Dans Kanah D'Ha, on retrouve l'univers disjoncté et adolescent de Réal Béland et de son complice, Pierre Paquin. «C'est l'histoire d'un transsexuel de la citoyenneté», lance candidement Pierre Paquin, qui a coscénarisé le film avec Daniel Michaud (Une année Chick'N Swell, Le Sketch Show).

«Au départ, on voulait raconter l'histoire d'un Indien qui chantait des tounes québécoises et qui connaissait un succès fulgurant dans son pays. Le problème, c'est qu'on ne correspondait pas aux critères de financement parce que notre projet n'était pas assez canadien. À ce moment-là, on s'est dit que ça allait être canadien en tabarnouche.»

Dans Kanah D'Ha, Béland et Paquin délaissent le style caméra cachée pour se plonger dans l'univers de la fiction et du vidéoclip. Les fans retrouveront toutefois le style absurde de Nos voisins d'Danthsu.

Hommage à Bollywood

Le téléfilm, qui sera présenté à Super Écran, raconte le périple d'un Indien nommé Kanah D'Ha (Réal Béland) qui est «possédé» par des succès de la chanson québécoise, remixés à la manière des comédies musicales de Bollywood. Des classiques tels Tourne la page, Donne-moi ma chance des B.B. ou Embarque ma belle de Kaïn.

Kanah D'Ha devient rapidement une vedette dans son pays natal, mais est forcé à l'exil lorsqu'il interprète, accompagné au sitar, le classique pour enfants Pas capable de tirer ma vache. Une insulte suprême au royaume de la vache sacrée.

Kanah D'Ha immigre alors au Québec, l'endroit où il rêve d'habiter depuis son enfance. Mais l'intégration est plus difficile que prévu. La star indienne frôle même l'expulsion après avoir été dénoncée par le chanteur Normand L'Amour, à qui il a volé la vedette sur la scène du fameux restaurant Madrid à Saint-Léonard-d'Aston.

«Le défi, c'était de trouver un dosage entre un certain malaise et quelque chose de beau. De parodier quelque chose de mauvais avec goût, avec un respect sous-jacent.»

Choc culturel

Kanah D'Ha a été partiellement tourné dans la région du Rajasthan, en Inde. Le casting est peu conventionnel. Les acteurs proviennent d'une famille de saltimbanques rencontrée par hasard dans un hôtel de New Delhi lors des deux semaines de repérage.

L'équipe québécoise a communiqué avec les acteurs par l'entremise d'un traducteur qui ne maîtrisait pas parfaitement l'anglais, raconte Pierre Paquin.

«Et notre hindi est plutôt approximatif. De toute façon, mon but était de faire passer une intention; donc, parfois, les répliques ne correspondent pas aux sous-titres. Et Réal disait n'importe quoi. Pour un Indien, il y a des bouts qui n'ont aucun sens et je ne peux même pas vous dire lesquels!»

Kanah D'Ha a été tourné en haute définition avec une équipe de six personnes. Le groupe a dû se débrouiller avec un budget de 498 000$.

Pour Pierre Paquin, l'expérience était avant tout une aventure humaine. En Inde, il s'est toutefois heurté à un choc culturel. «Notre famille d'acteurs faisait partie d'une caste assez basse en Inde. La maison où nous avons tourné le film était celle d'une caste supérieure. Au départ, les propriétaires de la maison refusaient de les laisser entrer. Nous avons dû négocier longtemps.»

Un nombre incalculable d'artistes font de brèves apparitions dans le film. Les chanteurs Patrick Bourgois, Steve Veilleux, Dany Bédar et Normand L'Amour y jouent leur propre rôle. Jean-François Mercier (le Gros cave) joue le rôle d'un client frustré par le service téléphonique douteux de Kanah D'Ha. Pierre Lebeau est un Séraphin indien obsédé par ses roupies.

Kanah D'Ha sera diffusé sur Super Écran à compter du 1er juillet. Il sera également présenté au Théâtre Impérial à Québec, le 22 juin, dans le cadre du Grand Rire Bleu.