de l'émission Garden Party, Michèle Richard se proclame la «reine de Quatre Saisons». Éric Salvail est-il maintenant le roi de V?

Le souriant animateur rigole lorsqu'on lui pose la question avant de gentiment refuser de s'autoproclamer roi. «Beaucoup l'ont écrit. Je l'ai lu souvent», concède l'homme qui a connu une année extraordinaire.

À la deuxième saison à la barre d'En mode Salvail, il faut ajouter la nouvelle émission Ce soir tout est permis, l'élaboration des Recettes pompettes et l'animation de KARV l'anti-gala. Au passage, il remporte le trophée Artis du meilleur animateur de magazines culturels ou de talk-shows.

«Chaque année, je pense avoir travaillé le maximum que j'ai pu et, l'année suivante, cette impression se répète. Je ne suis pas capable de dire non aux projets tripants qui me sont soumis, dit-il. Et je suis heureux d'être un animateur. C'est dans ce métier que je me sens bien.»

On ne se surprendra pas d'apprendre qu'il a plusieurs projets sur le feu pour 2015. Sous peu, il devrait annoncer le lancement de nouvelles émissions, pour V et d'autres diffuseurs, à la barre desquelles il ne sera pas, mais qu'il produira par l'entremise de sa société, Salvail & Co. «Ça bouillonne de partout», dit l'animateur qui fait maintenant travailler une trentaine de personnes.

Ce tourbillon n'est pas étranger au fait que Salvail est devenu un élément important de la chaîne de la famille Rémillard. Qu'est-ce qui fait en sorte que ce réseau et Éric Salvail s'entendent si bien? Quels sont les ingrédients communs à la source de cette dynamique?

«Les gens de V se virent de bord rapidement. Ils osent, répond-il. Ils sont jeunes, prêts à essayer de nouvelles choses, à prendre des risques. Ils forment une petite équipe nous permettant de travailler ensemble. Je n'ai pas l'impression que ce sont mes patrons, mais plutôt des partenaires d'affaires. Ça fait une grosse différence. Et c'est comme ça avec la gang de ma boîte de production. Je n'ai pas l'impression d'être leur boss. Ici, on prend les idées de tout le monde et on travaille en collégialité avec l'objectif d'être créatifs. Ils sont comme ça à V aussi.»

À quelques jours des vacances de Noël, l'animateur de 45 ans reconnaît qu'il a bien des difficultés à s'arrêter. Cette année, il a été si longtemps et si souvent loin de la maison qu'il en a fait mourir un bambou, une plante plutôt robuste.

Nous avons demandé à Éric Salvail de nommer des personnes qui ont influencé son travail.

LE FESTIVAL DE L'HUMOUR

«Ce n'est pas une, mais quatre personnes [Tex Lecor, Louis-Paul Allard, Roger Joubert, Pierre Labelle] qui faisaient Le festival de l'humour diffusé à CKAC. Ce fut une de mes plus grandes influences, dit-il en chantant la pièce d'ouverture. C'est pour cela que je me suis inscrit en communication, volet radio, à l'université. Les gens ne savent pas que j'ai un baccalauréat en radio, mais c'est un médium que j'ai toujours apprécié. Tous les samedis matin, j'enregistrais l'émission sur ma cassette quatre pistes et, tous les soirs de la semaine, en me couchant, je faisais jouer cette cassette. Je réécoutais les mêmes jokes, je m'endormais là-dessus. J'étais sûr d'être capable de remplacer un des animateurs tellement je les connaissais.»

SUZANNE LÉVESQUE

«À l'université, je suivais tous mes cours l'après-midi uniquement pour écouter Suzanne Lévesque. Exceptionnellement, je suivais des cours l'avant-midi, si c'était impossible de faire autrement. J'ai suivi toute l'éducation de son fils Youri et ses chicanes avec Pierre Pascau parce que l'un d'eux fumait et l'autre pas. Des fois, ils ne se parlaient plus durant trois semaines. Lorsque je l'ai rencontrée la première fois, je tremblais. Elle avait une façon unique de faire de la radio. Elle et sa recherchiste en chef, Marie-Hélène Roy [aujourd'hui disparue], m'ont ouvert le monde culturel. Cette femme m'a donné le goût de communiquer.»

PIERRE BOURGAULT

«L'année où il m'a enseigné à l'université, il y a eu une grève durant une couple de semaines. Ça me mettait tellement dans tous mes états que j'allais le voir pareil et on jasait. Il était extraordinaire. On buvait ses paroles. Il enseignait la communication orale et lorsque j'arrivais en avant pour des exposés, je faisais le clown et, lui, continuait à parler. On s'envoyait promener! Mais à l'université, c'est lui et Jean-Pierre Desaulniers qui m'ont le plus influencé. Un jour, vers la fin de sa vie, je l'ai croisé par hasard dans le carré Royal au centre-ville de Sorel. Je commençais à être connu et il m'a dit toute sa fierté de me voir réussir.»

RÉAL GIGUÈRE

«J'ai grandi avec le canal 10 et j'aimais tous les animateurs. Mais Réal Giguère a une place spéciale. En le regardant, je me disais: «C'est ça que je veux être, animateur». Nous avons en commun l'autodérision. Réal Giguère en avait beaucoup. Il se costumait, faisait des niaiseries et des blagues sur lui. La preuve qu'il avait de l'autodérision, il a demandé à chanter Gros jambon lorsque je l'ai convaincu de venir à Fidèle au poste. Il y tenait parce que cette chanson a été un énorme succès avec plus de 300 000 exemplaires écoulés.»

JIMMY FALLON

«Jimmy Fallon est très inspirant pour le show que je fais présentement. Dans le domaine du talk-show, il a dépoussiéré les émissions américaines. Il a rajeuni la forme, l'a mise à l'air du temps, notamment avec ses clips viraux et sa présence sur les réseaux sociaux. C'est ça, la télé d'aujourd'hui et c'est ce que j'essaie d'appliquer dans mon émission. Je demande à mon équipe d'avoir un clip viral par show. Fallon a aussi une grande capacité à embarquer les artistes dans sa folie. J'ai la prétention de dire que c'est aussi le cas des artistes québécois avec En mode Salvail et les autres émissions.»