Passionnés d'expression corporelle, d'installation et de technologie, la danseuse et chorégraphe Marie Chouinard et l'artiste et professeur d'arts interactifs Luc Courchesne se sont associés pour créer Corps célestes, un ballet contemporain numérique qui sera projeté à la Société des arts technologiques du 4 au 20 juin, et dont La Presse a vu les derniers réglages.

Mercredi 15 mai. 16h. Dôme de la Satosphère. Troisième étage de la Société des arts technologiques (SAT), à Montréal. Le programmeur Emmanuel Durand et le compositeur Louis Dufort font les dernières mises au point de la «performance installative» Corps célestes, sur une console, avec les instructions de Luc Courchesne et de Marie Chouinard.

Projetées sur la surface de 360º du dôme, les images dans les tons de jaune de deux danseurs de la Compagnie Marie Chouinard, Lucy M. May et Manuel Roque, se promènent, se croisent, s'imbriquent et se séparent, semblant flotter dans un ciel bleu foncé, 13 mètres au-dessus de nos têtes.

«Tu vois, on envoie les images comme ça dans l'espace, mais parfois leurs corps s'agglutinent alors qu'on veut qu'ils restent séparés pour bien identifier qu'ils sont des duos», explique Marie Chouinard, allongée sur un des divans de la Satosphère afin de mieux apprécier la musique issue des 157 haut-parleurs et les images révélées par 8 projecteurs vidéo.

«Les gens qui aiment le travail de Marie vont reconnaître dans les images de ses deux danseurs la gestuelle qu'elle a créée, mais aussi son esprit», dit Luc Courchesne. «Merci de m'avoir attirée dans l'ombre!» lance alors Marie Chouinard avec humour.

Très complices, Luc Courchesne et Marie Chouinard ont déjà travaillé ensemble lors de l'installation Icônes en 2009, à la galerie Pierre-François Ouellette. Ils sont captivés autant l'un que l'autre par ce que la technologie peut apporter en matière de créativité. La chorégraphe avait envie depuis plusieurs années de forger une oeuvre avec la technologie du dôme de la SAT. Mais la technologie n'était pas prête. De son côté, Luc Courchesne voulait voir comment Marie Chouinard utiliserait le potentiel des lieux immersifs.

La conception de Corps célestes a débuté par un tournage en studio des deux danseurs interprétant des sections de la chorégraphie Le nombre d'or (live), que la Compagnie Marie Chouinard a conçue en 2010. «Ce sont comme des algorithmes, dit Marie Chouinard. Les danseurs ont fait des petits gestes, tournant et rebondissant sur place, faisant des sons et parlant, et le tout de façon rythmée avec un métronome pour qu'on puisse ensuite les synchroniser avec la musique.»

»Deuxième étape de chorégraphie»

Les deux artistes ont ensuite traité, monté et scénarisé cette matière brute avec le programmeur et le compositeur. «C'est à ce moment-là qu'on décide si les danseurs doivent être petits ou énormes, seuls ou à deux, etc., dit Marie Chouinard. C'est une deuxième étape de chorégraphie.»

Sur le dôme, le résultat graphique, à la fois classique et moderne, est saisissant. Mais ce 15 mai, Luc et Marie cherchaient encore à améliorer la fluidité des images et le placement des corps des danseurs, afin de donner le meilleur effet possible.

Sans évidemment comparer les deux oeuvres, Corps célestes rappelle l'arrangement pictural de Michel-Ange dans la chapelle Sixtine, à cause notamment des contrastes de couleurs et des corps parfois massifs qui s'expriment comme en suspension atmosphérique.

Le film d'environ 40 minutes sera projeté dès mardi en boucle, mais avec de légers décalages récurrents. Si vous restez plus longtemps que 40 minutes, ce sont donc des images légèrement différentes que vous verrez, ce qui fait de Corps célestes une oeuvre flottante au scénario qui dérive comme une danse jamais identique. Humaine.

«C'est comme ça que j'aime utiliser la technologie, dit Marie Chouinard. En allant vers la beauté, le classique et l'humain.»

Corps célestes Performance installative de Marie Chouinard et Luc Courchesne. Du 4 au 20 juin (du mardi au vendredi), en continu entre 19h et 20h30.