Après le service des sports, c'est à celui des nouvelles d'écoper: la division de l'information de Radio-Canada sera amputée de 35 postes dès cette année et de 12 autres l'an prochain en raison des compressions de 5,7 millions $ que doit encaisser ce secteur de la société d'État.

L'année 2014-2015 marquera la disparition de 14 postes de journalistes, trois à la direction, neuf à la réalisation et deux en région à RDI. Trois assistants à la réalisation, trois auxiliaires à l'affectation et un adjoint de bureau seront également retranchés, a précisé dans une note interne le directeur général de l'information, Michel Cormier.

Des postes vacants sont abolis, des employés quittant pour la retraite ne seront pas remplacés et certains postes sont déclarés excédentaires pour en arriver à cette réduction de personnel.

«Avec les compressions qu'on vit année après année, les effets sont de plus en plus marqués. Là, avec cette nouvelle ronde (de compressions), ça a des effets très concrets sur l'information, sur toutes sortes d'émissions et en région également», a commenté mercredi Alex Levasseur, président du Syndicat des communications de Radio-Canada.

Le leader syndical n'est pas le seul à s'inquiéter: des grands noms de l'information de la société d'État - dont Céline Galipeau, Patrice Roy, Pascale Nadeau et Alain Gravel - ont également ressenti l'urgence de s'adresser à la haute direction en leur propre nom par l'entremise d'une lettre ouverte, ce qui leur a valu une rencontre au sommet avec la direction.

«Compressions après compressions, Radio-Canada meurt à petit feu. Le constat est sans appel: depuis six ans, près de 20% du budget de l'information française a été amputé», ont-ils écrit dans cette missive.

«Au fil des ans, nous avons perfectionné et réinventé nos façons de faire pour devenir plus efficaces. Mais nous atteignons un point de rupture. Ces compressions ne se feront pas sans toucher à nos programmes et nos rendez-vous d'informations. C'est une atteinte directe à ce qui nous rend uniques et nous distingue de la concurrence», ont déploré les 17 signataires.

Dans la foulée de la parution de leur lettre, ces journalistes et animateurs vedettes ont été convoqués à une rencontre au sommet avec le président et chef de la direction de CBC/Radio-Canada, Hubert Lacroix, ainsi que le vice-président, Louis Lalande, ont confirmé des représentants patronaux et syndicaux à La Presse Canadienne.

Le directeur des relations publiques de Radio-Canada, Marc Pichette, a expliqué que les journalistes n'avaient pas été «convoqués», mais que les deux dirigeants étaient plutôt «allés à la rencontre de certains signataires de la lettre».

«Il s'agissait d'un simple moment d'échange», a-t-il écrit dans un courriel envoyé à La Presse Canadienne.

Selon des sources, les deux parties ont convenu de ne pas dévoiler le contenu des échanges.

La disparition de ces postes aura un effet domino et se répercutera évidemment sur les employés ayant moins d'ancienneté. Il faudra en outre attendre «plusieurs mois» avant de déterminer qui se retrouvera sans emploi, a reconnu M. Cormier dans sa note aux employés.

L'ancien journaliste y a lancé un appel à ces jeunes qui se sentent «particulièrement vulnérables», les exhortant à demeurer «patients» et à garder confiance en l'avenir.

Ces jeunes employés ont récemment adressé une missive à la direction afin de faire part de leurs inquiétudes.

«Nous avons constaté une diminution drastique des journées de travail à la radio au cours des derniers mois, y compris pendant la période électorale, alors qu'il s'agit généralement d'une période faste pour nous. Avec les récentes annonces, nous sommes encore plus inquiets de ce qui nous attend», peut-on lire dans leur lettre.

Les coupes ont des répercussions sur le climat de travail dans la grande tour. Les tensions sont palpables entre employés permanents et temporaires, mais aussi entre jeunes et vétérans, selon plusieurs sources.

«Ce n'est pas un climat dans lequel il est agréable de travailler. Je n'ai pas besoin de vous faire une longue explication là-dessus», a laissé tomber M. Levasseur en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

«Les plus jeunes, ceux qui sont temporaires, se disent: "Je vais avoir moins d'heures pour travailler, et pour l'avenir, je vais peut-être devoir repenser à ma carrière" et il y en a d'autres plus proches de la retraite qui doivent commencer à se dire: "Je vais peut-être devancer ça, cette retraite-là". Tout ça fait en sorte que ce n'est pas un climat qui est sain pour une entreprise comme la nôtre», a-t-il ajouté.

CBC/Radio-Canada doit composer avec des compressions budgétaires de l'ordre de 130 millions $, ce qui se traduira par l'abolition de l'équivalent de 657 emplois d'ici l'an prochain à l'échelle du pays.