Philippe Cyr et Gilles Poulin-Denis se sont inspirés des travaux d'Henri Laborit pour imaginer une rencontre théâtrale humaniste avec les spectateurs dans Ce qu'on attend de moi.

Un spectateur ou une spectatrice volontaire par soir. Seul (e) en scène, répondant aux questions des maîtres de jeu - les dramaturges et metteurs en scène Philippe Cyr (J'aime Hydro) et Gilles Poulin-Denis (Straight Jacket Winter). Leur projet Ce qu'on attend de moi, présenté au OFFTA l'an dernier, se veut une expérience « sympathique ».

«On n'est pas dans la confrontation, lance Philippe Cyr. C'est une oeuvre sensible, poétique, où on explore une certaine universalité des sentiments humains.»

«Ce qui nous passionne, c'est d'aller à la rencontre de quelqu'un. Personnellement, j'ai besoin de shows où il y a quelque chose de chaleureux et de tangible.»

Son acolyte Gilles Poulin-Denis souligne qu'il n'y a pas de véritable acteur sur scène. Le participant sélectionné est au centre de l'attention, mais pas de façon intrusive. «On cherche à révéler la personne au public, à toucher son humanité», dit-il. 

Même s'ils ont lu Éloge de la fuite d'Henri Laborit, ils soulignent que la personne de l'assistance qui participe au spectacle n'a rien d'un rat de laboratoire.

«Métaphoriquement, le spectateur est en fuite, dit Philippe Cyr. Il quitte sa fonction de membre du public. Il passe dans un ailleurs. Il s'extrait de la masse. Mais Laborit est quelqu'un qui a un regard assez pessimiste, voire réducteur sur la condition humaine. Notre approche est davantage basée sur l'espoir et le libre arbitre.»

«Nous sommes les deux en interaction constante avec le spectateur, ajoute Gilles Poulin-Denis. On va chercher la fibre humaine pour la mettre en lumière. Laborit dit que la seule fuite possible, c'est dans l'imaginaire. Dans le dispositif, on essaie justement de sortir de la quotidienneté avec la musique, l'éclairage et la scénographie.»

Nouvelles rencontres

À l'heure où le théâtre cherche à renouveler le pacte théâtral avec le public, cette expérience basée sur la «rencontre» reste un moment de «partage de sentiments».

«J'ai commencé en écrivant de la fiction, mais je m'intéresse de plus en plus au réel. Je ne suis pas le seul. Il y a quelque chose qui se passe en ce moment au théâtre avec ça. Il y a un intérêt du public aussi», se souvient Gilles Poulin-Denis.

Il faut dire que le participant au spectacle n'est pas en scène, mais vu par le truchement d'un relais vidéo en direct.

«Les perspectives du participant et des autres spectateurs sont complètement différentes. On voulait soutirer physiquement la personne de l'espace public alors que nous, on reste avec eux. On a écrit une partition, mais ça reste un truc hybride. C'est ça le spectacle. Chaque soir est unique», souligne Poulin-Denis.

Les deux créateurs se sont connus au baccalauréat en théâtre à l'UQAM. Ensemble, ils réfléchissent depuis un moment déjà au réflexe très commun de la fuite.

«Il y a tout un spectre des fuites possibles. Gilles et moi avons fait plusieurs laboratoires sur ces idées, notamment celle de partir et de recommencer à zéro. Tout le monde y a pensé un jour ou l'autre.» 

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Au Théâtre Aux Écuries, du 21 au 26 mai.

Photo Hugo B. Lefort, fournie par le Théâtre aux Écuries 

Ce qu'on attend de moi