(Paris) Danseuse parmi d’autres dans un corps de ballet puis, en quelques mois, étoile de Broadway : c’est le grand écart de la Britannique Leanne Cope, star d’An American in Paris, de retour en scène dans la capitale française.

Près de 2000 représentations à travers le monde, plus de 2,8 millions de spectateurs, quatre Tony Awards : depuis le succès de cette comédie musicale, adaptée en 2014 du film éponyme avec Gene Kelly et Leslie Caron et les chansons de Gershwin, la danseuse britannique de 36 ans vit sur un petit nuage.

« Si on m’avait dit il y a six ans que j’irais à Broadway et que je serais nommée aux Tony Awards, je ne l’aurais certainement pas cru » !, affirme à l’AFP l’artiste au rire franc qui reprend le rôle au Théâtre du Châtelet jusqu’au 1er janvier, cinq ans après la création du spectacle sous l’impulsion de Jean-Luc Choplin, ex-directeur de l’établissement.

« Pas le corps idéal »

C’est après une représentation du Lac des Cygnes au Royal Ballet que son destin change.

Dans les coulisses, le chorégraphe britannique Christopher Wheeldon lui demande de chanter une des célèbres chansons de Gershwin, The Man I Love. « Je ne savais pas que c’était en fait mon audition pour être dans cette comédie musicale », rit-elle.

En tant que ballerine qui n’a jamais eu à utiliser sa voix durant un spectacle, devoir chanter « était très effrayant » se rappelle la danseuse qui a eu droit à un coach vocal à Londres et un à New York.

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Leanne Cope à l’entraînement au Théâtre du Châtelet de Paris.

« J’ai écouté sur YouTube toutes les versions de The Man I Love et je me suis rendue compte que je ne serai jamais capable de la chanter comme Barbra Streisand ou Ella Fitzgerald. J’ai donc chanté comme je le sentais. Aujourd’hui, je ne m’imagine pas sur scène sans parler ».

Comme son personnage, Lise Dassin, une ballerine française ingénue qui tombe amoureuse d’un GI américain au lendemain de la Libération, elle a attrapé petite le virus de la danse classique.

« Je n’avais pas le corps idéal d’une ballerine ; je n’étais pas assez souple, mes pieds n’étaient pas assez cambrés », affirme la danseuse née à Bath en Angleterre d’une styliste et d’un imprimeur.

Au Royal Ballet, elle était « first artist », soit le deuxième grade de hiérarchie typique des compagnies de ballet, en partant du bas.

Dotée d’une personnalité lumineuse, elle eut toutefois l’occasion de se frotter à quelques rôles importants comme dans Casse-Noisette ou Alice au pays des merveilles du même Christopher Wheeldon.

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Leanne Cope dans An American in Paris

Mais la transition la plus difficile a été de passer au statut d’« étoile » de la comédie musicale.

« J’ai dû m’habituer à la pression […] et au fait d’avoir ma propre loge », sourit-elle. « Avant, j’étais avec 30 ballerines du corps de ballet dans une même loge, là je me sens assez seule ».

« Plus libre »

Aux États-Unis, où elle a vécu près de Times Square, elle a vu défiler des célébrités venues voir le spectacle et a même dansé à la Maison-Blanche.

« Je me rappelle une fois des Clinton et vu des coulisses une ovation à Hillary qui venait d’annoncer qu’elle était candidate à la présidentielle ».

Elle se souvient aussi de cette fois où elle a instinctivement fait une révérence à Michelle Obama… « comme je l’aurais fait à un membre de la famille royale en Angleterre. Elle m’a dit, ça va, tu n’as pas à faire la révérence ici », rit la danseuse.

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Leanne Cope

À la création, la comédie musicale était 30 minutes plus longue. « Les Parisiens n’avaient pas de problème avec un spectacle de trois heures. À New York, c’était hors de question », dit-elle.

Si être ballerine semble un « lointain souvenir », elle ressent de la nostalgie pour le Royal Ballet, où danse encore son mari Paul Kay. Mais « les demandes physiques du ballet, ça ne me manque pas », dit-elle.

« Je me sens certainement plus libre qu’avant... j’ai trouvé quelque chose qui me ressemble plus ».