Si Pierre Elliot Trudeau a jadis déclaré que «l'État n'a pas d'affaire dans la chambre à coucher des citoyens», Nicolas Cantin estime que le théâtre y est à sa place: «J'aime montrer ce qu'on veut garder secret dans sa chambre à coucher, avance le créateur. C'est souvent le reflet de notre incapacité à vivre ensemble, à se dévoiler aux autres.»

Depuis 2009, cet artiste hybride (il a butiné entre le cirque, le théâtre et la danse) crée des pièces minimalistes qui exposent l'intimité du couple et la difficulté d'être soi en amour.

Sans fard ni artifice, un peu à la manière des photographies dures et bouleversantes de Nan Goldin - une influence importante du créateur scénique -, Nicolas Cantin ne désamorce jamais l'émotion dans ses oeuvres. «La vérité est beaucoup plus crue que ce que le théâtre nous montre en général», dit le metteur en scène.

En Europe, Cantin a travaillé l'art du clown, un apprentissage au cours duquel, selon lui, l'interprète perd ses inhibitions. «Le masque finit par révéler l'intérieur d'une personne. Mon but, c'est d'arriver à montrer une vérité, une part d'intimité, mais en faisant tomber les masques.»

On dit que son théâtre est exigeant, voire radical. «Radical? Peut-être. J'élimine tout ce qui est superflu, dit-il. Trop souvent, au théâtre, on sent le besoin de tout expliquer.»

À la manière d'un David Lynch, Cantin préfère travailler sur l'inconscient du spectateur. À trop nommer les choses, on les diminue, croit-il. «J'adore le côté voyeur au théâtre. Je veux donner le temps aux spectateurs de regarder, de faire un «zoom in» sur les interprètes et d'avoir l'impression de se voir en les observant. Comme si je leur disais: «Regardez, c'est vous qui êtes sur la scène»!»

Artiste en résidence à l'Usine C cette saison, Cantin y reprend trois récentes créations (Grand singe, Belle manière et Mygale), regroupées sous le titre Trois romances. L'Usine C présente les trois pièces à raison d'un spectacle par semaine, puis la trilogie au complet, en matinée, le 11 novembre.

Finalement, pour qualifier son théâtre, Cantin avance le mot «préhistorique»! «Un terme qui exprime mon désir de revenir aux sources, aux instincts primaires qui nous poussent à prendre des risques, à foncer.»

Le metteur en scène résume en trois mots ses thèmes de prédilection: «Amour, paillettes et mort». Aimer, briller et mourir. Le parcours d'une vie condensée en Trois romances.

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Grand Singe, jusqu'au 1er novembre; Belle manière, 2, 3, et 6 novembre; Mygale, 8 au 10 novembre; la trilogie Trois romances, le 11 novembre.