Le Théâtre de Quat'Sous entame sa saison avec une troupe fraîchement formée par les finissants de l'École nationale de théâtre dans Le ventriloque de Larry Tremblay. Un spectacle que les jeunes acteurs ont bien rodé et qu'ils qualifient de vertigineux.

Il est rare que des étudiants en théâtre se fassent remarquer par le milieu dès leur premier exercice public. C'est ce qui est arrivé, il y a deux ans, lorsque le metteur en scène Éric Jean a monté Le ventriloque avec la classe de troisième année en interprétation de l'École nationale de théâtre du Canada. «C'était une classe assez exceptionnelle, explique le metteur en scène et directeur du Quat'Sous. Déjà, on pouvait voir que les élèves avaient tous une personnalité forte, un tempérament d'acteur et une belle assurance pour leur âge.»

En plus du talent des jeunes interprètes, le succès de la production s'explique par le choix de la pièce de Larry Tremblay, qui a suscité l'engouement dès sa création montréalaise par Claude Poissant en 2001, et qui a été traduite en huit langues. «Je cherchais un texte avec une notion de schizophrénie ou de dédoublement pour faire jouer 10 acteurs, explique-t-il. En relisant Le ventriloque, j'ai tout de suite décidé de travailler ce texte avec les étudiants! Car la pièce peut donner l'impression d'avoir été écrite pour 10 acteurs. En dédoublant les personnages, ça donne un autre souffle au texte de Larry.»

Tellement que le dramaturge, qui a vu et adoré la production étudiante, lui a confié que c'était comme si sa pièce avait été écrite pour 10 acteurs! Au dire de l'auteur, Le ventriloque est une «fable perverse» sur le thème de l'identité et de l'écriture. Une oeuvre à la structure complexe, où les scènes s'emboîtent les unes dans les autres.

Rattrapée par le jeu

Au début de la pièce, le ventriloque du titre donne la parole à une poupée adolescente. Elle se nomme Gaby et vient d'avoir 16 ans. Ses parents lui ont offert un stylo comme cadeau d'anniversaire. Dès qu'elle se met à écrire avec son stylo, la marionnette devient humaine... et tout ce qu'elle met sur papier se réalise. On voit apparaître ses parents et d'autres personnages qui sortent de l'ombre.

«Il y a un imaginaire très particulier» dans la pièce, dit Léane Labrèche-Dor, l'une des interprètes de la promotion 2012 qui fait son baptême professionnel dans un théâtre institutionnel. (Elle a été de l'aventure de La Roulotte, avec Peter Pan, cet été.) «On est à mi-chemin entre la réalité et le fantasme, le réel et le fantastique.»

Fille et petite-fille de comédiens (Marc et Gaétan Labrèche), la jeune actrice ne voulait pas toucher à ce métier, enfant. «Je voulais devenir archéologue. Puis, à 15 ans, par hasard, j'ai donné la réplique à une fille dans une audition au secondaire. Et ça m'a rattrapée! J'ai joué dans des pièces au cégep et je suis devenue junkie; je suis tombée dans l'enfer du théâtre. J'ai fait une année à Lionel-Groulx, avant d'être acceptée à l'École nationale.»

Qu'est-ce qui lui plaît dans ce métier? «Le plaisir de travailler en équipe - je suis une fille de gang - et d'avoir toujours un nouveau défi, que ce soit avec la construction d'un personnage ou d'une scène. Il y a quelque chose à apprendre tous les jours.»

Ah oui! Léane Labrèche-Dor a déjà monté sur scène une fois avec son père dans un numéro de cabaret: «On a chanté en duo des chansons incestueuses: Question de feeling, Je t'aime, moi non plus, Corps à corps avec toi...»

La comédienne ne rêve pas de jouer Elvire ou Lady Macbeth, mais plutôt «un agent secret dans une télésérie américaine avec des guns et des cascades». «Plus sérieusement, dit-elle, je pense que c'est la vie qui va m'amener des rôles. Je compte bien faire des projets personnels ou avec notre troupe, Le début de la fin. Avec des chums, on s'est donné pour mission de redonner ses lettres de noblesse au divertissement au Québec», dit celle qui a passé son enfance dans l'eau absurde.

«Mais je suis aussi passionnée par les tragédies. J'adore Andromaque. J'aime les extrêmes.»

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Le ventriloque, du 28 août au 1er septembre et du 11 au 15 septembre, au Théâtre de Quat'Sous.