Équipe Spectra a maintenu mardi sa décision de devancer en juin la tenue des FrancoFolies de Montréal en dépit de la colère du maire de Québec et d'une revue à la baisse de sa subvention annuelle.

La nouvelle grille horaire du grand rendez-vous montréalais de la chanson francophone ne fait pas du tout l'affaire du maire de Québec, Régis Labeaume, qui redoute la concurrence des FrancoFolies avec le Festival d'été.

La frustration de M. Labeaume a laissé de glace le maire de Montréal, Gérald Tremblay, qui a défendu bec et ongles la décision le président-fondateur des FrancoFolies, Alain Simard, de «déménager» l'événement d'août à juin.

«La décision est prise. Cela fait 12 ans que ce débat est sur la place publique (...) Notre objectif, c'est de favoriser davantage nos festivals au mois de juin et au mois de juillet», a fait savoir le maire Tremblay, le ton tranchant, en point de presse à Montréal.

Mais pour Régis Labeaume, le calendrier retenu par Spectra est un affront innommable.

Il accuse Alain Simard de s'être comporté de la «pire façon qui soit» en décidant unilatéralement de devancer la tenue des FrancoFolies pour arracher au Festival d'été les meilleures têtes d'affiche de la chanson française.

«Si les FrancoFolies se tiennent avant le Festival d'été, elles vont écrémer le marché et attireront de meilleurs artistes que le Festival d'été. Il y aura donc des conséquences pour la visibilité (du Festival d'été) et la commandite et donc des conséquences financières», a fulminé M. Labeaume, lors d'une brève rencontre avec les journalistes.

Quitte à lui couper les vivres, Québec doit remettre au pas le patron d'Équipe Spectra, a soutenu le maire, furieux.

«Tu n'as pas le droit de prendre le risque d'affecter une organisation sans but lucratif qui appartient au public depuis 42 ans pour aider une entreprise privée à faire plus d'argent», a-t-il expliqué.

Sans argument rationnel, M. Labeaume tente de salir la réputation de Spectra et de son président, a répliqué Gérald Tremblay.

«Je suis surpris que les arguments deviennent très personnels. Lorsqu'on attaque des individus, lorsqu'on s'attaque au groupe Spectra et à son président, je crois que l'on est à court d'arguments», a-t-il évalué.

Pour M. Tremblay, le maire de Québec n'a pas de leçon à donner sur le plan de la consultation. Il a cité en exemple le Grand Rire, tenu chaque année en juin à Québec, un «copier-coller» du Festival Juste pour rire montréalais, a-t-il avancé.

«Je n'étais pas maire quand cela a été créé, a rétorqué M. Labeaume. Si j'avais été maire à l'époque, ça ne se serait pas passé comme ça parce qu'on ne veut pas tenir ici des festivals qui vont concurrencer Montréal.»

Aux yeux du premier magistrat de la capitale, c'est maintenant au gouvernement d'entrer en scène afin de forcer Alain Simard à revenir sur sa décision.

«L'arbitrage final, ce sont les gouvernements qui le font. La dernière fois, M. Simard n'a pas changé de date parce que les gouvernements lui ont dit: 'Non, tu ne le feras pas, sinon il y aura un problème avec ta subvention'. C'est la seule façon de régler ça», a-t-il soutenu.

Spectra avait à deux reprises par le passé devancé la tenue des FrancoFolies. Sa dernière tentative remontait à 2006.

En entrevue, la ministre du Tourisme, Nicole Ménard a exhorté les parties à «trouver un consensus à très court terme».

À défaut d'une entente, le gouvernement du Québec réévaluera son soutien financier annuel de 1,3 million $ destiné aux FrancoFolies, a-t-elle indiqué.

«Notre financement est modulé en fonction de la tenue de l'événement au mois d'août. S'il se tient en juin, il faudra revoir les données et apporter les ajustements en conséquence», a dit la ministre.

Cette perspective n'effraie pas le grand patron de Spectra. L'ajustement représentera tout au plus une diminution de 200 000 $ de l'aide financière, a-t-il estimé.

«Il n'appartient pas au maire d'une ville d'empêcher un festival dans une autre ville (...) C'est quelque chose qui devrait être du passé, ces chicanes-là», a fait valoir M. Simard, en point de presse.

«On ne peut pas s'empêcher de vivre à Montréal parce que Québec a des inquiétudes», a-t-il poursuivi, nullement enclin à céder un pouce.