La troupe du spectacle Iris du Cirque du Soleil présenté dès la fin juillet au Kodak Theatre de Los Angeles quittera Montréal dans quelques jours pour Hollywood. La Presse a assisté aux dernières répétitions et a rencontré le metteur en scène d'Iris, Philippe Decouflé.

Studio AB du Cirque du Soleil à Montréal. Hier, les artistes d'Iris peaufinaient leurs numéros avant de plier bagage, dans quelques jours, pour le Kodak Theatre, là où sont décernés les Oscars depuis 2002.

Ce spectacle, qui rendra hommage au cinéma, sera présenté 368 fois par an à L.A. pendant 10 ans. Chaque année, la scène sera démontée pour permettre à la cérémonie des Oscars d'être présentée. Le Cirque du Soleil a donc dû transformer la scène - au coût de 40 millions de dollars - afin notamment d'y construire deux ascenseurs.

«On a creusé 44 pieds pour les aménager et faire en sorte qu'ils ne paraissent pas trop, dit François Bérubé, directeur de production. On a aussi réduit la capacité de la salle de 3400 à 2500 places pour que tous les spectateurs vivent la même expérience.»

Le cirque a aussi dû demander une autorisation à la Ville de Los Angeles pour qu'elle autorise les exercices acrobatiques au-dessus des spectateurs.

La Presse a rencontré François Bérubé dans la salle de création où sont affichées les différentes parties du spectacle, les photos des costumes et la maquette de la scène. On peut en voir des extraits sur le site Facebook d'Iris.

«Ce sera notre propre lecture de l'histoire du cinéma, dit M. Bérubé. Il n'y aura pas d'images de films particuliers. On abordera l'invention du cinéma, l'époque noir et blanc, les premières machines à image, comme le praxinoscope, la naissance de la pellicule, etc.»

Acrobaties spectaculaires

Hier, Raphaël Cruz (qui tient le rôle principal) et une douzaine de ses collègues répétaient un numéro au trampoline, une scène qui se passe sur les toits. On a reconstitué deux vieilles maisons en briques et les toits sont des trampolines. La bagarre entre deux bandes de malfrats est spectaculaire quand on voit les artistes sauter dans les airs avec des mitraillettes dans les mains, faire des vrilles et remonter s'accrocher à une passerelle ou à un réservoir d'eau.

«Tout n'est pas encore au point, dit Raphaël Cruz. Mais je suis en train de densifier mon travail de trampoline et d'acrobaties pour en faire quelque chose de parfait. Il y a encore du travail à faire.»

Le spectacle permettra aussi de voir Uuve Jansson et Emma Henshall au trapèze. Parmi les autres stars, François Bérubé mentionne le compositeur Danny Elfman. «Il va nous permettre d'avoir une crédibilité instantanée à L.A., dit-il. C'est une icône de la musique de films hollywoodiens.»

Dans Iris, il y a aussi Alice Dufour, la danseuse sexy du cabaret Crazy Horse de Paris - dont le nom de scène est Jade Or - venue à Montréal avec le metteur en scène, Philippe Decouflé, qui a revampé la chorégraphie du célèbre cabaret parisien. Mardi, elle s'entraînait avec un ruban. Championne de France de gymnastique rythmique, mannequin et comédienne, elle partagera un rôle avec la star de l'équilibre Olga Pikhienko.

«Je voulais deux artistes pour jouer le même rôle, un peu comme dans Vertigo, dit Philippe Decouflé. Alice est sublime à regarder danser et Olga est une équilibriste expérimentée.»

Philippe Decouflé a beau avoir mis en scène les cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux olympiques d'Albertville, en 1992, il n'avait jamais travaillé avec une machine comme le Cirque du Soleil. Danseur et chorégraphe, il a été approché cette année-là par Guy Laliberté pour travailler avec lui.

«Je ne me sentais pas prêt à l'époque, dit-il. J'ai une certaine fragilité à travailler pour une grande entreprise. Je l'ai regretté après, vu la croissance du Cirque! Aujourd'hui, je me rends compte que je n'ai jamais travaillé avec des gens de ce niveau.»

Sans être bridé par le style du Cirque du Soleil, il doit se conformer à une certaine esthétique. «L'esthétique dominante ici est liée au baroque italien, à la commedia dell'arte, moi, mon école est française, ce sont Les Enfants du paradis et le théâtre d'ombres. Je ne suis pas dans le bouffon.»

Mais Philippe Decouflé est persuadé que l'art du cirque est en perpétuel mouvement, au gré des influences. C'est aussi l'avis de Shana Carroll, membre fondatrice des 7 doigts de la main, qui conçoit la performance acrobatique d'Iris. «Il faut respecter la couleur du Cirque du Soleil et, en même temps, apporter une part de nous-mêmes, dit-elle. Sinon, cela ne donnerait rien de nouveau.»

Danse

«La danse est mon vocabulaire et sera omniprésente dans Iris, ajoute pour sa part Philippe Decouflé. Je veux d'ailleurs rendre hommage à Shana qui a créé une chorégraphie acrobatique qui s'apparente à la danse.»

Guy Laliberté a assisté à une répétition de la première partie d'Iris. Il a insisté pour qu'on donne «plus de couleurs», nous a dit un membre de la troupe. Mais sinon, tout se passe bien. Le Figaro a bien révélé récemment que l'atelier de costumes a été «tourné en bourriques» par le responsable des costumes, le Français Philippe Guillotel. Et Philippe Decouflé en a assez des réunions! Il a hâte d'être à L.A., pour travailler la lumière et les vidéos qui donneront de la magie au show de 100 millions.

«Quand on regarde la scène sur les toits, on va faire en sorte que ça ressemble à une scène de Dick Tracy ou un film noir des années 30, dit-il. Et puis, il est temps de changer d'air. Certains artistes vivent ici depuis cinq mois. Ils ont besoin de se nourrir.»

Les répétitions débuteront le 2 mai au Kodak Theatre. Il faut être prêt pour la sortie «soft» d'Iris fin juillet et pour la première officielle le 25 septembre. «On va travailler au Studios Universal, où fut tourné le premier King Kong, dit Philippe Decouflé. Et bien sûr sur Hollywood Boulevard, avec les éléments de décor. Iris aura un cachet français, mais je fais tout pour le faire américain!»