À courir d'une salle bondée à l'autre, il est évident que le festival MUTEK a atteint un seuil de popularité qui saura garantir sa pérennité. Pourtant, depuis deux ans, la scène électronique montréalaise connaît l'exil de certains de ses plus illustres membres. Explications avec Colin de la Plante, alias The Mole.

Guillaume & The Coutu Dumonts. Ernesto. Deadbeat. Mike Shannon. Jeff Milligan... Voilà un échantillon des artistes qui habitaient Montréal il y a deux ans et qui s'acharnaient à mettre leur nom, et celui de notre ville, sur la carte. Depuis, la scène électronique d'ici a connu un important exil de talents, dont plusieurs ont élu domicile à Berlin.

 

Colin de la Plante, originaire de la Colombie-Britannique, Montréalais pendant 10 ans, est l'un des derniers à avoir quitté notre ville au profit de la Mecque du techno allemand.

«J'ai quitté la Colombie-Britannique en 1998, pour m'installer à Montréal. À l'époque, j'étais très impliqué dans la scène - d'ailleurs, le groupe Modern Deep Left Quartet est né à cette époque, à Victoria». Le groupe, qui comprend aussi Mathew Jonson, se produit demain à la SAT.

«J'ai choisi Montréal parce que c'était cool. Je suis arrivé juste au bon moment», alors que le fondateur du festival, Alain Mongeau, dirigeait le volet Nouveaux médias du Festival international du nouveau cinéma. «J'étais spectateur au premier MUTEK. En 2003, j'ai donné ma première performance de turntablism, avec Martin Tétreault.»

Les performances à plusieurs tables tournantes, le travail de DJ (au Laika, notamment, pendant huit ans) puis de producteur tech-house ont établi sa réputation, d'abord sur la scène locale, puis à l'extérieur de nos frontières. The Mole a édité ses compositions sur le label Musique Risquée, et lancé son premier album, As High as the Sky, l'année dernière sur le label Wagon Repair, géré par les amis canadiens à Berlin.

«Plusieurs raisons nous ont incités à quitter Montréal. D'abord, le coût de la vie à Berlin n'est pas très élevé. Ensuite, la ville est cool et ouverte aux étrangers. Sans parler de la communauté de musiciens qui y habitent. Et il y a du boulot pour nous.» Les occasions de performer, sur scène ou dans des clubs, sont nombreuses, en Allemagne et ailleurs en Europe.

Vincent Lemieux, un des programmateurs du festival MUTEK, se désole du départ de ses amis et musiciens qui rendaient vivante la scène électronique montréalaise. «Le bon côté de la chose, dit-il, c'est que ces gens-là deviennent de fidèles ambassadeurs de notre scène et du festival. Ils y sont attachés: lorsqu'ils accordent des entrevues, ils continuent de faire rayonner la scène.»

D'autre part, juge Lemieux, ces départs permettent à la relève de combler le vide, «même si elle ne s'est pas encore tout à fait manifestée. Par contre, ça oblige aussi le festival à s'ouvrir aux musiciens qui habitent toujours notre ville et qui explorent d'autres styles musicaux moins traditionnellement identifiés à MUTEK», ajoute-t-il en citant le travail de Ghislain Poirier et de Megasoid (qui étaient de l'affiche MUTEK l'an dernier).

C'est un peu pour saluer ces ex-Montréalais que le festival a mis sur pied l'affiche Soirée canadienne demain soir. Pheek, Mateo, Stephen Beaupré, Akufen et le Modern Deep Left Quartet y seront.

The Mole se produit le 30 mai au Piknic Électronik, au parc Jean-Drapeau, et le 31 mai à la SAT avec le Modern Deep Left Quartet.