Rose-Maïté Erkoreka pose, dans sa première pièce, Souveraines, un regard sur le pouvoir. Avec sa troupe de la Banquette arrière, elle y décrit la vie d'une troupe de théâtre amateur qui s'entredéchire sur l'exercice même du pouvoir. Entre les hommes et les femmes, au théâtre et ailleurs. Équité!

Rose-Maïté Erkoreka voulait que sa première pièce traite des femmes, du pouvoir et des femmes, ce qui ne relève toujours pas d'une évidence, même en 2018.

«On a commencé la pièce avant le mouvement #metoo, note-t-elle. Le directeur du Quat'Sous Olivier Kemeid était emballé par ce projet. Avec la metteure en scène Marie-Josée Bastien, on a bien travaillé sur le texte et sa théâtralité. Je crois qu'on a relevé le défi.»

Même si elle avait participé à des créations collectives auparavant, la codirectrice artistique de la Banquette arrière, qui dit par ailleurs ne pas être attirée par le pouvoir, n'avait pas encore écrit une pièce au complet.

«C'est un des thèmes de la pièce, dit-elle, les femmes sont capables de tout faire. Nous ne sommes plus à l'âge de pierre où le pouvoir était naturellement occupé par des hommes forts. Les femmes peuvent, aujourd'hui, diriger un pays. Pour une raison que j'ignore, il est pourtant encore difficile pour les femmes d'accéder au pouvoir. En politique, en tout cas. Et tout est politique.»

La place des femmes, le pouvoir des femmes. La dramaturge a voulu s'inspirer du pouvoir féminin de toutes les couleurs. Comme on le verra avec des projections dans la pièce, elle a fouillé tant à droite qu'à gauche. De Margaret Thatcher à Pauline Marois, en passant par Hillary Clinton et Valérie Plante.

Mais, comme dirait la grande poète et romancière France Théoret, si une femme se hisse au pouvoir et l'assume comme un homme, qu'est-ce que ça change?

«Il y a autant de façons d'exercer le pouvoir qu'il y a de gens qui l'exercent. Et ça vaut aussi pour les femmes. Effectivement, il ne peut pas y avoir de vrai changement si les femmes au pouvoir font exactement comme les hommes. Une question qui m'intéresse beaucoup, par exemple, c'est pourquoi en politique, on ne peut pas exprimer nos émotions?»

Elle-même n'a pas trouvé de réponse à cette question. Au-delà de cette réflexion, la dramaturge estime que les femmes se doivent de prendre tout simplement la place qui leur revient.

«Il ne s'agit pas, comme dans la pièce, de faire la guerre, de s'en prendre aux hommes. Je ne sais pas si l'équité pour l'équité est la solution. Je crois à la parité, en tout cas. Comme le disait Pauline Marois quand elle est devenue première ministre, on peut rêver simplement du jour où les femmes seront toutes souveraines, pourront enfin être elles-mêmes, peu importe leur métier.»

Banquette arrière

La troupe de la Banquette arrière a 18 ans... et s'aime encore. Il ne faudrait donc pas voir dans la pièce Souveraines un écho à un quelconque désamour. La grosse dispute qui se déploie sur scène entre hommes, femmes, amis et cocus n'a rien à voir avec le groupe formé d'anciens étudiants du Conservatoire de Montréal qui ont fini leurs études en 2001.

«On a toujours le goût de travailler ensemble et on va continuer de le faire encore, confie Rose-Maïté Erkoreka, même si les horaires sont parfois difficiles à concilier. Mais comme j'assume la direction avec Éric Paulhus, je me suis dit que je me devais d'assumer mes responsabilités et me lancer dans l'écriture.»

Sébastien Dodge joue Phil, le directeur d'une troupe de théâtre amateur qui veut monter l'oeuvre franchouillarde Les rois maudits, alors que Maïa (Rose-Maïté Erkoreka) s'intéresse aux femmes de pouvoir. La lutte sera vive entre les deux et provoquera une crise majeure au sein du groupe.

«C'est plus facile d'écrire sur ce que l'on connaît, admet la néo-dramaturge. À la Banquette arrière, c'est sûr qu'il peut y avoir des tiraillements quand on répète, ça fait partie du théâtre, mais ça n'a rien à voir avec la troupe amateur qui se déchire dans la pièce. On forme une troupe très démocratique.»

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Souveraines est présentée au Quat'Sous jusqu'au 8 décembre.