C'est en se glissant dans la peau de son personnage colérique et décalé que François Bellefeuille a réussi à séduire plus de 300 000 Québécois avec son premier spectacle solo. Mais c'est dans un registre beaucoup plus personnel que l'humoriste a choisi de faire son retour avec Le plus fort au monde.

La paternité peut changer bien des choses. Devenu papa à deux reprises au cours des deux dernières années, François Bellefeuille a dû apprendre à dompter son perfectionnisme pour préserver sa vie de famille tout en écrivant son nouveau spectacle teinté par sa nouvelle réalité.

«Le plus dur, c'est de devoir travailler dans une fenêtre! Mon temps est calculé: mes journées commencent à 9 h pour que je puisse m'occuper de mes enfants et je dois être de retour à la maison à 16 h. D'un autre côté, ça me permet de traiter un peu mon perfectionnisme. J'ai longtemps pensé que c'était une qualité, mais je n'y crois plus. Mon psy me l'a aussi fait comprendre.» 

«La première est le 30 et je me disais encore hier que je n'y arriverais pas. Je vais travailler toutes les fenêtres que j'ai et je me rendrai là où je serai rendu. L'important, c'est que mes enfants soient en santé et que je n'aie pas la gastro la veille de la première!»

Au-delà des problèmes d'horaire, la paternité a surtout poussé François Bellefeuille à s'éloigner du personnage qui l'a fait connaître. Intitulé Le plus fort au monde, notamment en référence à la façon dont il se sent quand il fait sauter son fils Milo dans les airs, ce nouveau spectacle de l'humoriste nous laisse entrevoir sa vraie nature.

«C'est un peu le même personnage, mais plus mature. À mes débuts, il était très colérique et très loin de ce que je suis vraiment. On dirait qu'avec le temps, il se rapproche beaucoup plus de moi», explique l'humoriste. 

«Mon show aurait sans doute été moins intéressant pour les gens si je n'avais pas eu mes enfants. Ils me font revivre des choses de la vie que je ne voyais pas, confie-t-il. Au lieu d'être devant mon ordi et de penser à ce qui pourrait être intéressant, je me sers de ce qui se passe vraiment dans ma vie.»

Plonger dans le passé

S'il évoque son couple et sa vie de famille dans ce nouveau spectacle, François Bellefeuille n'hésite pas non plus à plonger dans son passé grâce à la projection d'une série de photos. Un moment savoureux, qui, au-delà de l'efficacité comique, nous en fait découvrir un peu plus sur l'humoriste pour qui l'autodérision est une arme de prédilection pour combattre ses démons.

Aux prises avec des problèmes de poids à son adolescence, le jeune homme a tenté sa chance en tant que vétérinaire aux États-Unis, où il est reparti à neuf et a perdu 60 livres en quatre mois.

«À un moment donné, j'ai été ben gros et ça a scrapé ma vision de moi-même. Je m'aime, mais je déteste mon corps ! J'ai été tellement gros que ça m'a empêché d'avoir des relations saines avec les filles, jusqu'à ce que je trouve ma confiance ailleurs. Aux États-Unis, avec mon petit accent francophone, c'est comme si j'étais spécial. J'ai arrêté de manger. J'étais fou et j'allais au gym tous les jours. J'ai perdu du poids tellement vite que j'ai perdu ma masse musculaire. J'avais l'air malade, ça n'avait aucun bon sens», lance François Bellefeuille.

«C'est là que j'ai développé autant d'autodérision. Si j'avais été parfait, je serais beaucoup moins divertissant. Il a fallu que je développe le côté humoristique, que je sois créatif pour me rendre intéressant», ajoute-t-il.

Donnez, vous recevrez

Si certaines personnalités publiques préfèrent préserver leur vie privée, François Bellefeuille a choisi de partager les premiers moments de la vie de son fils avec Accès illimité, puis a parlé pour la toute première fois de la schizophrénie de son père à l'émission La vraie nature.

«Ça m'aide quand les gens en apprennent plus sur moi, car ils ont moins l'impression que je suis le personnage de scène. J'ai vu une différence quand j'ai eu mon premier enfant: ma popularité a augmenté soudainement. Les gens ont commencé à se dire que j'étais une bonne personne! Les gens ont besoin de s'assurer que tu es une personne ordinaire pour t'aimer», lance François Bellefeuille, qui a offert les profits de ses sept spectacles de rodage lavallois aux Impatients, organisme qui vient en aide aux personnes atteintes de problèmes de santé mentale par le truchement des arts.

«J'ai toujours été un livre ouvert sur plein d'affaires. Mais mon père, je n'en parlais pas publiquement. J'avais commencé à m'impliquer auprès des Impatients et j'étais tanné de ne pas pouvoir parler de lui quand j'évoquais mon passé. Alors j'ai dit oui à La vraie nature

«Je ne suis pas mère Teresa. J'ai souvent donné dans ma vie et ça m'a souvent servi. C'est la même chose que pour le Club des petits-déjeuners. J'avais reversé 2 $ par billet vendu. Ça avait fait une super bonne pub et ça m'a coûté presque 60 000 $, mais j'ai vendu beaucoup de billets! C'est donnant-donnant dans la vie», conclut François Bellefeuille.

On verra l'humoriste sur les scènes du Québec toute l'année. Après deux représentations au Théâtre Maisonneuve fin janvier, il reviendra à Montréal, à l'Olympia, les 2 et 3 février et les 30 et 31 mars.

Photo Edouard Plante-Fréchette, La Presse