Le Théâtre L'instant se sert du roman de Gustave Flaubert, Madame Bovary, pour construire le personnage d'Emma, une femme d'aujourd'hui que l'on voit à différents âges, en réaction totale à la société dans laquelle elle vit. Justement, à la manière de la Emma Rouault imaginée par Flaubert au XIXe siècle.

Écrit par le Belge Dominique Bréda, Emma est interprétée par Enrica Boucher (Le procès, Un peu de tendresse, bordel de merde) qui nous entretient, seule sur scène, de ses rêves, ses déceptions et sa solitude.

La comédienne, qui fait des allers et retours dans le temps, maîtrise suffisamment bien le texte pour nous attirer dans la toile de sa vie, qu'elle tisse avec lenteur, tantôt avec candeur, tantôt dans la colère et la révolte. Avec les multiples visages des personnages qu'elle incarne.

La Emma d'un an et demi nous fait sourire; celle de 17 ans, un peu rebelle, qui refuse de lire «un vieil auteur» comme Flaubert, nous intéresse; mais ces préliminaires prennent beaucoup de temps. Et la mise en scène d'André-Marie Coudou est si minimaliste qu'on se demande où tout ça va nous mener.

Heureusement, la Emma de 40 ans nous ramène dans l'arène et parvient à nous recentrer sur le propos de l'auteur: la quête du bonheur. Et notre perpétuelle insatisfaction qui en découle.

Sa critique de notre société de consommation où pullulent les marchands de bonheur (Wal-Mart, le père Noël, IKEA, Fabienne Larouche (!), etc.) est drôle et percutante. Sa présence est alors plus forte que dans les scènes précédentes.

Sa brève projection dans la peau d'une Emma à la fin de sa vie, dans un hôpital où elle est confrontée à sa solitude, est touchante. Et nous donne à réfléchir, en fin de compte, sur ces choix que l'on peut faire dans nos vies, avant qu'il ne soit trop tard.

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Emma dans la petite salle du Théâtre Prospero jusqu'au 30 janvier