Le dramaturge Serge Marois n'avait pas prévu écrire une suite à La robe de ma mère, jolie pièce jeune public qui avait été à l'affiche de la Maison Théâtre il y a quelques années. Mais cette histoire de frères jumeaux qui, chaque année à la même date, ont rendez-vous à la plage avec leur mère, était porteuse d'un univers si riche qu'il a décidé d'y revenir.

C'est ainsi qu'est né Les mains de mon père, qu'on pourra voir à la Maison Théâtre à compter de mercredi. On retrouve un des jumeaux, Émile, le plus artiste des deux, qui imagine une rencontre avec son père absent, personnage à peine évoqué dans la première pièce. «J'avais envie de parler de la paternité, à partir de ma propre expérience d'enfant, mais aussi de mon expérience de père, dit Serge Marois. Alors je l'ai écrit de manière viscérale, et non dans un angle conflictuel.»

Absence et réconciliation

Émile a bien des choses à reprocher à son père - son absence, sa sévérité, son manque de compréhension envers sa différence -, mais l'esprit est davantage à la réconciliation qu'à la confrontation. «Il n'y a pas de ressentiment, et j'y tenais, dit Serge Marois. On se sort de ses blessures d'enfance. Et quand on réalise combien nos parents nous aimaient, ça compte plus que tout le reste. Parce qu'il y a l'amour.»

Cette absence de ton revanchard a d'ailleurs plu au metteur en scène Denis Lavalou, qui avait incarné le frère d'Émile, Gaston, dans La robe de ma mère. «C'est une rencontre imaginaire entre Émile adulte et son père tel qu'il était quand il était petit. Donc ils ont le même âge, et ce sont alors deux adultes qui se parlent, qui ont une reconnaissance l'un de l'autre. Chacun a fait son chemin, et ça rétablit l'équilibre.»

Une situation qui permet ainsi à Émile de remettre les choses en perspective, de ne plus voir son enfance et son père avec ses yeux d'enfant...

Le metteur en scène a aussi aimé le côté ludique et fantaisiste de la pièce, qui fait de nombreux retours dans le passé d'Émile et de son père. «Même s'ils ont l'habitude de flotter entre le réel et l'irréel, c'était un défi de rendre ça compréhensible pour les enfants. Alors il y a des balises très claires avec le son, la lumière, la vidéo. Et même si ça bouge beaucoup, il y a toujours un lieu fixe, qui est le restaurant où les deux hommes se rencontrent.»

Les scènes dans ce resto où le service n'est pas à la hauteur lui ont permis de flirter avec l'absurde, en créant un univers plein de surprises et de folie. «On est un peu chez Monty Python, chez Tati... C'est comique, très rythmé.»

Entre légèreté et profondeur, Les mains de mon père reste un rare spectacle jeunesse sur les relations père-fils. «On parle beaucoup plus souvent des relations mère-fils. La pièce va dans des zones qui ne sont pas souvent explorées», croit Denis Lavalou, qui aime le regard tendre, bienveillant et sans manichéisme de Serge Marois.

Pour l'auteur, c'est clair, être papa est plus difficile qu'être maman. «C'est ce que je dis dans la pièce. C'est moins intuitif et ça prend plus de temps à apprendre, dit-il. Mais ça s'apprivoise.»

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Les mains de mon père, à la Maison Théâtre, du 2 au 19 avril. Pour les 7 à 12 ans.