Pendant les neuf années où on ne l'a pas vue en concert à Montréal, Céline Dion a grandi, elle a mûri. Et elle donne aussi l'impression d'avoir rajeuni. Hier soir, le Centre Bell a acclamé une revenante qui a donné à ces 22 426 spectateurs le meilleur de ce qu'elle sait faire. Et qui y triomphera encore sept fois au cours des deux prochaines semaines.

Sa plus forte ovation, la plus longue aussi, Céline l'a eue au moment le plus inopportun. Elle venait de dire combien il était difficile de chanter My Love, une magnifique chanson que Linda Perry a écrite pour elle, quand les cris d'amour se sont mis à fuser de partout. Puis ce fut l'ovation, semblable, quoique moins longue, à celle à laquelle avait eu droit le Rocket le dernier soir au Forum ; semblable en ce que les deux héros l'ont appréciée tout autant qu'ils s'en seraient bien passés.

À consulter

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À une autre époque, Céline aurait pleuré à chaudes larmes, elle aurait fait un discours-fleuve. Mais hier, elle souriait. Émue, certes, elle a attendu le moment propice pour se mettre à chanter tout en faisant preuve d'une retenue qui a fait de My Love, entreprise courageusement a cappella, le grand moment de la soirée.

Pour avoir vu les deux, le spectacle français de Céline Dion est encore meilleur que l'anglais. Les numéros de production, avec danseurs énergiques et projections modernes, sont à peu près pareils, mais les huit chansons françaises au programme forcent Céline et son équipe à ne garder que la crème de son répertoire anglais, à laquelle appartiennent déjà de nouvelles chansons comme My Love, justement, Taking Chances, Shadow of Love. Et même, d'une certaine façon, la reprise efficace d'Alone, superbement servie par des projections sur un carré d'écrans au travers desquels on devinait la présence de Céline au milieu de la scène.

Cela tient beaucoup à la qualité des chansons de Jean-Jacques Goldman, dont S'il suffisait d'aimer, un moment de grâce et de douceur où le public s'est même permis de fredonner le refrain avec la chanteuse, recueillie parmi la foule à l'extrémité d'une des deux passerelles qui relient la cinquième rangée des rouges à la scène centrale. Et puis les anglos n'ont pas droit, eux, à L'amour existe encore, qui gagne en émotion chaque fois que Céline la chante.

Dans ce spectacle, il n'y a aucun temps mort. Bien sûr, la scène hi-tech, les projections léchées sur des airs dance ou flamenco et la qualité des numéros de danse y est pour quelque chose. Tout n'est pas parfait : la reprise de We Will Rock You ne me convainc toujours pas, mais The Show Must Go On, aussi du groupe Queen, va comme un gant à Céline, qui, c'est vrai, partage avec Freddie Mercury un sens certain de la démesure.

Mais le coeur de ce concert, c'est encore et toujours cette chanteuse qui, en deux heures et 23 chansons écrites pour elle ou popularisées par James Brown, Eric Carmen et autres Heart, démontre toute l'étendue de son immense talent poli par les années.

À 40 ans, Céline Dion, la chanteuse, n'a jamais été aussi bonne ; la femme, elle, jamais aussi belle.

En première partie, vous découvrirez une Véronic DiCaire absolument étonnante qui, contre toute attente, a mis le Centre Bell dans sa petite poche arrière, récoltant ovation sur ovation.

Tapis rouge

Plus tôt en soirée, des centaines de fans, pressés de part et d'autre du long tapis rouge à l'entrée du Centre Bell, espéraient apercevoir les nombreuses vedettes venues assister au spectacle. Les cris et les applaudissements éclataient chaque fois que les Corneille, Daniel Lavoie ou Brian Mulroney descendaient de leur limousine.

Fine stratège, la Drummondvilloise Sandra Poulin s'était postée sur un muret de pierre, appareil photo à la main, prête à immortaliser les stars à leur passage. Mais la jet-set était bien secondaire pour cette fan invétérée, qui s'est déjà rendue à Las Vegas pour voir et entendre Céline.

«Ça fait longtemps qu'elle n'est pas venue à Montréal, alors ça va être spectaculaire», a-t-elle dit.

«C'est cool! The queen is back! a lancé Gregory Charles après avoir posé avec quelques fans. Ça prouve à quel point elle est admirée et à quel point elle nous a bien représentés ailleurs.»

D'autres artistes, pourtant habitués des foules, étaient étonnés de cette atmosphère fébrile.

«Chaque fois que Céline se présente quelque part, il y a toujours un engouement spectaculaire, a convenu le chanteur Éric Lapointe. Mais je ne pensais pas que ce serait tant que ça.»