Rendons à César ce qui revient à César. Le Nouveau théâtre expérimental (NTE), il faut l'admettre, a le secret de la sauce. Chacune de ses productions a le mérite de bousculer les conventions théâtrales tout en amorçant une réflexion intéressante sur, disons, les choses de la vie.

Après La fin, qui décrivait la fin d'une époque avec une espèce de glue qui se déversait sur scène et sur les comédiens et Sacré Coeur, qui nous mettait en scène dans une salle d'urgence, Daniel Brière et Alexis Martin en remettent avec Naissances, spectacle déambulatoire composé de cinq microreprésentations construit sur le thème de la naissance.

L'idée n'est pas banale, l'expérience du spectateur encore moins. Dès le départ, cinq groupes d'une vingtaine de personnes sont formés. Chaque groupe se rend à une «station» pour une courte représentation de 10 à 15 minutes. Puis, tout le monde se déplace. Cinq fois. Ce qui veut aussi dire cinq représentations par comédien. Dans des lieux aussi étranges que les toilettes d'Espace libre...

Le résultat est surprenant, parfois même déroutant, mais aussi inégal.

Catherine Vidal tire le meilleur parti de ce format court avec son spectacle-installation, qui narre les aventures d'un petit garçon (Joseph) avec une tache de naissance sur le visage; tache qu'il affectionne et qui finira par disparaître... à son grand dam. S'ensuit une quête absurde pour retrouver cette tache, qui le mènera à rencontrer rien de moins que Joseph Staline et le compositeur Joseph-Maurice Ravel...

L'action se passe successivement dans neuf petites boîtes en bois accrochées au mur - inspirées des assemblages de l'artiste américain Joseph Cornell -, à l'intérieur desquelles de petits personnages sont manipulés par la comédienne cachée à l'arrière. La narration (préenregistrée) nous mène ainsi de boîte en boîte dans une savoureuse historiette à double sens.

Gary Boudreault y va d'un sympathique monologue sur la naissance du monde et de l'être humain, avec une interprétation disons toute personnelle du Big Bang. Assis dans une chaise berçante, tel un vieux raconteur, il parvient dans son récit échevelé à parler de la place de l'acteur dans la société, «vecteur de l'esprit et de l'évolution». Le tout ponctué de petits numéros chantés et de petits airs grattés sur son ukulélé.

Les autres numéros ont aussi leurs qualités. Je pense à Stéphane Demers, qui nous transporte sur une plage dans un spectacle-poème (sans paroles) empreint de mysticisme; Francine Alepin, dont le costume devient le décor de sa propre histoire méditerranéenne, avec de petits personnages qu'elle promène sur son corps, jolie métaphore de la terre de ses ancêtres; ou encore de Simon Boulerice, dans un numéro dansé qui fait le récit d'une rencontre naissante, qui se terminera en queue de poisson.

Mais à la fin de toutes ces «improvisations» sur le thème de la naissance, qu'est-ce qui relie ces parcelles d'histoires ou ces tranches de vie? Justement pas grand-chose. Remarquez, ce n'est pas obligé. L'intérêt de Naissances est aussi dans sa fragmentation. Alexis Martin et Daniel Brière accouchent de quintuplés en santé. Mais n'espérez pas leur trouver des ressemblances.

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À l'Espace libre jusqu'au 18 décembre.