Levée de boucliers contre Call-TV. Diffusée depuis le début de l'été sur les ondes de TQS, cette télé-tirelire suscite une telle grogne que le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR) a reçu 185 plaintes, déposées par des téléspectateurs frustrés.

L'organisme, qui a étudié les doléances des participants, rendra aujourd'hui son verdict. Le CCNR répondra en effet à la question suivante: avec ce quiz nouveau genre, TQS contrevient-elle au code de déontologie de l'Association canadienne des radiodiffuseurs? Si oui, la station pourrait écoper de sanctions, dont on ignore pour le moment la nature.

Le mouvement de protestation contre la télé-tirelire se fait également sentir sur l'internet avec, notamment, la mise en ligne d'un forum de discussion intitulé Anti Call-TV, ainsi qu'avec la formation d'un groupe sur Facebook - de plus 1000 membres - qui dénonce vertement les pratiques de Call-TV. On invite également les internautes qui s'estiment floués à déposer une plainte auprès du CCNR. Rappelons que le concept de télé-tirelire existe un peu partout dans le monde.

Au Québec, plusieurs téléspectateurs qui ont participé au jeu-questionnaire, diffusé du dimanche au vendredi à partir de 23 h à l'antenne du Mouton noir, considèrent que les règles du jeu ne sont pas claires. Au départ, le concept de Call-TV paraît simple. Une animatrice s'adresse directement aux téléspectateurs en leur demandant, par exemple, d'identifier des prénoms masculins dont la deuxième lettre est un «a».

Elle les invite du même souffle à répondre en téléphonant ou en envoyant des messages textes avec leur portable. Coût de chaque appel: 1 $. Or, même si les participants n'arrivent pas à parler à l'animatrice, ils paient quand même à chaque tentative. Résultat: certains téléspectateurs ont reçu des factures téléphoniques qui ont dépassé les 2000 $.

«Je viens de recevoir mon compte téléphonique et la facture pour le mois de juin s'élève à plus de 2500 $, a témoigné un participant sur le forum Anti Call-TV. Je suis totalement démuni. J'ignore quoi faire. Je risque de perdre une bonne partie de mes économies. Malgré tous mes appels, ajoute-t-il plus loin, je n'ai jamais gagné un sou.»

Même désespoir du côté d'Éric Larouche, un participant de Saint-Jérôme, interrogé par La Presse. Frustré, M. Larouche a déboursé 80 $ après l'envoi de multiples messages textes, sans jamais avoir la chance de répondre. S'il a fait plusieurs tentatives, c'est qu'il était convaincu que «ça fonctionnerait». Aujourd'hui, il en arrive toutefois à la conclusion suivante: «C'est quasiment impossible d'avoir la ligne. C'est assez décevant. Ces gens-là rient de nous. Ils attirent des gens pauvres qui essaient d'appeler en espérant gagner de l'argent, dénonce-t-il. Je n'ai jamais vu quelque chose comme ça.»

En France

La grogne provoquée par la diffusion de Call-TV n'est pas unique au Québec. En France, par exemple, où ce genre d'émission faisait partie il y a quelques années de la grille horaire de certaines chaînes, on a décidé de mieux encadrer ces jeux-questionnaires afin de protéger les téléspectateurs. L'entrée en vigueur des nouvelles règles, en 2007, a incité certaines stations à ne plus diffuser d'émissions de style télé-tirelire.

De son côté, TQS, qui diffusera Call-TV jusqu'à la fin du mois d'août, ignore pour le moment si l'émission reviendra en ondes l'automne prochain. Enregistrée en direct de Vienne dans les studios du producteur et détenteur du concept, l'émission attire en moyenne chaque soir 110 000 téléspectateurs.

Comment réagit le Mouton noir face aux nombreuses plaintes déposées contre Call-TV? «C'est sûr qu'on est sensibles à ça, a dit le directeur du marketing de TQS, David Crête. Chaque plaignant reçoit une réponse écrite de notre part. Mais on s'est assurés que tout se faisait dans les règles. Les animatrices font plusieurs rappels, il y a une bande défilante qui indique les règles du jeu, poursuit-il. On prend toutes les dispositions nécessaires pour aviser les gens. On pense qu'on fait le maximum.»