Grâce à Clôture de l'amour, créée au Festival d'Avignon en 2011, l'homme de théâtre Pascal Rambert - formé chez Antoine Vitez, émule de Claude Régy - connaît actuellement un succès mondial. Et amplement mérité. Car sa pièce sur la séparation d'un couple qui se déchire, durant deux heures, est un texte dense, poignant, théâtral. Une formidable partition pour acteurs virtuoses.

La production que propose le Quat'Sous, mise en scène par Christian Vézina, avec Christian Bégin et Maude Guérin, est à la hauteur des attentes.

Clôture de l'amour est construite en deux parties, sans dialogue: la première heure est constituée du monologue de l'homme, la deuxième, de la version de la femme. Et pourtant, leurs silences sont plus éloquents que de grands discours. Le regard de l'autre, omniprésent, est aussi nécessaire dans la pièce que dans une relation amoureuse.

Stan est celui qui veut se séparer et il ouvre la pièce. Sa plaidoirie sur le désamour est ponctuée de moult clichés (qui sont aussi des vérités) sur l'inévitable déclin amoureux. Selon lui, dans un monde de consommation «où nous sommes des appareils jetables à programmation courte, où l'on prend et l'on jette après usage [...]», il est normal qu'un jour l'amour s'en aille. L'époux reproche à sa conjointe de se camper dans son idéal amoureux, de refuser de voir la réalité en face, etc.

Ensuite, c'est au tour d'Audrey. Sa défense est sans merci. «Parler de ce que fut l'amour qui nous unit en termes de mausolée, de fiction, quelle vulgarité! Quelle défaite, quelle abdication devant le monde!» Audrey affronte ainsi le cérébral Stan. Ce dernier encaisse en silence, avant de sombrer, de se liquéfier dans une flaque d'émotions.

Du théâtre à la puissance mille

En ouverture, Christian Bégin joue avec conviction le rôle du conjoint au-dessus de ses émotions. Mais c'est inévitablement la réplique de l'amoureuse, dans la seconde partie, qui fait mouche. Parce qu'Audrey arrive après son conjoint et que ses arguments sont mieux sentis. Mais aussi parce que dans les mains d'une comédienne de la trempe de Maude Guérin, c'est du théâtre à la puissance mille!

Sur scène, Maude Guérin est un trésor vivant! Elle ira rejoindre les Luce Guilbeault et Dyne Mousso dans le temple des actrices phares du théâtre québécois. Toujours juste dans la compréhension du texte, précise dans le moindre geste, la plus simple expression du visage, Guérin livre une performance forte et éclatante.

Qui plus est, elle irradie avec un personnage sans éclat physique ostentatoire, peu maquillé, avec une simple queue de cheval, une robe ordinaire, pieds nus...

Audrey conclut la pièce avec un émouvant réquisitoire en énumérant ce qu'elle gardera en mémoire de sa relation avec Stan.

De notre côté, nous garderons le souvenir d'une formidable interprète, bien dirigée par Vézina et secondée par Bégin. Rendez-vous au Quat'Sous, voir Maude Guérin livrer un (très) grand numéro d'actrice!

Jusqu'au 6 décembre au Théâtre de Quat'Sous.

Photo Yanick Macdonald

Maude Guérin et Christian Bégin sur scène.