La saison de théâtre s'achève. Un automne plus que satisfaisant, qui a confirmé une effervescence du théâtre québécois, qui s'est mobilisé et solidarisé contre les coupes en culture. Il y a bien sûr eu cette rentrée qui a ébloui tout le monde, avec Seuls de Wajdi Mouawad (au Théâtre d'Aujourd'hui), Nebbia du Cirque Éloize (au TNM) et la mise en scène d'André Brassard de Oh les beaux jours! (à l'Espace GO.)

Des feux d'artifice, ces trois productions, pour ouvrir la saison. Mais les semaines subséquentes nous ont aussi réservé de très beaux moments. Le pensionnat de Michel Monty, par exemple, qui a réuni de très jeunes garçons amérindiens, sur la scène d'Espace libre, pour nous raconter la terrible histoire vraie de l'acculturation des autochtones dans les pensionnats religieux. Après la fin, à La Licorne (en octobre), pièce anglaise portée par les électrisants Maxim Gaudette et Sophie Cadieux. Les Rencontres internationales du mime (à l'Espace libre), une rafraîchissante incursion dans une forme d'art où toutes les audaces sont permises.

 

Il faudrait aussi parler de Bob, «spectacle événement» qui a souligné les 40 ans du Théâtre d'Aujourd'hui. Plus d'un mois après la première de cette drôle de bibitte de quatre heures signée René-Daniel Dubois, je continue d'en entendre parler. Certains ont détesté, ont trouvé ça complaisant, psychanalytique à mort. D'autres ont crié au génie, louangeant la densité du texte de RDD. Ce que j'en retiens, c'est qu'on se questionne encore sur la pertinence, la forme, l'intérêt de la chose. Personnellement, j'adore qu'une oeuvre ne fasse pas l'unanimité. C'est le signe que le public ne dort pas au gaz.

D'autres temps forts? Opium_37, la pièce qu'Éric Jean avait programmée pour l'ouverture du nouveau Quat'Sous. Les nouveaux murs n'ont pas été prêts à temps. Mais l'itinérance réussit bien à Éric Jean, qui a construit un magnifique tableau inspiré de Georges Brassaï. En même temps, à l'Espace GO, la divine Dulcinée Langfelder (avec La complainte de Dulcinée) a réussi le tour de force de créer un spectacle aussi touchant et original que Victoria, pièce qui l'a fait voyager partout dans le monde.

Une saison riche, intéressante et ouverte sur le monde, qui s'achève. Pour conclure, le dernier mot revient aux Éternels Pigistes, qui proposent demain une émission spéciale sur le théâtre qui s'annonce pour le moins divertissante. T pour Théâtre, un docufiction d'une heure trente, imaginera un monde où le théâtre québécois est une forme d'art non seulement adorée du public, mais aussi étudiée et admirée partout sur la planète.

Fiction ou réalité? Un peu des deux, j'imagine. Dulcinée Langfelder, Michel Tremblay, Wajdi Mouawad, tout comme Robert Lepage et Denis Marleau, font passer cette utopie pour une réalité.

Mais bon, toutes les saisons ne sont pas aussi riches que celle que nous venons de vivre. Le public montréalais, très enclin à ovationner tout ce qui monte sur scène, a parfois le siège un peu trop éjectable au théâtre. Or, l'automne qui s'achève mérite pleinement une bonne main d'applaudissements et qu'on lui lève notre verre. Tchin-tchin, théâtre!