José Navas évoque sa dernière visite au Venezuela et son regard se brouille. «C'était il y a cinq ans et j'ai senti que c'était pour la dernière fois.» Lorsqu'il retourne à Caracas, sa ville natale, Navas étouffe. «J'ai toujours peur qu'il y ait un coup d'État et qu'on me confisque mon passeport. Rester pris là? J'en mourrais», avoue le chorégraphe et danseur montréalais, qui présente, à partir de demain, un spectacle solo autobiographique intitulé Miniatures.

Enfant, Navas ne pense qu'à s'évader du chaos, de la violence et de la pauvreté de Caracas. Sa planche de salut: la danse. À 21 ans, il prend ses cliques, ses claques et ses chaussons: au revoir Caracas, bonjour New York. «J'adore ma famille, mais selon eux, le succès, c'était pour les autres, les riches, les Blancs, pas pour moi.»

 

Pourtant, depuis tout petit, Navas caresse un rêve: sa vie sera comme celle de la grande danseuse Isadora Duncan. «Ma mère m'avait fait cadeau de sa biographie à Noël. Ça a été une révélation! Moi aussi je voulais parcourir le monde, danser sur toutes les scènes et avoir plein d'amants», confie Navas. Aujourd'hui, c'est mission accomplie... sur tous les fronts. Il est devenu un danseur de la trempe des grands, charismatique et inoubliable. Il a gagné des prix prestigieux, dont un Bessie Award, à New York, s'est produit dans une vingtaine de pays, et dirige sa propre compagnie, Flak.

Comme Isadora Duncan, Navas a eu bien des amants. À 43 ans, il a décidé de se faire plaisir et d'évoquer ces amours dans les sept courts solos de son cru qui composent Miniatures et qu'il se fait une joie de danser lui-même. «Je suis un grand romantique, tirant parfois sur le mélo, mais, à mon âge, j'assume. J'adore ce show qui passe du formel, à l'intime, au ridicule et à la célébration. Et oui, j'avoue que par bouts, c'est même assez gai... Pourquoi? Bon sang (rire), je danse sur Judy Garland et Maria Callas!» rigole Navas, qui se laissera aussi porter par les musiques de Vivaldi, Bach, Chopin ou Debussy.

Dans Miniatures se rappellent notamment à son souvenir des amours heureux et d'autres plus sombres. Il évoque notamment feu William Douglas, le chorégraphe qui l'a pris sous son aile à New York et avec qui il déménage à Montréal, en 1991. «Il y a aussi un solo en hommage à mon père, qui m'a appris la salsa. À 9 ans, j'étais tellement bon que j'étais la coqueluche des soirées dansantes.»

Que de chemin parcouru. «Un jour, je dansais Celestiales à l'Opéra de Vienne, où j'étais programmé aux côtés de légendes comme William Forsythe et Jan Fabre; j'étais là, aveuglé par les lumières, à mon deuxième salut tellement la foule m'applaudissait à tout rompre, et j'ai eu un moment de lucidité: je me suis revu, enfant, dans ma chambre à Caracas, avec l'humidité et les moustiques. C'est fou, la vie...»

Sylvain Poirier honoré

Vendredi, à la maison de la culture Mont-Royal, Sylvain Poirier se verra remettre le prix Jacqueline-Lemieux du Conseil des arts du Canada, pour sa contribution au développement de la danse. Poirier, qui a dansé pour Montréal Danse et Jean-Pierre Perreault, innove en affichant ses courtes chorégraphies, filmées notamment dans des endroits familiers de Montréal, sur l'internet (www.dansesylvaindanse.com).

Danse et technologie

Isabelle Van Grimde explore les connexions intimes entre la musique et la danse. Sa démarche est des plus cartésiennes et le résultat, très charnel. Cette fois, grâce à la collaboration du Centre interdisciplinaire de recherche en musique, médias et technologie, Van Grimde ajoute une corde à son arc, soit l'habileté de manipuler le son en direct pour créer la première phase de Duo pour un violoncelle et un danseur. Spectacle-rencontre présenté les 23 et 24 octobre, au pavillon de musique de l'Université McGill (527, rue Sherbrooke Ouest).

À l'agenda

Gravel Works de Frédérick Gravel, du 23 au 26 octobre, à l'Espace Tangente.

Miniatures de José Navas, du 23 octobre au 1er novembre, à l'Agora de la danse.