C'est devenu, au fil des ans, un spectacle de cirque à part entière, et même assez couru du public. Près de 20 000 spectateurs annuellement. Un spectacle qu'on ne peut réduire à un simple showcase de finissants, tant le résultat est époustouflant.

C'est maintenant un secret de Polichinelle, et de nombreux recruteurs et programmateurs assistent volontiers aux deux spectacles annuels de ces jeunes performeurs frais émoulus de l'École nationale de Cirque, qui sont rapidement employés un peu partout dans le monde au terme de leur formation de trois ans.

Les numéros des interprètes sont en effet tellement bien exécutés qu'ils n'ont à peu près rien de «scolaire». À preuve, les finissants de 2009, Rosalie Ducharme et Louis-David Simoneau, recrutés à leur sortie de l'École par le Cirque du Soleil pour présenter leur numéro de trapèze dans le spectacle Totem.

Le spectacle Pomme grenade, qui réunit la moitié des finissants de cette année (l'autre moitié participant au spectacle Messa, que nous n'avons pu voir), s'inscrit dans cette tendance, même si le thème, «un déserteur visité par ses souvenirs d'enfance», est plus ou moins bien rendu.

La mise en scène de Marie-Josée Gauthier réunit habilement les dix interprètes, qui nous en mettent plein la vue dans ces joutes acrobatiques collectives qui se suivent à un rythme étourdissant. Avec des effets miroir tout à fait réussis. Comme ces sauts au trampoline des uns qui répondent aux sauts sur perche des autres.

Il y a bien quelques numéros solos (comme le numéro de cerceau aérien d'Alexandra Royer qui clôt le spectacle), mais la plupart du temps, les numéros se chevauchent, s'entrecroisent et se relaient au son de la musique, entraînante, qui inclut une chouette version arabisante de Rock the Casbah, interprétée par Rachid Taha.

Du numéro d'équilibre frisant la perfection de Louis-Marc Bruneau Dumoulin à celui, sympathique, du vélo, en passant par le très beau numéro de tissu aérien d'Anna Kichtchenko et aux sauts sur planche coréenne (d'Ugo Dario et Maxim Laurin), nous sommes face à des artistes en pleine possession de leurs moyens.

Seule réserve, cet univers guerrier caricatural où vont et viennent soldats et sergents, avec des références nébuleuses au printemps arabe. Et, bien sûr, notre déserteur rêveur au milieu. Tout cela nous apparaît bien plus comme un prétexte idéal aux choix de costumes et numéros (dont celui, impressionnant de manipulation de boîtes d'Eric Bates).

C'est bien de trouver une métaphore, mais encore faut-il donner un sens à toutes ces images et tous ces symboles, ce qui n'est pas le cas ici.

Note infra Pomme grenade et Messa sont présentés en alternance jusqu'au 12 juin à la TOHU.