Deux frères. Un même père. Chacun étant la somme des choix qu'il a faits... ou qu'il n'a pas faits depuis son arrivée dans le monde adulte. Ce monde-là même auquel aspire cet ado de 15 ans, toujours un enfant pour son père, déjà un homme pour son oncle sans enfants. Conflit. On n'est jamais plus «entre deux âges» qu'à l'adolescence.

Deux frères à Westmount. Conflit d'argent: l'un en a, l'autre en a besoin. On ne sait rien de leur père sinon qu'il est vieux. Le ti-cul, lui, aime jouer au poker sur l'internet. Gros.

Deux frères à Mosul, en Irak. Conflit d'honneur ou de l'idée (fausse) que les hommes peuvent s'en faire. On sait tout de leur vieux père sauf le lieu où se terre l'homme le plus recherché du monde: Saddam Hussein. Son petit-fils, ici, aime jouer à la guerre dans la rue. L'ennemi, lui ne joue pas.

Fatherland, sa première oeuvre dramatique, a valu au comédien Arthur Holden le premier prix du concours Write-on-Q (prononcé kiou) d'Infinitheatre. Qui en a fait sa deuxième création originale de 2010, dans une mise en scène de Guy Sprung.

La construction - deux histoires parallèles jouées par les mêmes acteurs dans le même décor - s'avère efficace dans sa simplicité, nous rappelle que, nonobstant les circonstances, le drame humain se réduit à quelques trames de base. Petite vie, grosses chicanes.

Fatherland prend sa force dans le rythme des échanges entre les protagonistes - Holden a dû être percussionniste dans une autre vie - rythme d'alternance entre les deux histoires. L'issue de l'une fait déjà partie de l'Histoire - Oudaï et Qoussaï Hussein sont morts ensemble le 22 juillet 2003 - tandis que la fin de l'autre... Excusez, on frappe à la porte.

Le rythme donc... Howard Rosenstein n'a aucune peine à le maintenir. Peut-être parce que ses personnages, Victor le gambler et Oudaï le psychopathe, s'en contrefoutent! Plus difficile pour Neil Napier: on dirait que la pression qui s'exerce sur Joe le comptable et Qoussaï le pleutre nuit à la précision de leur expression.

De plus, le mouvement scénique le place souvent dos au public. Quant au jeune Dylan Gouze, il se souviendra que Fatherland l'avait déchiré entre le devoir et...

La porte! Ça cogne!

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Fatherland, en anglais au Bain Saint-Michel jusqu'au 28 mars.