Depuis la semaine dernière, La Roulotte a entrepris sa tournée des parcs montréalais pour présenter la pièce Fifi Brindacier. Nous sommes allés observer le travail se ses artisans vendredi au parc Le Prévost, devant et derrière ce théâtre ambulant qui fait le plaisir des enfants, et de leurs parents, depuis plus de 60 ans.

LA ROULOTTE

Concept créé par Paul Buissonneau en 1953, le théâtre La Roulotte se promène dans les parcs montréalais pendant tout l'été.

Cette année, 49 représentations auront lieu dans presque tous les arrondissements de la ville. C'est l'auteure et metteure en scène Annie Ranger, cofondatrice du théâtre Les Écuries, qui a eu l'idée de monter Fifi Brindacier

«Je cherchais à faire quelque chose d'indépendant, alors j'ai appelé directement à la Ville pour leur proposer mes services», dit celle qui devient ainsi la deuxième femme de l'histoire à faire la mise en scène d'un spectacle de La Roulotte.

Le personnage culte de l'auteure suédoise Astrid Lindgren fait partie de ses souvenirs d'enfance grâce à la série télé, dit-elle. «C'est une icône personnelle!»

FIFI BRINDACIER

Ce sont surtout des contes qui ont été mis en scène par La Roulotte. «Le chat botté, par exemple, a dû être monté trois fois!»

Annie Ranger avait envie de choisir un texte contemporain, ce qui représente une contrainte de plus, question de droits: on ne peut pas faire ce qu'on veut avec Fifi.

«Astrid Lindgren avait elle-même adapté son roman pour le théâtre. Mais en lisant le texte, je me suis rendu compte que j'aurais gardé les mêmes tableaux. Car c'est ça, Fifi Brindacier, finalement, une série de scènes: Fifi à la foire, Fifi à l'école, Fifi prend le thé avec les dames...»

Elle aime sa folie, sa liberté, sa créativité. «Elle a un côté superhéros aussi, fantastique, car ce qui la caractérise, c'est sa force.» La metteure en scène aime aussi l'idée qu'avec Fifi, «tout est possible».

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

L'INSTALLATION

La Roulotte arrive au parc dès 8 h 30 en vue de la représentation de 10 h 30. Les cinq membres de la troupe, appuyés par une équipe technique, s'affairent immédiatement à la transformation du véhicule.

«C'est une belle gang cette année, ils ont vite compris comment ça marche!», lance le régisseur Jean Desmarais, qui travaille pour La Roulotte depuis 27 ans.

Pendant un peu plus d'une heure, ils vont transporter du matériel, planter des poteaux, installer la sonorisation, mettre la scène à niveau, poser les garde-fous. Bien vite, il fait trop chaud pour endurer les petites laines enfilées le matin.

«On se fait du muscle!», lance en souriant Mounia Zahzam, une des comédiennes. Difficile, le premier matin? «On est quand même déjà rodés. Depuis trois semaines, le temps de répétition comprend aussi le montage et le démontage.»

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LES INTERPRÈTES

Ils sont quatre filles et un garçon, ont entre 22 et 27 ans, sont finissants du Conservatoire d'art dramatique et de l'École nationale de théâtre, et c'est pour la plupart d'entre eux leur premier contrat professionnel.

«J'espérais qu'ils me prennent, mais je ne me faisais pas trop d'espoir, car ils n'en choisissent pas beaucoup, dit Aurélie Brochu-Deschênes. Ce sera vraiment un bel été dans les parcs, dehors tout le temps. Et c'est un beau trip de gang.»

C'est un grand défi physique aussi, car il faut non seulement monter et démonter la scène, mais quatre comédiens sur cinq interprètent au moins deux personnages.

«Il faut nous voir derrière, on court tout le temps», dit Elizabeth Marcoux-Bélair.

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LA PRÉPARATION

Pendant qu'Annie Ranger donne ses dernières instructions, les comédiens font des vocalises ou des étirements. Elizabeth trace un trait de crayon sous les yeux de Maxime Genois, «le seul gars du groupe, le plus jeune... et le seul blessé», dit-il, le bras dans une attelle à cause d'un accident de vélo.

«On n'a pas le choix d'être au top de notre forme. Et on n'a pas vécu encore une journée à deux représentations, une le matin et une en soirée», dit-il.

Quant à Sophie Grenier, l'interprète de Fifi, son été sera un véritable marathon. «Pas besoin d'aller au gym, dit-elle. Ça roule!»

Elle n'a pas le temps de parler beaucoup: dès l'installation de la scène terminée, elle commence à enfiler les robes superposées et les longues chaussettes de la petite fille aux tresses rigides. «J'aime son look, c'est sûr. Et Fifi, c'est comme un pied-de-nez aux adultes», dit-elle en laçant ses bottines.

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Sophie Grenier en train de prendre son look Fifi.

LA REPRÉSENTATION

Depuis 45 minutes avant le début de la pièce, les enfants ont commencé à arriver au parc Le Prévost. En ce beau matin de juillet, beaucoup de groupes de CPE et de camps de jour, et des jeunes parents avec leurs enfants d'âge préscolaire.

Le public suivra avec attention les aventures de cette jeune fille qui vit seule avec son singe et son cheval, attendant le retour de son papa pirate. Elle joue à Marco Polo avec ses voisins Tommy et Annick, terrasse un homme fort, se fait poursuivre par la police...

La pièce est joyeuse et vive, bavarde, mais avec des moments de burlesque, et fidèle à l'esprit d'Astrid Lindgren: on y parle de liberté, de droit des enfants, d'intégration et d'autonomie.

La représentation terminée, les parents sont joyeux, les enfants vont faire des câlins aux comédiens encore costumés et se faire photographier avec eux. La magie de La Roulotte opère toujours.

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Fifi Brindacier par le théâtre de La Roulotte, tout l'été dans les parcs montréalais.

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