Il est rare qu'on assiste à la (vraie) naissance d'une nouvelle voix théâtrale. C'est ce qui arrive actuellement à La Licorne, où l'on présente à guichets fermés Coco de Nathalie Doummar. Une première pièce sans tabous, percutante et ancrée dans l'air du temps.

Elles se connaissent depuis l'enfance. Malgré des divergences et des personnalités différentes, leur amitié est soudée par un pacte; celui de toujours (se) dire la vérité. À l'aube de la trentaine, une épreuve viendra les ébranler. Coco (jouée par l'auteure), la bienveillante du groupe, celle qui reste douce dans l'adversité, est emportée par le cancer. Avant de partir, elle va laisser de précieux souvenirs en cadeau à ses chums de filles.

Voilà en résumé l'histoire de Coco, une comédie dramatique mise en scène par Mathieu Quesnel, défendue par cinq actrices dont l'âge tourne autour de 30 ans. Cette incursion dans l'amitié au féminin est la meilleure première pièce qu'on ait vue depuis longtemps.

Tellement que La Presse a voulu en savoir plus sur cette auteure de 32 ans, Nathalie Doummar. «J'ai découvert l'écriture sur le tard, à la fin de mes études au Conservatoire d'art dramatique, en 2011», raconte la comédienne et jeune maman, en entrevue à La Presse.

À l'époque, l'actrice née au Québec de parents égyptiens participait à une création collective avec les finissants du Conservatoire. Son professeur, le metteur en scène Frédéric Blanchette, l'a convaincue d'écrire des textes pour le théâtre.

«Depuis, c'est devenu une passion, dit-elle. Je me vois écrire tout le reste de ma vie, même si je veux continuer à jouer.»

La comédienne est d'ailleurs la vedette du prochain film de Chloé Robichaud, Pays, que les rumeurs envoient déjà à Cannes! (Sa sortie au Québec est prévue pour l'automne prochain.) À la télévision, le public a pu voir Nathalie dans les séries Nouvelle adresse, Boomerang et Au secours de Béatrice.

Actuel et percutant

Après avoir écrit quatre courtes pièces, présentées en marge des programmations régulières, Nathalie Doummar a pu produire Coco grâce, entre autres, au Théâtre La Manufacture et À Lez Spread the Word, organisation fondée par Florence Gagnon qui «rassemble, renseigne et fait rayonner les communautés lesbiennes au Québec». (La pièce aborde le thème de l'homosexualité, mais aussi ceux de la maternité, de la mort, du couple, de la famille, et seul un personnage est une lesbienne.)

De tous les genres, la comédie dramatique est sans doute le plus difficile à maîtriser. Pouvoir bouleverser le public en évitant le pathos, faire rire sans tomber dans la farce ni la caricature, cela n'est pas donné à tout le monde. L'auteure dose ici à merveille l'un et l'autre. «C'est peut-être mon héritage culturel, dit-elle. Dans ma famille, l'humour est souvent un antidote au drame, à la maladie et à la mort.»

Une fois, au chalet!

Nathalie Doummar a imaginé le destin de Coco à partir de sa propre obsession du cancer et de la mort. Fille de «gang», l'auteure s'est ensuite inspirée de ses week-ends entre copines, au chalet des parents de Caroline Dhavernas, un lieu qui sert de trame narrative à la pièce.

Après avoir collaboré l'an dernier avec les créatrices du spectacle Table rase, Doummar a demandé à Mathieu Quesnel de faire passer des auditions pour dénicher les quatre perles rares du reste de la distribution. Une opération plus que concluante avec les solides prestations de Marie Soleil Dion, Kim Despatis, Anne-Marie Binette et Sarah Laurendeau.

Nathalie Doummar a deux autres pièces en chantier. Cette fois, son regard doux et lucide se portera sur les remises en question et la quête identitaire de la génération de ses parents. Or, avant, on espère reprendre Coco dans un théâtre près de chez vous... À suivre.

À La Petite Licorne jusqu'au 20 février, à guichets fermés.