Madame Louis 14 constitue un voyage dans le temps destiné à plaire à ceux qui s'intéressent au Grand Siècle et à l'aube des Lumières. La dame du titre fait en effet référence à madame de Maintenon, épouse secrète du Roi-Soleil, témoin privilégié de la cour de ce grand monarque et personnage à l'influence occulte que la famille royale, le peuple et même l'Histoire a longtemps accusé de bien des maux.

Lorraine Pintal, qui signe également le texte et la mise en scène, incarne d'abord une marquise de Maintenon âgée, à bout de souffle, qui revoit l'étonnant parcours que fut sa longue vie - elle est morte à 83 ans. Puis, se dépouillant d'une partie des lourdes étoffes qui la couvrent, elle redevient peu à peu la jeune Françoise d'Aubigné, née à la prison de Niort dans une famille désargentée, qui fut mariée à 16 ans («sans dot», précise-t-elle) à Scarron, un écrivain déjà vieux et handicapé.

Ce mariage lui répugnait, ne lui laissant aucune échappatoire. Il lui permit néanmoins de faires ses premiers pas dans le monde et, après la mort de son mari, elle devint la gouvernante des bâtards du roi. Ce rôle lui servi finalement de tremplin pour devenir la favorite du monarque et, bien qu'elle ne fut pas d'abord motivée par l'ambition, lui donna l'occasion de prendre sa revanche sur une époque où les femmes du commun n'avaient que peu de pouvoir sur leur destinée.

La finesse du spectacle de Lorraine Pintal tient notamment à son texte beau et ciselé, qui sait jouer sans lourdeur la langue de l'époque et donne le sentiment de voir de l'intérieur le règne du Louis le Grand. L'interprétation qu'elle en fait s'avère toutefois trop compassée, ce qui tend à éloigner l'émotion du personnage. Sa marquise de Maintenon possède moins de vivacité que de force tranquille.

Madame Louis 14 est ainsi plus une oeuvre de style que de sentiment, qui repose d'abord sur une ingénieuse mise en scène axée sur le langage du corps. Les déplacements calculés et codifiés, ainsi que les mille et un gestes d'une précision extrême posés par l'actrice confèrent à l'ensemble un air de cérémonial intime. Ils insufflent aussi un dynamisme nécessaire à la pièce, dont la bande son est manipulée en direct par Lorraine Pintal, sans en trahir le caractère solennel.

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Madame Louis 14, jusqu'au 30 avril au Rideau Vert.