Après le succès des romans policiers scandinaves, les séries télévisées du Nord de l'Europe, comme les danoises The Killing et Borgen ou maintenant la suédoise Real Humans, ont le vent en poupe.

Real Humans, diffusée à partir de jeudi sur la chaîne franco-allemande Arte, se passe dans une société contemporaine dans laquelle des robots humanoïdes, les «Hubots», remplacent les hommes dans des tâches ménagères. Ils déclenchent des émotions contrastées chez les humains: certains se prennent d'affection pour eux, tandis que d'autres ne pensent qu'à les éliminer.

Pour Lars Lundström, son créateur, cette série interroge le rapport que nous entretenons avec les machines, et est également une métaphore de la société occidentale. «L'intrigue possède plusieurs niveaux. Elle traite aussi de nos grandes problématiques actuelles», évoquant notamment le «sort réservé parfois aux immigrés, traités comme des sous-hommes», dit-il dans le dossier de presse.

Déjà vendue dans de nombreux pays, cette nouvelle création nordique s'inscrit dans la lignée de plusieurs succès de séries «venues du froid», avec en tête les danoises The Killing et Borgen, dans le sillage aussi de l'engouement pour les polars scandinaves comme Millénium.

La série policière The Killing, dont la première saison a été diffusée en 2007 au Danemark et en 2010 en France sur Arte, a déjà fait l'objet d'un remake américain, tandis que Borgen, qui raconte l'exercice du pouvoir par une Première ministre du Danemark, a été vendue dans plus de 60 pays.

La série policière suédo-danoise The Bridge (Broen en danois, Bron en suédois) va quant à elle faire l'objet d'un remake coproduit par les chaînes française Canal+ et britannique Sky Atlantic.

«À hauteur d'homme»

«On constate ce pôle de créativité nordique, qui se confirme d'année en année», analyse Frédéric Lavigne, directeur artistique du festival Séries Mania, qui aura lieu du 22 au 28 avril au Forum des Images à Paris. Cette année, Séries Mania présentera deux séries suédoises psychologiques: Don't ever Wipe Tears Without Gloves, qui met en scène la communauté gaie de Stockholm dans les années de l'apparition du Sida, et «30 degrés en février», qui raconte le parcours de trois personnages brisés qui tentent de refaire leur vie en Thaïlande.

«Borgen a été un élargissement du domaine sur la série politique. Et maintenant on voit avec Real Humans la science fiction. Donc on constate aussi que leur palette s'élargit. Il y a vraiment un mouvement positif qui s'est lancé», poursuit le directeur de Séries Mania, qui avait montré l'an dernier The Bridge et Lilyhammer, série américano-norvégienne plus humoristique et parodique.

Pour lui, la grande qualité de ces séries, aujourd'hui devenues des références en Grande-Bretagne ou aux États-Unis, «c'est notamment de s'attaquer, un peu comme les Anglais, à des sujets qu'on n'ose pas forcément attaquer nous en France, des sujets un peu durs».

«D'autre part, ils le font toujours avec humanité, à hauteur d'homme», ajoute-t-il, soulignant que «les personnages ne sont pas des surhommes, les acteurs ne sont pas des superstars». Autre ingrédient, et non des moindres: «une qualité d'écriture incroyable».

Pour Marjolaine Boutet, spécialiste des séries, «ce qui fait la spécificité des séries scandinaves», c'est également «souvent une écriture très travaillée sur le modèle danois, qui s'est inspiré lui-même du modèle britannique».

De plus, «ces séries se passent finalement dans des sociétés qui nous ressemblent beaucoup plus que la société américaine». «Ce sont des préoccupations plus proches de nous», souligne-t-elle.