Le beau gosse de l'humour québécois est de retour avec un sixième spectacle, Un peu princesse, dans lequel il fait moins de révérences à son public et dévoile ses vilains défauts. Plus de 100 000 billets ont déjà été vendus en France et au Québec, mais toujours revient cette royale angoisse propre aux humoristes, que l'expérience n'apaise jamais.

Ça fait longtemps que Stéphane Rousseau vit entre la France et le Québec, et c'est fort d'une centaine de représentations dans l'Hexagone qu'il arrive à Montréal pour la grande première d'Un peu princesse. Mais les «premières», il déteste ça, et le trac est pire qu'avant.

Maintenant à son sixième spectacle, Rousseau avoue que le métier a beaucoup changé. «Il y a beaucoup plus de promotion, on veut toujours faire des entrevues et des photos originales, et la relation avec les fans a changé. On passe beaucoup de temps à faire des selfies.» La rançon de la gloire, en somme, lorsqu'on accède à la royauté dans son domaine.

Voilà peut-être pourquoi il a eu envie d'un retour aux sources du stand-up. «C'est très bien, l'expérience, mais on perd un peu de sa naïveté», estime Rousseau.

Dans sa carrière, l'humoriste a beaucoup joué la carte du performeur, voire du séducteur. Pour ce nouveau spectacle, il revient au micro à la main, après avoir longtemps utilisé le micro-casque. Une façon différente de bouger, donc, d'autant plus qu'une partie musicale très rock l'accompagne.

Rousseau a aussi eu envie de montrer son côté plus abrasif, puisqu'on lui a souvent dit qu'il était plus drôle dans sa vie privée que sur scène. «Comment ça se fait que je n'étais pas capable de retrouver en show ce naturel plus corrosif que j'ai à la maison? Sur scène, j'étais plus politiquement correct, j'avais peur de déplaire aux madames et aux enfants, mais, un moment donné, il faut que tu choisisses ton camp.

«Tu ne dois pas avoir peur de rétrécir ton auditoire, peut-être, pour frapper plus fort, être plus authentique dans ta démarche plutôt que d'être juste gentil et sympathique.»

C'est entre autres dans son rôle de père qu'il se découvre un esprit de compétition, espérant que son fils soit plus téméraire que lui, surtout dans les sports. «J'aborde le sujet des attentes des parents envers leurs enfants. Tsé, la fierté du père au parc... Mais je n'étais pas bon dans les sports et je constate que la pomme n'est pas tombée loin de l'arbre!»

Spectacle rebaptisé

En France, le spectacle s'intitulait Rousseau brise la glace, le mot «glace» répondant bien aux clichés de la neige et des caribous qu'affectionne le public français. Au Québec, il a été rebaptisé Un peu princesse, un titre que l'humoriste trouve plus drôle. Parce qu'il l'est, un peu princesse, immanquablement tiré à quatre épingles et soucieux de son apparence.

«Au Québec, on a toujours su que j'étais comme ça. Pas précieux, mais disons que, pendant une période, j'étais métrosexuel. Je montrais, plus que bien d'autres, mon côté féminin sur scène et je pense que c'est pour ça que j'ai toujours plu aux femmes. Mais j'avoue que dans ce show-ci, je suis plus macho que jamais.»

«J'ai deux côtés: un timide, sauvage et renfermé et l'autre plus exubérant, qui n'a peur de rien. Je ne sais jamais lequel va se lever le matin», ajoute-t-il.

Rousseau croit que les gars vont davantage trouver leur compte dans ce spectacle que dans ses précédents. «Je parle de mes défauts. Je peux être un peu con, des fois, manquer de compassion et d'écoute. Et ça va m'amener des échecs amoureux. C'est un peu le bilan de ma connerie.»

La rupture est un sujet important, puisqu'elle lui est arrivée pendant qu'il écrivait le spectacle. L'an dernier, l'humoriste s'est séparé de la comédienne Reem Kherici, après une relation de quatre ans. Ils ont joué au cinéma ensemble et ont animé la pimpante émission Sur invitation seulement (qui reviendra l'an prochain, mais sans Kherici).

«L'accouchement de ce spectacle a été difficile. C'est rare que les gars parlent de peine d'amour et de séparation, note Rousseau. Ça prend du temps, souvent, pour pouvoir se moquer d'une blessure, selon la profondeur de la cicatrice. J'essaie d'utiliser toutes les expériences de ma vie et de les transposer. Il y a un côté thérapeutique là-dedans; ça permet de faire mon deuil. Cette séparation, j'ai réussi à en parler tout de suite, même si j'étais vraiment blessé par la situation.»

Ce spectacle, il l'a malgré tout voulu plus léger et cette légèreté n'a pas été la chose la plus facile à retrouver - heureusement, il est allé chercher l'aide de son personnage de latin lover, l'insistant Rico. C'est que Stéphane Rousseau a été durement éprouvé dans sa vie, ayant perdu sa mère, son père et sa soeur, ce qu'il a abordé dans ses textes. Il croit que ces pertes ont quelque chose à voir avec sa peur de l'engagement.

«Le sentiment d'abandon est quelque chose qui m'a toujours suivi. On se garde toujours une porte de sortie pour ne pas se faire trop mal, pour se protéger. Je pense que je suis comme un petit gars; c'est très enfantin, comment je fonctionne. J'ai le sentiment de m'améliorer... mais lentement!» L'amour, il y croit encore, et l'humour l'aide toujours.

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Au Théâtre St-Denis du 22 au 25 avril, et en tournée partout au Québec. Info: stephane-rousseau.com/qc