Elle séduit vite, cette mise en scène signée René Richard Cyr, de L'effet des rayons gamma sur les vieux garçons. Avec son décor en forme de grande boîte surélevée (réalisé par un Pierre-Étienne Locas inspiré), l'aliénation féminine dans ce qu'elle a de plus tordu s'impose sur la verticale scène du Rideau Vert.

Dans cette cage pourvue de fenêtres bloquées par du papier journal, trois folles du logis s'endurent, se torturent et s'aiment au compte-gouttes. Sylvie Drapeau, dans le rôle de Béatrice, compose une mère seule déjantée, libidineuse, burlesque, délirante, méchante, décadente. Un croisement trash entre Estelle Poliquin de l'émission Les hauts et les bas de Sophie Paquin et Maman Bougon. Exquis.

À ses côtés, ses cadettes Émilie Bibeau et Catherine De Léan tentent elles aussi de rendre la démesure, dans leurs rôles d'adolescentes prisonnières d'un giron exclusivement féminin.

De Léan (dans le rôle de Mathilde) joue avec candeur l'ado rêveuse et studieuse, qui se réfugie dans les sciences naturelles pour fuir la folie ambiante. Une enfant qui ne demande qu'à aller à l'école à sa dingue génitrice, qui l'enferme dans son nid pollué. Et qui cède parfois à des élans poétiques peu convaincants. Quant à Bibeau, comédienne qui nous montre de plus en plus sa polyvalence, elle s'éclate dans la peau de Rita, la frangine olé olé, proche parente de la Mariette de la pièce Le vrai monde? de Michel Tremblay (qu'elle jouait chez Duceppe en 2007).

Séduction de courte durée

Comme un enfant dans une confiserie, on est donc envoûté par tout ce qui grouille dans cette cage aux folles orchestrée par René Richard Cyr. Hélas! la séduction est de courte durée dans cette pièce d'une heure et demie.

Cyr, qui a pris la voie du comique pour amplifier la misère de ces femmes, apporte une couleur proche des Bougon à ce texte de l'auteur américain Paul Zindel. Sylvie Drapeau répond brillamment à la commande, en se lançant sans retenue dans les zones de folie d'un personnage complètement perdu.

Le problème, avec les Sylvie Drapeau de ce monde, c'est que lorsqu'elles sont à leur sommet, les autres souffrent de la comparaison.

Plus de rire que de compassion

Il y a bien plusieurs bons gags, plusieurs flashs amusants, dans L'effet des rayons gamma sur les vieux garçons. Ces femmes prisonnières de leur misérable appartement nous font rigoler, plus qu'elles inspirent notre compassion. Nous ne sommes pas dans le constat ou la dénonciation du sort des pauvres. Toute la place est occupée par le burlesque, l'absurde, le comique.

Que retient-on de cette délirante suite de répliques drolatiques? Bien peu de choses. Un propos distrayant, mais maigre. Une histoire de famille sans lien authentique auquel s'accrocher. Une proposition certes séduisante, mais tout à fait oubliable. C'est bien joli d'être séduit. Mais il faut aimer, aussi.

L'effet des rayons gamma sur les vieux garçons, de Paul Zindel, dans une mise en scène de René Richard Cyr, jusqu'au 18 avril au Théâtre du Rideau Vert.