Ils sont nombreux les acteurs québécois qui se sont frottés au mime en faisant leurs classes auprès de Jean Asselin et Francine Alepin chez Omnibus. François Papineau est l'un de ces spécimens. La Presse l'a rencontré à quelques jours de la création de L'amour à trois, de Larry Tremblay, sur la scène d'Espace Libre. Il nous a parlé de mime, de décadence et du défi de composer un triptyque qui parle d'amour et de son complice, Éros.

«Le mime permet à ceux qui en font ou en ont fait d'avoir une conscience globale, sur la scène. Pour jouer, ce n'est pas de l'humilité que ça prend, mais de la rigueur, de savoir que dans le moment de «creux», il faut être vivant et pas juste attendre sa réplique», exprime François Papineau.

Pour ce collage de trois courtes pièces de Larry Tremblay, le polyvalent acteur prête son instrument de travail à trois metteuses en scène (Francine Alepin, Caroline Binet et Marie-Ève Gagnon.) L'année dernière, Jean Asselin avait demandé à trois mecs (Réal Bossé, Pascal Contamine et Christian LeBlanc) de faire une création en trois temps, sur le même concept. Cela avait donné Rêve, chimère et mascarade. Mais pour la version «yin» de la chose, le trio féminin souhaitait appuyait sa mise en scène sur une dramaturgie.

«Elles avaient envie de partir d'un matériau de base. Jean Asselin avait dans ses tiroirs trois textes de Larry Tremblay, d'époques et de styles différents, qui avaient d'abord été créés pour la radio. Le sujet de l'amour était présent dans chacun d'eux et plusieurs éléments permettaient de les entremêler. Les filles se sont réparti les pièces et ont fait leur casting.»

Bouge de là!

Trois pièces de Larry Tremblay, donc, qui sont campées dans autant d'époques. La femme au peuplier est une fable qui prend place dans les années 50, Tibullus, qui s'inspire de la tragédie romaine, est située dans la décadence des années 80. La troisième, Cornemuse, a comme cadre les années 2000, pour raconter les amours «extrêmes» de deux jeunes assoiffés. «Ça donne trois petits objets étranges. L'écriture de Larry Tremblay est très intéressante. Sous une allure réaliste, se cachent plusieurs niveaux de symbolisme. Notre travail est de gratter pour révéler le plus d'éléments possible et créer un objet en trois dimensions.»

Et le mime, dans tout ça? «Ce spectacle donne beaucoup de place au corps. Pousser l'aspect physique amène une super dimension à la dramaturgie», exprime François Papineau, tout en précisant que les acteurs de L'amour à trois «ne jouent pas comme des mimes». «Un show qui serait fait par des mimes purs serait une tout autre affaire. On est plutôt dans une sorte d'exploration physique, qui ne sert pas à brouiller les pistes mais, au contraire, de rendre les choses plus claires.»

Pour François Papineau, la maîtrise du mime apporte au jeu des attitudes physiques qui permettent de traduire des impressions et des intentions très clairement avec le corps. «Moi, ça ne me dérange pas de ne pas avoir de texte dans une scène. Au contraire, j'aime ça pouvoir sentir que je dois me concorder avec ceux qui parlent. Avec Omnibus, une grosse partie de mon apprentissage a été de comprendre que même en silence, il faut oser prendre la place et ne pas avoir peur de déranger. Avec le temps, c'est devenu intuitif pour moi, comme faire des gammes ou conduire une auto.»

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L'amour à trois, de Larry Tremblay, mise en scène de Francine Alepin, Marie-Ève Gagnon et Caroline Binet, une production de mime Omnibus, du 4 au 22 mai à Espace Libre.