On voit tous les jours, dans les journaux ou sur l'internet, des photographies ou des vidéos qui proviennent de pays en guerre: le Congo, le Liberia, le Soudan, l'Irak, l'Afghanistan, pour ne nommer que ceux-là. Mais rarement pense-t-on à celui qui les a prises. Et à ce qu'il a vécu ou ressenti. Encore moins aux cauchemars qui hantent ses nuits.

Photog, des Vancouvérois Jay Dodge et Sherry Yoon, s'intéresse justement à ces mercenaires de l'information qui risquent leur vie pour prendre des photos. Non sans conséquence. La pièce documentaire traite de leur difficile retour à la vie «normale», chez eux, dans des pays en paix, où les gens se marient, achètent des maisons, parlent du dernier match de hockey ou du FC Barcelone...

D'où leurs brefs passages «à la maison» et leurs retours précipités dans des théâtres de guerre ou de misère humaine, qui deviennent leur vie «normale».

Le personnage de Thomas Smith, interprété par Jay Dodge, a été construit en s'inspirant de l'expérience de trois réputés photographes interviewés par les créateurs: Farah Nosh, Michael Kamber et Tim Hetherington, mort le 20 avril dans l'exercice de ses fonctions en Libye. Le spectacle lui est d'ailleurs dédié.

Thomas est rapatrié d'Irak, où il se trouve en reportage, pour vider l'appartement dont il a été évincé. C'est le prétexte idéal pour nous raconter ses aventures, rencontres marquantes et autres réflexions sur le métier qu'il exerce. Un homme se fait battre par des miliciens; pendant ce temps, il filme. Mais combien de temps avant d'intervenir ou de filer?

Malgré le ton répétitif de ces récits, Jay Dodge incarne avec réalisme ce photographe-caméraman au sang froid, mais clairement perturbé par toutes les images qui peuplent son imaginaire.

Ce court spectacle documentaire est renforcé par un ingénieux procédé qui consiste à intégrer le comédien à l'intérieur des photographies projetées sur un immense écran placé à l'arrière-scène. Tel un témoin invisible, toujours près de ses sujets. On en ressort avec le sentiment d'avoir partagé une partie de l'intimité de ces anonymes solitaires, qui aimeraient voir les gens s'indigner un peu plus.

Ce soir, 19h, Cinquième Salle de la PdA. En anglais seulement.