Lynda Lemay en France, ça ressemble à un rouleau compresseur en modèle réduit. De style artisanal et discret, à l'image de ses musiciens. Mais qui ne s'arrête jamais.

Lynda Lemay n'est pas du genre à faire beaucoup de bruit à la télé ou dans les grands médias nationaux. Ne tourne pas vraiment à la radio. Mais, mine de rien, elle incarne l'un des plus gros succès de la chanson québécoise des 10 dernières années en France.

Samedi soir, elle donnait en toute simplicité son 50e spectacle à l'Olympia en 10 ans, ce qu'aucun Québécois n'a fait jusqu'à présent (et fort peu de Français). Devant une salle comble de fans enthousiastes, comme il se doit. Un public à dominante familiale, d'âge mûr, et majoritairement féminin qui connaît ses anciennes chansons par coeur, ovationne les plus récentes, et ne se lasse jamais de ses longues intros, de ses petites audaces grivoises, sorte de confidences qu'elle partage avec lui.

Avec elle, un spectacle qui commence un peu après 20 h 30 ne se termine pas avant 23 h 30. Lynda est une boulimique de scène et de composition: les journaux français ont noté que son dernier album ne comptait pas moins de dix-huit titres, même si elle en avait éliminé sept autres. Et elle-même déclare: «Quand j'arrête la scène, je tombe malade.»

Et donc, elle n'arrête jamais.

Allô, c'est moi, son plus récent album, est sorti en octobre dernier. Un battage promotionnel plutôt limité. Ou disons ciblé. Très peu d'émissions de télé. Pas grand-chose dans la presse nationale. Pas de lancement de single à la radio. En revanche, pas moins de six pages dans Paris Match, un magazine grand public qui l'a toujours soutenue. Et un grand papier dans Le Parisien, premier quotidien populaire du pays.

Cela a suffi à remettre le petit rouleau compresseur en marche. Samedi soir, malgré la crise actuelle du marché du disque, on lui remettait un disque d'or (environ 75 000 exemplaires) pour son 11e titre. Pour un grand total de 4 millions d'albums vendus en France depuis une dizaine d'années. Pour une chanteuse qui ne fonctionne pas vraiment dans la grosse machine du showbiz, c'est plutôt exceptionnel de se retrouver depuis le mois d'octobre parmi les 15 meilleurs vendeurs d'albums, tous genres et pays confondus.

Pas de tournée des principaux talk-shows à la télé, pas d'association avec de puissantes radios musicales qui font tourner un tube toute la semaine. Lynda fait dans le vrai monde, pas dans les paillettes. «En guise de promo, explique Nicolas Jouanneau, de Warner Music France, nous prévoyons trois quarts d'heure pour les interviews dans chaque ville où nous nous arrêtons». La cible: les quotidiens de province, qui ne font pas les carrières internationales, mais qui jouissent d'un quasi-monopole dans leur région respective.

Résultat: sa tournée en province, avec des incursions en Suisse et en Belgique, est une mécanique parfaitement réglée, à raison de six spectacles par mois, regroupés de manière à lui permettre de passer plus de deux semaines au Québec avec sa famille. Les salles ont toutes plus de 2000 places et, bien sûr, on joue partout à guichets fermés.

«Lynda Lemay, dit Nicolas Jouanneau, n'est pas une vendeuse de tubes, c'est une chanteuse à spectacles qui a une relation fusionnelle avec son public.»

Samedi soir, pour célébrer ce 50e Olympia, la maison de disques organisait une grande fête à bord d'un bateau-mouche. Avec pour héros de la fête ni le Tout-Paris, ni même Aznavour (qui est au Québec) ou Alexandre Jardin qui furent ses premiers parrains en France, mais les 10 membres de son fan-club français qui la suivent depuis le début.

Le vrai monde, toujours.