Deux années passées en résidence à la salle Jean-Claude Germain du Théâtre d'Aujourd'hui n'auront pas seulement permis au Théâtre Debout de mener à terme deux créations, mais aussi de se faire remarquer.

Hôtel Pacifique, créée au printemps 2009, avait récolté sa part d'éloges. Enquête sur le pire, à l'affiche jusqu'au 8 mai, mérite à son tour un bouquet de compliments.

L'investigation à laquelle renvoie le titre de la nouvelle pièce de Fanny Britt n'a rien à voir avec celles que mènent la police. Il s'agit plutôt d'une exploration en profondeur, à la fois caustique et compatissante, des ravages causés par une rupture amoureuse chez une personne prédisposée à l'angoisse et au désespoir.

Dans une moindre mesure, c'est aussi un regard posé sur le coup de foudre, la dissimulation et la vengeance.

Élisabeth (Johanne Haberlin), animatrice et productrice que son entourage appelle Bébé (surnom inutilement infantilisant pour un personnage déjà fragile), se complaît dans la peine et l'isolement depuis le départ de son mari, Paul (Steve Laplante). Raymond (Christian Bégin), son agent, a beau tenter de la secouer, elle n'acceptera d'entrevoir la lumière au bout du tunnel qu'au contact répété d'Illeana (Alexia Bürger), une jeune immigrante roumaine radieuse comme un jour ensoleillé.

Enquête sur le pire ne se démarque évidemment pas par l'originalité de son synopsis. Or, de cette trame banale, Fanny Britt tire une histoire d'une grande humanité, ponctuée de réparties grinçantes, et tricotée avec autant d'ironie que de nuance. Un bon texte, donc, servi par une distribution juste et convaincante qui, outre les comédiens déjà cités, compte également sur la présence discrète mais délicieuse de Josée Deschênes.

Geoffrey Gaquère signe un spectacle d'une grande simplicité, avec des jeux d'éclairages et quelques images projetées pour tout artifice. Le jeu des comédiens prime et sa direction d'acteurs est presque sans faille. Seuls quelques rares détails détonnent, comme cette gifle que Paul donne à Élisabeth (cliché qu'on dirait sorti d'un film français). Le doigté du metteur en scène ne l'empêche toutefois pas de rater la scène finale, qui se veut ouverte, mais s'avère surtout confuse en raison du trop grand nombre d'éléments juxtaposés.

Mais cette fin en queue de poisson ne pèse pas bien lourd dans la balance étant donné les trouvailles du texte et les performances d'acteurs. Puisque tous les personnages possèdent un côté sombre et un côté lumineux, ils doivent faire preuve d'une grande mesure pour lier ces contraires. Alexia Bürger est par exemple d'une transparence émouvante, tant dans l'émerveillement que la bonté intéressée, alors que Christian Bégin campe à merveille l'agent affectueux sous son masque de cynisme.

Jusqu'au 8 mai à la salle Jean-Claude Germain.