Le glas sonnera mercredi pour Carlos, P-A, Steve et Rémi, quand Radio-Canada diffusera le dernier épisode des Invincibles. Les personnages - et leurs créateurs, François Létourneau et Jean-François Rivard - auront là l'occasion de faire une dernière impression sur ceux qui les ont aimés pendant trois saisons.

Aimés, oui. Parce qu'il se crée une relation «amoureuse» entre une série et ses fidèles. En ce sens, l'heure des adieux laisse des traces. Et si on n'a jamais une seconde chance de faire une première impression, on n'a jamais non plus une seconde chance de faire une dernière impression. D'où le goût de la grande finale pour une saison... finale. Parfois divine, parfois amère, parfois inattendue. Toujours indélébile.

Survol des meilleurs et des pires souvenirs «finaux» d'une dévoreuse de séries. Et, mise en garde à ceux qui n'ont pas encore vu les émissions dont il est question ci-dessous: ce qui suit dévoile des coups de théâtre. À lire avec précaution.

«Je pense encore à toi»

La meilleure note finale, je la donne bien sûr à la dernière scène de Six Feet Under. Avant d'écrire cela, j'ai regardé de nouveau ces images. Et j'ai encore pleuré devant cette fin parfaite où, sur la chanson Breathe Me de Sia, Claire roule vers sa nouvelle vie alors que défile, en flashforward, la mort de ses proches. La vie et la mort comme point d'orgue d'une série portant sur la mort - donc sur la vie. Merci, Alan Ball, pour ce grand moment de télé.

Parlant vie, détour ô combien agréable par le monde de Stéphane Bourguignon mis en images par Patrice Sauvé: La vie, la vie. Trente-neuf épisodes se penchant sur la vie (et la vie) de cinq trentenaires, qui se bouclaient jusque dans le titre des épisodes: pas un accident si le premier s'intitulait Je désire et le dernier, Rentrer à la maison! Car ainsi commence la série et ainsi se clôt-elle, en beauté.

Autre finale méritant une bonne note: celle de Sex and the City, où Big va secourir Carrie à Paris (ouf!); celle de Charmed (je ne comprends pas pourquoi mais, oui, j'ai vu toutes les aventures de ces trois «ensorceleuses» qui ne m'ont jamais ensorcelée), qui ferme joliment la série en faisant réapparaître, avec une adresse inaccoutumée dans cet univers, les personnages importants croisés au fil des huit saisons; et celle, percutante, de Minuit, le soir - parce qu'elle est le point final logique au destin des personnages imaginés par Pierre-Yves Bernard. Chapeau l'audace.

«Pourquoi m'as-tu fait ça?»

La pire note finale - oui, j'ai revu la chose juste avant de me commettre -, je la décerne (étonnerai-je quelqu'un?) à l'ultime épisode de The Sopranos. Six saisons, 89 épisodes, une relation de presque 10 ans, pour finir sur... 11 secondes de noir. Qui ne bouclent rien, qui ouvrent sur tout. En particulier, le pire. On ne parle pas de queue de poisson, mais de coup bas. Impossible de pardonner cela à David Chase, même quand - en guise d'explication? - il brandit sa filiation avec David Lynch... lequel est d'ailleurs responsable, pour moi, de l'autre pire note finale: celle de Twin Peaks. J'ai tellement aimé cet univers que je n'accepte pas encore m'être ainsi fait larguer. Rancunière en «amour», la fille.

Aussi dans les rangs des finales décevantes, moins «choquantes» en ce qui me concerne parce que bouclant des séries auxquelles j'étais moins attachée: celle d'Angel, du grand n'importe quoi concocté par le Joss Whedon de Buffy et de l'incompris Firefly; celle de Veronica Mars qui, après trois saisons avec des hauts et des bas, mais attachantes grâce à son personnage principal, fait un saut de trois ans dans le futur (de quessé?)... et disparaît des écrans; celle, enfin, de Babylon 5... mais ce n'est pas de la faute de J. Michael Straczynski: le créateur de cette dense série de science-fiction a été bousculé par un diffuseur qui tantôt donnait le feu vert à une suite, tantôt menaçait l'oeuvre du couperet - avec, au final, un reflet de cette incertitude. Dommage.

«Coït interrompu»

Comme je suis une bonne fille (même si certains en doutent), je laisse habituellement la chance au coureur. Une série peut démarrer cahin-caha, je lui fais confiance pendant (au moins) une saison. De toute manière, je déteste terminer une relation sur une patte. En ce sens, je ferais un mauvais télédiffuseur: combien ont «tiré la plogue» sur une aventure en cours, au mépris de spectateurs (et d'acteurs, scénaristes, réalisateurs, alouette!) qui ont ainsi été laissés en plan?

Le cas d'espèce, sous nos cieux, est celui de Vice caché, la série de François Camirand et Louis Saia dont TVA n'a plus voulu après deux saisons. Qu'est-il arrivé à Michel, qui s'abandonnait aux mains d'une ancienne patiente? À Nicole, qui souffrait d'une paralysie au visage? À Pierre-Paul, qui lorgnait la blonde de sa fille? Mystère.

De l'autre côté de la frontière, Carnival et Studio 60 sont parmi les séries à avoir subi pareil affront. La première, alors que les forces du Bien et Mal s'apprêtaient, au bout de deux saisons, à entrer «apocalyptiquement» en collision; la seconde, alors que cette exploration des coulisses d'une émission genre SNL trouvait un ton et une ligne directrice. Mais il y a pire: le space opera Firefly et la comédie noire Wonderfalls, dont la diffusion a cessé en cours de première saison... alors que tous les épisodes avaient été tournés! C'est là qu'on crie «Vive les DVD!» - puisque, au moins, on a pu terminer ce qui avait été commencé.