Le collectif de cirque de Québec, Flip Fabrique, présente ces jours-ci à la Tohu sa 10e création, Muse. Un spectacle pro-femme et pro-diversité, qui se moque gentiment des stéréotypes de genre, mais pas toujours de subtile manière.

Les mâles alpha portent l’équipement de joueurs de football tout en grognant dans les graves, tandis que les filles, rieuses, portent le tutu des ballerines en poussant la note vers les aigüs. Classique, n’est-ce pas ?

Maintenant, serez-vous surpris de voir un de ces joueurs virils sauter sur un trapèze pour faire un numéro aérien tout en douceur ? Un drag faire du cerceau ? Une des filles devenir porteur ? Ou un de ces mâles bien en chair enfiler le tutu avant de faire du trampomur avec une certaine virilité ?

C’est le genre de contrastes que Muse cherche à faire ressortir, mais qui aujourd’hui n’ont vraiment rien de révolutionnaires… Je ne sais pas qui s’étonnera de voir un homme au trapèze ou au cerceau, mais cette absence de frontière nous paraît acquise.

De la même manière que la démonstration de force des femmes n’est plus à faire. Car Muse est aussi un spectacle résolument pro-femme – et pro-diversité –, durant lequel on diffuse des messages militants (de Natalie Portman à Rébecca Déraspe en passant par Olivia Wilde, Emma Watson ou Elliot Page).

Encore une fois, s’il y a une discipline artistique où la force des femmes parle d’elle-même, c’est bien en cirque. Le duo féminin au trapèze (fabuleux !, soit dit en passant) en est la preuve. Pas besoin d’en rajouter.

PHOTO JF SAVARIA, FOURNIE PAR LA TOHU

Evelyne Paquin Lanthier et Anne-Marie Godin font un duo au trapèze.

C’est peut-être cela qui est le plus irritant dans Muse, tout est surligné à gros traits. Comme si les metteurs en scène Sophie Thibeault et Maxime Robin avaient oublié le pouvoir d’évocation du cirque. Tout cela avec une intro qui s’étire indûment, retardant ainsi notre pleine immersion dans ce spectacle qui peine à trouver son rythme.

Quant au numéro clownesque de l’artiste qui fait mine de ne pas savoir faire du cerceau aérien… avant d’en faire, il faut trouver autre chose. On l’a trop vu celui-là.

Aussi, le petit segment sur le « consentement », qui prend la forme d’un « battle des sexes », et qui se termine par un numéro de groupe, ne rend pas justice à la complexité de cet enjeu, surtout quand on sait les abus qu’il y a eu (et qu’il y a encore) dans monde circassien, il y a comme un petit malaise là…

Tout n’est pas perdu dans ce Muse festif, dans lequel on retrouve avec bonheur Jérémie Arsenault, seul membre fondateur du collectif encore sur scène. Le sympathique rasta de Québec n’a rien perdu de son talent au diabolo, qui a soulevé la foule (peu nombreuse jeudi soir à la Tohu).

La présence de la charismatique chanteuse Flávia Nascimento, qui enrobe de sa voix puissante presque chacun des numéros (elle chante entre autres une fabuleuse version d’Une sorcière comme les autres d’Anne Sylvestre), est également un choix heureux des créateurs de Muse, il faut le souligner.

Les numéros à la corde à sauter (un solo, mais aussi des numéros de groupe) sont également très rassembleurs, tout comme la finale au trampomur – numéro signature de Flip Fabrique – toujours très impressionnant, qui conclut plutôt bien ce spectacle imparfait, qui devrait faire un peu plus confiance à la puissance et à la poésie du cirque.

Muse

Muse

Spectacle de cirque

À la Tohu, Jusqu’au 13 novembre

6/10