Les dishwasheurs marque le retour du collectif Momentum à l'air libre. Avec quatre «pur-sang»: Stéphane Crête, François Papineau, Jacques L'Heureux et Benoît Drouin-Germain.

La nouvelle création de Momentum marque d'abord le retour de Stéphane Demers, dont la dernière mise en scène avec le collectif remonte à 1999. Il avait alors monté l'une des 12 messes pour le début de la fin des temps - dans un autobus qui partait de Saint-Henri pour se rendre jusqu'à Westmount. «C'était devenu un running gag, nous dit le comédien qu'on peut notamment voir dans la série O', à TVA. On disait toujours que j'allais monter le prochain spectacle... mais ça n'arrivait jamais. Je n'ai pas ressenti le besoin de faire de la mise en scène. J'aime jouer, j'aime être dirigé par d'autres. Mais là, je me suis dit que je le ferais pour ma compagnie!»

Autre élément important: le choix du lieu. Depuis quelques années, toutes les pièces de Momentum ont été présentées dans des théâtres traditionnels: Playtime, de Céline Bonnier, Gaëtan de Marcel Pomerlo, Buffet chinois, de Jean-Frédéric Messier, Mycologie de Stéphane Crête ou encore Le salon automate de Nathalie Claude. Cette fois, Stéphane Demers invite les spectateurs dans un hangar des Ateliers Jean Brillant, dans le quartier Saint-Henri. Là où Sébastien Ricard a joué La nuit juste avant les forêts, il y a deux ans, sous la direction de Brigitte Haentjens. Les gens pourront rester debout, s'asseoir ou se déplacer, comme ils voudront.

«C'est un retour au théâtre in situ, détaille Stéphane Demers. C'est une formule que je préfère personnellement, même si ce n'est pas un sacerdoce de jouer dans un lieu non théâtral, ça dépend toujours des pièces. Le hasard a fait que depuis quelques années, on joue dans les théâtres. Je trouvais ce lieu-ci intéressant parce qu'on joue dans une toute petite partie de ce grand espace, un peu à l'image des personnages des dishwasheurs, qui auraient pu avoir accès à univers immense, mais qui ont décidé d'occuper une petite partie de cet univers dans la vie. De se concentrer sur une toute petite partie de leurs possibilités.»

Ces personnages, donc, ce sont des plongeurs, qui travaillent dans la cuisine d'un grand restaurant. Le récit des dishwasheurs, du dramaturge canadien Morris Panych (l'auteur de Vigile présentée au Rideau Vert l'an dernier), tourne autour de la faillite d'un courtier, forcé d'accepter ce petit boulot, au moins temporairement. Ce rôle-là sera défendu par Stéphane Crête. Le jeune homme sera accueilli plutôt froidement par deux plongeurs d'expérience, incarnés par François Papineau et Jacques L'Heureux. «Il n'est évidemment pas équipé pour faire ce travail, indique Stéphane Demers. Mais l'important, ce n'est pas de savoir s'il va survivre grâce à cet emploi. C'est sa transformation comme être humain qui importe. Et l'effet qu'il a sur les autres plongeurs.»

Stéphane Demers, qui a joué cet été à Toronto la version anglophone de La belle et la bête (de Michel Lemieux et Victor Pilon), a fait connaissance avec Morris Panych en 2006, à Vancouver, dans Waiting for Godot que Panych a adapté et mis en scène. Le dramaturge lui avait offert le rôle d'Estragon après l'avoir vu dans la série Trudeau, dans le rôle principal de l'ex-premier ministre. «Morris, c'est un peu le Michel Marc Bouchard du Canada anglais, il a écrit une vingtaine de pièces, il est joué un peu partout dans le monde, mais il n'avait jamais été joué ici avant Vigile», nous dit Stéphane Demers.

Les deux hommes sont devenus amis. Panych lui a remis plusieurs pièces. «Quand j'ai lu Les dishwasheurs, je me suis dit: «C'est celle-là que je veux monter.» La lutte des classes, l'homme face à son essence, ce sont des thèmes qui me rejoignent. Si j'avais le talent, j'aurais pu écrire cette pièce parce qu'elle s'inscrit dans mes préoccupations. Est-ce que nous sommes ce que nous faisons? La manière de faire ce que l'on fait a-t-elle une importance? Morris a une façon de passer par la comédie pour aborder des questions qui sont denses. J'ai tout de suite pensé à Stéphane Crête et François Papineau, qui ont une véritable chimie d'acteurs. Ils fouillent le texte, posent des questions. Avec Jacques et Benoît, nous avons réuni quatre pur-sang.»

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Les dishwasheurs, aux Ateliers Jean Brillant (661, rue Rose de Lima), du 26 septembre au 20 octobre.