Inspiré par l'univers surréaliste de René Magritte, le chorégraphe allemand Stephan Thoss offre aux Grands Ballets une création absolument hypnotique, visuellement et psychiquement captivante.

Cette pièce complexe et minutieuse, dont la première a eu lieu jeudi soir au Théâtre Maisonneuve, exerce un puissant pouvoir d'attraction. Tous les éléments de Rêve concourent à faire glisser le spectateur entre les surplis de l'inconscient avec sa part de mystère tissée d'images illogiques, parce que symboliques, et inquiétantes parce qu'elles échappent aux références rationnelles attendues.

Exactement comme un rêve. Et, comme après un rêve, les images de cette pièce, et la sensation physique déroutante qu'elles produisent, nous poursuivent longtemps après la fin.

La gestuelle est énergique, habitée de l'intérieur, faite de projections des membres alternées de brusques cassures, de torsions et contorsions du tronc, ainsi que d'une grande proximité sensuelle entre les 32 interprètes.

À l'avant-scène, deux personnages, une écrivaine et son inconscient masculin, s'entremêlent dans un sommeil éveillé, celui de la création à l'oeuvre. Derrière eux est projetée une vidéo aux images symbolico-oniriques en noir et blanc qui rappellent les films de Fritz Lang.

En alternance, au travers d'une maille iridescente, se succèdent des scènes d'une esthétique inattendue. Ce sont les nombreux personnages de l'écrivaine qui littéralement dansent dans son sommeil inspiré. Dans un clair-obscur feutré créé par Marc Parent, les costumes, le décor, tout comme la vidéo, sont également signés Thoss.

Si l'univers de Magritte est reconnaissable, c'est surtout l'expressionnisme allemand, celui de Laban, de Wigman, de Palucca, mais aussi de Lang, qui éclate ici avec toute sa puissance émotive et métaphorique. Rêve s'inscrit dans cette lignée.

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Rêve, de Stephan Thoss, jusqu'au 25 mai au Théâtre Maisonneuve.