Pour sa première mise en scène au TNM, Alain Zouvi a le désir de faire partager son amour de la vie et du théâtre. En revisitant les bons sentiments de l'oeuvre de Marivaux, il souhaite éclairer de joie et de plaisir notre époque opaque.

« Il n'y a pas de hasard, il n'y a que de l'amour. » Telle est la devise d'Alain Zouvi, qui monte le classique de Marivaux au TNM, avec, entre autres, Bénédicte Décary, Catherine Trudeau, David Savard, Marc Beaupré et Philippe Thibault-Denis.

Aux yeux du metteur en scène, Marivaux, l'auteur de répertoire le plus joué dans la Francophonie après Molière, est toujours actuel. « Je monte un Marivaux pour la même raison que j'écoute du Mozart ou du Beethoven: parce que c'est d'une grande beauté. Mais aussi porteur d'un message universel, qui serait l'amour comme façon d'être et manière de vivre. »

« En 2017, on vit une période difficile politiquement, socialement. Je trouve les gens très durs les uns avec les autres. Et je crois que tout le monde a besoin d'amour et de gentillesse dans la vie. »

« Je ne dis pas ça de façon cul-cul, fleur bleue, poursuit le metteur en scène. Je crois qu'à partir du moment où tu te mets à haïr tes contemporains au lieu de les aimer, tu as un gros problème et tu dois le régler. »

Noble comédie

Dans la tradition du marivaudage, Le jeu de l'amour et du hasard met en scène des chassés-croisés amoureux entre de jeunes couples, des conflits entre deux classes et des travestissements entre maîtres et valets. Plaisir du jeu et beauté de la langue sont bien sûr au rendez-vous. Ils s'épousent même dans cette comédie pure, joyeuse et pas du tout légère.

Il y a trois siècles, Marivaux a (re)donné ses lettres de noblesse à la comédie. « Une bourgeoise contente dans son petit village vaut mieux qu'une princesse qui pleure dans un bel appartement », écrit-il dans sa pièce La double inconstance.

Du désir et de la sensualité

Bien qu'il signe ici sa première mise en scène au TNM, Alain Zouvi a déjà dirigé 15 productions, au Rideau Vert et ailleurs.

Le créateur connaît bien cette pièce qu'il a jouée en 1989, dans le rôle d'Arlequin, tout comme son père, Jacques Zouvi, l'avait fait en 1969. Il propose une mise en scène d'époque mais très organique, avec de l'eau, de la lumière, des couleurs, du désir et de la sensualité. « On ne joue pas la patte à l'air pour faire rire les spectateurs », prévient-il.

Après 35 ans à jouer des personnages, Zouvi s'est tourné vers la mise en scène par envie, certes, mais aussi par besoin. En 2011, l'acteur a fait une crise de panique sur scène, le soir de la première de Hamlet au TNM. Il a eu non pas un mais deux trous de mémoire d'affilée au milieu d'une réplique: « J'ai repris trois fois de suite le monologue de Claudius au début de la représentation. Par miracle, en regardant dans la salle, les mots sont revenus dans ma bouche... »

« Après, je me suis effondré en coulisses et j'ai vécu un trac énorme jusqu'à la fin de la production. C'est fini ! Je n'ai plus envie de vivre ça. »

« Avec le recul, je réalise que cette angoisse ne vient pas sans raison. Au fond de moi, je ne voulais plus jouer. Je l'ai fait pendant 35 ans, j'ai adoré ça, mais il faut savoir quand arrêter. »

Alain Zouvi estime aussi « créer davantage comme metteur en scène » avec son équipe. « J'aime partager et communiquer avec une équipe de concepteurs, de techniciens, d'interprètes. Pour moi, la création, ça ne se fait pas tout seul; c'est un gros travail d'équipe. Ma vision de metteur en scène est teintée de toutes ces influences. »

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Au Théâtre du Nouveau Monde, du 25 avril au 20 mai.

PHOTO Martin Chamberland, LA PRESSE

Alain Zouvi (à droite) dirige les comédiens David Savard (à gauche) et Catherine Trudeau dans une mise en scène d'époque, mais très organique de la pièce Le jeu de l'amour et du hasard.