La Française Sylvie Guillem, personnalité rebelle au physique «extraterrestre», selon le mot du chorégraphe Maurice Béjart, a choisi une tournée internationale en 2015 pour faire ses adieux à la scène après 39 ans de carrière, de l'Opéra de Paris à la danse contemporaine.

«J'ai tout aimé de ces 39 ans, chaque moment, et j'aime encore aujourd'hui de la même façon. Alors pourquoi? Tout simplement parce que je souhaite arrêter heureuse en faisant ce que je fais, comme je l'ai toujours fait, avec passion et fierté», explique la danseuse de 49 ans, dans son communiqué diffusé mardi pour annoncer une tournée internationale baptisée Life in Progress entre mars et décembre de l'année prochaine.

Pour ses adieux, Sylvie Guillem visitera chacune des grandes scènes qu'elle a fréquentées au cours d'une carrière atypique, commencée dans le ballet classique et poursuivie avec des créations toujours plus audacieuses, en partenariat avec les plus grands chorégraphes contemporains. La tournée passera évidemment par Londres, où elle est artiste associée du théâtre Sadler's Wells depuis 2006, Lyon, dans le centre-est de la France où elle est une fidèle du festival des Nuits de Fourvière, Paris, où elle se produit régulièrement au Théâtre des Champs-Élysées et se terminera à Tokyo, qu'elle «adore».

Life in Progress comprendra deux créations des chorégraphes Akram Khan et Russell Maliphant, et deux reprises de pièces de William Forsythe et Mats Ek, qui ont tous profondément marqué sa carrière.

Sylvie Guillem, c'est d'abord un physique exceptionnel, le fameux «six o'clock», pied à l'oreille, les jambes extraordinairement mobiles qui balaient l'espace.

Sa mère la destinait à dix ans à la gymnastique de compétition. Elle entre finalement à 12 ans à l'école de danse de l'Opéra de Paris, puis dans le corps de ballet. Elle est nommé étoile à seulement 19 ans par Rudolf Noureev, alors maître de ballet, en 1984. Mais en 1989 elle lui donne sa démission, contestant la règle qui interdisait à l'époque de danser à l'étranger. «Elle claque la porte, et dans le monde très policé de la danse, ça ne se faisait tout simplement pas», rappelle Valérie Samuel, amie de la chorégraphe, dont elle assure la communication depuis 20 ans.

«Mademoiselle Non»

Sylvie Guillem débarque seule à Londres en 1989 pour rejoindre le Royal Ballet comme «principal guest artist», embrasse le répertoire anglais (Kenneth MacMillan, Frederick Ashton), conquiert les scènes internationales. Elle est l'une des rares stars de la danse d'aujourd'hui avec une cohorte de fans prêts à tout pour décrocher un billet.

Surnommée «Mademoiselle Non» pour son intransigeance, jugée par certains froide et hautaine, elle cache, selon Valérie Samuel, une grande humanité. «Elle est extrêmement exigeante, mais très attentive aux autres, fidèle en amitié. C'est une sorte de volcan, tout le contraire de l'eau tiède», explique-t-elle.

Danseuse au physique prodigieux, elle saura au fil du temps ménager son corps pour prolonger une carrière que beaucoup arrêtent à 40 ans, explorant d'autres formes de danse.

Le Suédois Mats Ek chorégraphie pour elle Wet Woman puis Smoke. D'une curiosité insatiable, elle monte des productions avec de jeunes chorégraphes contemporains, aujourd'hui devenus des stars, comme Russell Maliphant, avec qui elle interprète Push, et Akram Khan (Sacred Monsters).

Parallèlement, elle s'engage avec ferveur dans la protection des animaux et au côté de l'association Sea Sherpherd, dont les bateaux s'interposent entre les baleines et le harpon des pêcheurs. «J'ai envie de combats trop grands pour moi», confiait-elle au quotidien français Le Figaro en juin 2012, évoquant ses projets lorsqu'elle aurait raccroché ses chaussons.

«Ensuite, je me consacrerai aux animaux, à certaines organisations, je militerai à fond».