C'est sous la pluie que s'est terminé, hier, le cinquième rendez-vous culturel des moins de 6 ans. Une présentation de plus de 20 spectacles, avec presque autant d'ateliers d'initiation au théâtre, à la danse et à la musique, des projections de films, une exposition et la traditionnelle fête de la famille dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, hôte de cette fête culturelle unique à Montréal, qui a attiré un peu plus de 15 000 visiteurs au cours des 10 derniers jours.

Les familles montréalaises ont encore une fois répondu à l'appel des Petits Bonheurs, plus de 15 000 personnes selon le directeur et programmateur du festival, Pierre Larivière. C'est une hausse d'environ 2000 personnes par rapport à la présentation de l'an dernier, et plus du double par rapport à la première année!

Mais en dépit du succès sans cesse croissant des Petits Bonheurs, leur financement demeure incertain, et l'équipe de Pierre Larivière ne peut déjà plus compter sur l'appui du Conseil des arts de Montréal. Un bilan s'impose donc avant de relancer les préparatifs de la sixième mouture...

«Nous avons beaucoup d'idées pour les prochaines présentations, nous dit Pierre Larivière. Nous voulons étendre les Petits Bonheurs à Laval, Québec et Sherbrooke, mais il va falloir se demander si on est en mesure de continuer. On tient ce festival-là à bout de bras, mais pour combien de temps, je ne sais pas.»

Le premier objectif de Petits Bonheurs, faut-il le rappeler, est de rendre accessible la scène culturelle aux tout-petits qui n'en n'ont ni l'habitude ni les moyens. Plus de la moitié des billets ont été offerts aux écoles et aux CPE du quartier Hochelaga-Maisonneuve grâce au programme L'école montréalaise (financé par le ministère de l'Éducation). Les autres billets étaient vendus 6 $ chacun.

La programmation

Mais revenons à la programmation du festival. Plusieurs pièces étaient des reprises, nous l'avons déjà dit, mais de grande qualité. Je pense surtout au Bain et à La couturière, de Jasmine Dubé, à l'excellente pièce Pekka, d'Isabelle Payant, et à L'ombre de l'escargot, vue aux derniers Coups de théâtre. À classer dans les valeurs sûres qu'il fait bon revoir.

Parmi les nouveautés, on ne peut passer à côté des Sages fous, une compagnie de Trois-Rivières (peu connue au Québec) qui promène depuis six ans ses deux pièces Parade Issimo et Bizzarium en Europe et en Asie. Parade Issimo a vraiment fait un effet boeuf avec ses marionnettes et ses masques, son théâtre en mouvement, ses personnages fantasques et carnavalesques. À retenir.

Pour les 4 à 6 ans, deux coups de coeur: Baobab, du Théâtre Motus, un conte musical dans la tradition des griots d'Afrique (sur fond de kora et de balafon). Autre découverte: Le rêve de Pinocchio, du Théâtre de Sable, qui proposait un décor et une scénographie ingénieux et une histoire originale, où Pinocchio décide de sortir de son histoire... parce qu'il en a marre de jouer toujours le même rôle. Et part à la recherche du Petit Chaperon rouge, qu'il rêve de rencontrer.

Pour les moins de 3 ans, deux pièces ont vraiment attiré l'attention de l'humble critique et de ses deux garçons, à commencer par Bach... à sable, qui a mis un peu de temps avant de décoller mais qui a soufflé les jeunes spectateurs lorsque les deux interprètes se sont mises à l'oeuvre, l'une en jouant au violoncelle la musique de Bach (le compositeur) et l'autre en dansant dans des volutes poussiéreuses de sable, lancé à pleines mains dans les airs.

La nouvelle création de Bouches décousues, Marguerite, visait les tout-petits de 18 mois. Jasmine Dubé a fait le contraire d'à peu près tout ce qu'on voit dans les spectacles pour bébés... et gagné son pari. D'abord en dirigeant pas moins de cinq comédiens; ensuite en proposant une pièce à texte. Qui passe très bien. Joël Simon, programmateur du festival Méli'Môme (à Reims, en France), a déjà invité Bouches décousues à présenter sa pièce en France l'an prochain.

D'autres pièces, bien sûr, ont marqué l'imaginaire des enfants: Uccellini, Circus, Un orteil dans le vide, Le spectacle de l'arbre et j'en passe (l'espace me manque), mais souhaitons d'abord et avant tout à l'équipe de Pierre Larivière d'obtenir le soutien nécessaire pour continuer sa grande oeuvre, celle d'ouvrir les salles de spectacle à tous les enfants, qu'ils soient bien nantis ou non, et de leur donner le goût de la culture.