Le théâtre et l'acrobatie se rencontrent encore une fois dans la nouvelle création de la compagnie DynamO Théâtre. Pièce sans paroles, Devant moi, le ciel utilise un trampoline, les corps en mouvement, des projections vidéo et le piano pour explorer le thème de l'exil et de l'ouverture aux autres.

Yves Simard est l'auteur du scénario de Devant moi, le ciel, qui a été présentée cet automne à Toronto. Les pièces de la compagnie sont facilement «exportables», souligne-t-il, puisqu'elles contiennent souvent très peu de dialogues. «Avec Mur-mur, notre grand succès, on est allés six fois au Japon...»

Depuis qu'il a été nommé codirecteur de DynamO Théâtre en 2008, le metteur en scène désirait utiliser la «grammaire» particulière développée par la compagnie depuis 30 ans. «Notre matière première, c'est le corps, explique-t-il. J'ai travaillé en collaboration avec les interprètes, et quand j'ai senti que j'avais une structure qui se tenait, j'ai fait appel à l'auteur David Paquet comme conseiller dramaturgique. Il a plongé dans ce scénario, a posé beaucoup de questions. Ça a donné de beaux échanges qui ont été le ciment de la pièce.»

C'est ainsi que s'est développée l'histoire d'une jeune exilée assise sur un banc de parc, qui rencontrera une vingtaine de personnages dans des situations dramatiques ou plus amusantes. Derrière elle, un immense écran sur lequel le ciel est projeté, et qui se transformera selon l'action. «Il y a des voyages entre le passé et le présent, qu'on comprend bien grâce aux projections et aux éclairages.»

Yves Simard a aussi fait en sorte que la construction musicale appuie et complète l'histoire, avec de moments plus doux ou plus forts et des silences. «La musique est très importante puisque le personnage central est une ancienne pianiste. Alors j'ai voulu que la musique composée par Christian Légaré tourne uniquement autour du piano.»

Mais malgré l'enrobage, on peut tout raconter avec les corps, estime Yves Simard. «L'espace est comme notre feuille blanche. Ça nous demande de travailler avec une grande précision corporelle, de trouver comment avec de petits et de grands gestes on raconte l'histoire du personnage, que ce soit par un regard, une manière de tendre les bras, un salto. Mais il faut aussi doser entre le spectaculaire et la retenue, ménager ses effets.»

Et du spectaculaire, il y en aura. Après les escabeaux de L'envol de l'ange, c'est un trampoline installé entre deux bancs de parc qui donnera du mouvement à Devant moi, le ciel. «Le trampoline s'est vite imposé dans la scénographie. Je cherchais la suspension des corps et pour moi, c'était la clé, parce que ça permet de parler du ciel et de rejoindre les nuages.»

Loin du cirque

Même si les comédiens offrent une performance physique importante, leur travail reste dans l'ordre du théâtre et non du cirque. Les «nouveaux cirques» essaient aussi de créer des histoires, mais leurs spectacles tournent essentiellement autour de numéros ce qui n'est pas le cas chez DynamO. «Nous ne sommes pas dans la haute performance circassienne, nos interprètes viennent plus de la danse et du théâtre. La performance surgit de l'émotion et sert l'histoire, elle permet d'aller plus loin.»

Dans cette pièce qui s'adresse aux préados, Yves Simard a refusé l'esthétique trash qui leur est souvent proposée et a préféré créer un univers beaucoup plus poétique. Et il a eu envie de leur présenter une histoire mettant en scène des adultes plutôt que des enfants. «Je voulais sortir de la cour d'école. Les enfants sont tous les jours confrontés à des histoires d'adultes, ils en sont témoins.»

On ne connaît jamais vraiment les gens qu'on rencontre, et ce thème devrait nécessairement interpeller les jeunes, croit le metteur en scène. «Il y a des petits et des grands exils. On peut quitter son pays pour des raisons économiques, ou pour fuir une guerre, mais aussi être en exil de sa famille, comme la jeune fugueuse que rencontre le personnage.»

Mais au bout du compte, nous dit la pièce, «le ciel reste le même partout». «C'est un message d'ouverture à l'autre, d'égalité. C'est important à notre époque où on est constamment confrontés à l'étranger, une époque de guerres et de déplacements de population. Mais je ne parle pas que d'immigration, je parle aussi d'aller à la rencontre de gens de différents milieux, de faire se rejoindre les garçons et les filles... Il faut apprendre à se connaître.»

Devant moi, le ciel, à la Maison Théâtre du 16 au 26 janvier.